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Par lutherien le 26 Novembre 2009 à 16:41
LA DOCTRINE DE L'EGLISE
"Nous enseignons aussi qu'il ne doit y avoir qu'une sainte Eglise chrétienne et qu'elle subsistera éternellement. Elle est l'assemblée de tous les croyants parmi lesquels l'Evangile est prêché fidèlement et les saints sacrements administrés conformément à l'Evangile" (Confession d'Augsbourg, Article VI). "Dieu merci, un enfant de sept ans sait aujourd'hui ce qu'est l'Eglise: ce sont les saints croyants, "les brebis qui écoutent la voix de leur berger". Les enfants en effet prient ainsi: "Je crois une sainte Eglise chrétienne". Cette sainteté ne consiste pas dans les surplis, les tonsures, les chasubles, ni dans les cérémonies étrangères à l'Ecriture et d'invention humaine, mais dans la Parole de Dieu et la vraie foi" (Articles de Smalcalde, III, 12).
1. L'EGLISE
Le concept d'Eglise:
Le mot "Eglise" qu'on a l'habitude d'écrire avec une minuscule quand il s'agit d'un bâtiment et avec une majuscule dans tous les autres cas, vient d'un terme grec qui signifie "assemblée". Dans la vie publique, à Athènes par exemple, l'Eglise était l'assemblée des citoyens réunis pour décider du sort de leur ville. Littéralement, le mot signifie "appelée". L'Eglise est, dans l'enseignement de la Bible, comme nous allons le voir, l'assemblée des croyants, le peuple de ceux que Dieu a appelés au salut par la prédication de l'Evangile et l'administration des sacrements. Le mot désigne tantôt l'assemblée locale réunie autour des moyens de grâce, tantôt le peuple de Dieu dans une région ou un pays donnés, et enfin l'Eglise universelle constituée de tous les croyants du monde.
Le mot est employé dans son sens local et désigne l'Eglise en un lieu donné, quand il est dit par exemple qu'il y eut "une grande persécution contre l'Eglise de Jérusalem" (Actes 8:1), qu'il y avait des prophètes dans "l'Eglise d'Antioche" (Actes 13:1), ou encore que Paul "fortifiait les Eglises" de la Syrie et de la Cilicie (Actes 15:41). Cf. encore Matthieu 18:17; Actes 5:1; 14:23; 16:15; 20:28; 12 Corinthiens 1:2; 16:19, etc.
Le terme désigne l'Eglise en une région ou une province donnée, quand il est dit par exemple que Saul "ravageait l'Eglise" (Actes 8:3), que "l'Eglise était en paix dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie" (Actes 9:31).
Il existe aussi ce qu'on appelle l'Eglise domestique, un groupe de chrétiens se réunissant autour des moyens de grâce dans une maison, au foyer d'un de ses membres: "Saluez l'Eglise qui est dans leur maison", écrit l'apôtre aux Romains (Romains 16:4). Aquilas et Priscille accueillaient l'Eglise dans leur maison (1 Corinthiens 16:19). Cf. encore Colossiens 4:15; Philémon 2.
Enfin, l'Eglise est l'ensemble des croyants du monde entier, auxquels il convient encore d'ajouter les croyants parvenus à la gloire et réunis autour du trône de Dieu. Parlant de son peuple tout entier, Jésus dit à Pierre: "Tu es Pierre, et sur cette pierre j'édifierai mon Eglise, et les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle" (Matthieu 16:18). Les maris doivent aimer leurs femmes comme Christ "a aimé son Eglise et s'est livré lui-même pour elle" (Ephésiens 5:25). L'apôtre souffre pour le corps de Christ "qui est l'Eglise" (Colossiens 1:24).
Le Nouveau Testament utilise donc un seul terme pour désigner ce pour quoi nous en employons plusieurs. Il s'ensuit qu'il n'y a pas de différence fondamentale entre l'Eglise universelle et l'Eglise particulière. La seule différence réside dans l'extension géographique. L'Eglise locale est Eglise du Christ au même titre que l'Eglise universelle. Elle possède les mêmes titres et a droit aux mêmes bénédictions et aux mêmes privilèges.
Les titres de l'Eglise:
L'Eglise chrétienne possède de véritables titres de noblesse qui l'identifient comme le peuple que Dieu aime tendrement et avec fidélité, qu'il a racheté et appelé à la vie éternelle en Jésus-Christ. C'est vrai au sens local et universel.
L'Eglise est l'épouse du Christ: "Viens, je te montrerai l'Eglise, la femme de l'Agneau" (Apocalypse 21:9). "Maris, aimez vos femmes comme Christ a aimé son Eglise et s'est livré lui-même pour elle" (Ephésiens 5:25). Cf. aussi toutes les paraboles des noces ou du festin nuptial (Matthieu 22:1-14; Luc 14:16-24) et tous les textes bibliques identifiant les relations entre Dieu et son peuple au lien conjugal, à l'amour d'un mari pour sa femme, déclarant que le Seigneur reste fidèle à son peuple et assimilant toute infidélité de la part de son peuple à de l'adultère ou de la prostitution spirituelle (Ezéchiel 16:15 ss.; Osée 2:16 ss.).
L'Eglise est aussi le troupeau du Seigneur. Jésus, le bon Berger, dit: "Je connais mes brebis et elles me connaissent, comme le Père me connaît et comme je connais le Père, et je donne ma vie pour mes brebis" (Jean 10:14; cf. aussi Jean 10:16). Elle est encore la maison ou le temple de Dieu: "Nous sommes le temple du Dieu vivant, comme Dieu l'a dit: J'habiterai et je marcherai au milieu d'eux. Je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple" (2 Corinthiens 6:16). "En Jésus-Christ, tout l'édifice bien coordonné s'élève pour être un temple saint dans le Seigneur. En lui vous êtes aussi édifiés pour être une habitation de Dieu en esprit" (Ephésiens 2:21.22). Cf. encore 1 Timothée 3:15.
Elle est l'assemblée des enfants de Dieu. Jésus est chargé de "réunir dans un seul corps les enfants de Dieu dispersés" (Jean 11:51.52). En lui nous recevons l'adoption. Nous sommes "fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ" (Galates 3:26). Cf. encore Jean 1:12; Romains 8:16; Galates 4:4.5. L'Eglise est encore le Royaume de Dieu. Ou du Christ. Le "royaume du Fils de son amour" dans lequel nous avons été transplantés (Colossiens 1:13.14), ce Royaume dans lequel on entre en naissant de nouveau (Jean 3:3.5), qui "ne vient pas de manière à frapper les regards", car il est "au milieu" ou "au-dedans" de nous (Luc 17:20.21).
L'Eglise chrétienne est encore une assemblée de sacrificateurs royaux, de "sacrificateurs pour Dieu" (Apocalypse 1:6; 5:10). Pierre dit des chrétiens: "Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière" (1 Pierre 2:9). La comparaison de textes tels que Ephésiens 2:21.22 et 1 Timothée 3:15 montre qu'un même titre appartient aussi bien à l'Eglise universelle qu'à l'Eglise locale. Celle-ci n'est qu'une fraction de celle-là.
Définition de l'Eglise:
Dans le sens strict du terme, le mot "Eglise" désigne l'assemblée des vrais croyants, des saints de Dieu, de tous les pécheurs que, dans le monde entier ou en un lieu donné, l'Evangile a appelés au salut, convertis à Jésus-Christ, régénérés et sanctifiés pour qu'ils appartiennent au Seigneur et héritent de la vie éternelle. Il est dit dans les Actes des apôtres qu'en se convertissant, des gens étaient "ajoutés" à l'Eglise (Actes 2:38.41.47; 5:14, dans le texte original). L'apôtre Paul affirme que l'Eglise de Dieu est composée de saints (1 Corinthiens 1:1; 2 Corinthiens 1:1; Ephésiens 1:1; Philippiens 1:1; Colossiens 1:2). C'est donc par la foi qu'on entre dans l'Eglise chrétienne, qu'on devient membre du peuple de Dieu. C'est par elle en effet qu'on est brebis de Jésus-Christ (Jean 10:14.15.27), qu'on trouve le pardon auprès de lui, qu'on devient enfant de Dieu (Galates 3:26). L'Eglise chrétienne est le peuple pour lequel le Christ s'est livré à la mort, qu'il purifie et sanctifie. Le Baptême est le signe visible de l'entrée dans ce peuple (Actes 2:38.41; Galates 3:26.27). C'est par la foi qu'on est uni au Christ comme le sarment l'est au cep (Jean 15:1-8) ou le corps à son chef.
Questions de révision et exercices:
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1) Indiquez l'origine du mot "Eglise" et donnez-en une définition biblique en la justifiant à l'aide de citations.
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2) Expliquez Jean 10:11-18.26-30 et Ephésiens 5:22-27 et dégagez de ces textes un enseignement sur l'Eglise chrétienne. Précisez ce que ces deux textes ont de commun et en quoi ils diffèrent.
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3) Rappelez quelques images illustrant l'Eglise dans la Bible et énumérez ses titres. Qu'est-ce que vous en déduisez?
Les propriétés ou particularités de l'Eglise:
L'Eglise a un certain nombre de propriétés qui l'identifient comme le peuple de Dieu. C'est ainsi qu'elle est une, et cela malgré le spectacle de ses divisions: "J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie. Celles-là, il faut que je les amène. Elles entendront ma voix, et il y aura un seul troupeau, un seul berger" (Jean 10:16). "Il y a un seul corps et un seul Esprit, comme aussi vous avez été appelés à une seule espérance par votre vocation. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous et parmi tous et en tous" (Ephésiens 4:4-6). Cf. encore Hébreux 12:22.23. Les divisions déchirent certes la chrétienté visible, mais pas le peuple de Dieu qui reste uni par la foi en son Sauveur.
L'Eglise chrétienne est aussi sainte. Ses membres ont été "lavés, sanctifiés, justifiés au nom du Seigneur Jésus-Christ" (1 Corinthiens 6:11). Ils sont "saints en Jésus-Christ" (Philippiens 1:1; Colossiens 1:2), sanctifiés en lui (1 Corinthiens 1:1.2; Ephésiens 5:25-27). Par la foi en Christ, ils ont obtenu le pardon et ont été placés sur un chemin sur lequel le Saint-Esprit agit dans leur coeur et leur vie et les fait marcher dans la sainteté et la justice.
L'Eglise est encore universelle. Catholique, au sens étymologique du terme. Elle ne connaît aucune frontière, historique, culturelle, politique, raciale, linguistique, sociale, ni même ecclésiastique. Tous ceux qui croient en Jésus et confessent son nom font partie du même peuple, quelles que soient leurs origines. Même dans l'ancienne alliance, les croyants ont été sauvés de la même façon, par la foi en Christ. C'est ce que montre l'exemple d'Abraham qui s'est réjoui de voir "le jour du Christ" (Jean 8:56), et ce qu'affirment les prophètes déclarant que "quiconque croit en lui reçoit par la foi en son nom le pardon des péchés" (Actes 10:43).
On dit aussi que l'Eglise est infaillible. Non pas dans le sens qu'a ce terme dans le dogme catholique, mais au sens étymologique du mot: elle ne tombera pas, mais subsistera toujours. "Les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle", disait Jésus (Matthieu 16:18). On ne peut pas séduire les élus (Matthieu 24:24), car Dieu veille sur leur salut et personne ne peut les arracher de sa main ni de la main de son Fils (Jean 10:28.29).
L'Eglise est apostolique, car bâtie "sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre angulaire" (Ephésiens 2:20). C'est par la parole des apôtres que les hommes croient en Christ (Jean 17:20.21). C'est dans leur enseignement que l'Eglise persévère (Actes 2:42), et nul n'a le droit d'annoncer un autre Evangile que le leur (Galates 1:9).
L'Eglise est par ailleurs l'unique détentrice du salut. Il n'y a pas de salut en dehors d'elle. Cela, bien sûr, ne s'applique à aucune dénomination particulière, mais ne vaut que de l'Eglise chrétienne ou, si on préfère, invisible. Il faut faire partie du peuple de Dieu pour être sauvé, et on l'est partout où on se repent de ses péchés et croit de tout coeur en Jésus-Christ, à quelque Eglise visible qu'on appartienne. "Le Seigneur ajoutait chaque jour à l'Eglise ceux qui étaient sauvés" (Actes 2:47). Cela signifie inversement que tant qu'on ne croit pas en Christ et qu'on n'est pas devenu membre de l'Eglise chrétienne, on n'a pas la vie éternelle.
Enfin on distingue communément entre Eglise invisible et Eglise visible. Ce ne sont pas deux Eglises distinctes, mais il s'agit toujours de la seule et unique Eglise envisagée de façons différentes. Elle est en soi invisible, puisque c'est par la foi qu'on en devient membre. Le Seigneur est seul à connaître les siens (2 Timothée 2:19), et le Royaume de Dieu ne vient pas de manière à "frapper les regards", car il est parmi nous ou au milieu de nous (Luc 17:20.21). C'est pourquoi l'Eglise chrétienne est un article de foi: "Je crois la sainte Eglise chrétienne...".
Mais la foi ne reste jamais cachée. Elle se manifeste toujours par les oeuvres. D'autre part, c'est par sa Parole et les sacrements que Dieu assemble, édifie, sanctifie et sauve son peuple. L'Eglise se réunit autour des moyens de grâce et persévère "dans l'enseignement des apôtres, dans la fraction du pain, dans la communion fraternelle et dans les prières" (Actes 2:42). D'invisible, elle devient de la sorte visible. Bien que Dieu seul connaisse les siens, on sait où elle est. Partout où l'Evangile est prêché, où des gens sont baptisés et communient au corps et au sang du Christ, le Saint-Esprit est à l'oeuvre, appelle, édifie, sanctifie et sauve. La Parole de Dieu ne retourne jamais à lui sans effet, sans avoir exécuté sa volonté et accompli ses desseins (Esaïe 55:10.11). On appelle pour cela la Parole de Dieu et les sacrements les notes ou marques de l'Eglise.
Cela signifie aussi qu'il peut y avoir, parmi ceux qui se regroupent ainsi autour de l'Evangile et des sacrements, des hypocrites et des impénitents. Ils sont au milieu les chrétiens, l'oeil humain ne les discerne pas (du moins aussi longtemps qu'ils dissimulent l'impiété de leur coeur), mais quoique mêlés aux enfants de Dieu et bien que leurs noms figurent dans les registres paroissiaux, ils ne font pas partie de son peuple. Cette précision est de la plus grande importance. L'appartenance à une paroisse est importante, certes, mais à elle seule elle ne sauve pas. Il faut pour cela être membre du peuple de Dieu.
On distingue encore entre Eglise orthodoxe et Eglise hétérodoxe. L'Eglise orthodoxe est par définition celle qui enseigne la Parole de Dieu dans toute sa pureté, sans s'en écarter en rien, et qui administre les sacrements conformément à l'institution du Seigneur. Les notes ou marques de l'Eglise y sont préservées pures. Inversement, on appelle Eglise hétérodoxe une Eglise qui erre dans un ou plusieurs points de la doctrine chrétienne, sans pour autant renverser le fondement même de la foi, auquel cas elle n'est plus Eglise, mais une secte. Il est du devoir des chrétiens et donc de l'Eglise de demeurer dans la Parole du Christ (Jean 8:31.32), de "tenir tous un même langage et de ne point avoir de divisions" parmi eux, mais d'être "parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment" (1 Corinthiens 1:10). L'apôtre Paul écrit aux chrétiens de Rome: "Je vous exhorte, frères, à prendre garde à ceux qui causent des divisions et des scandales au préjudice de l'enseignement que vous avez reçu. Eloignez-vous d'eux" (Romains 16:17). Il leur est demandé de ne pas "enseigner d'autres doctrines" ni de "s'attacher à des fables et des généalogies sans fin, qui produisent des discussions plutôt qu'elles n'avancent l'oeuvre de Dieu dans la foi" (1 Timothée 1:3.4). Aucun autre Evangile que celui des apôtres ne doit être proclamé dans l'Eglise (Galates 1:8.9), et si quelqu'un apporte une autre doctrine, il ne faut pas le recevoir dans sa maison, ne pas saluer en lui un frère dans la foi (2 Jean 10.11).
La Parole de Dieu et les sacrements sont le grand trésor confié à l'Eglise. Elle doit y veiller jalousement et le préserver de tout ce qui pourrait l'altérer et le dénaturer. Il lui est donc demandé de prêcher la vérité et en même temps de dénoncer toute erreur ou fausse doctrine. Au besoin, elle doit exclure les faux docteurs de son sein, s'ils ne se repentent pas de leurs erreurs, comme il lui est demandé non pas de ne n'avoir aucun contact avec les Eglises qui propagent de fausses doctrines, mais de ne pas avoir de communion avec elles. On appelle cela la communion ecclésiale ou encore communion de chaire et d'autel. Elle n'est possible que là où deux Eglises confessent la même doctrine et où leur pratique est conforme à cet enseignement.
Par contre, il n'est pas nécessaire qu'elles aient les mêmes usages ou cérémonies. La Confession d'Augsbourg dit à ce sujet:
"Pour que soit assurée l'unité véritable de l'Eglise chrétienne, il suffit d'un accord unanime dans la prédication de l'Evangile et l'administration des sacrements conformément à la Parole de Dieu. L'unité véritable de l'Eglise chrétienne n'exige pas qu'on observe partout des cérémonies uniformes instituées par les hommes, comme le dit saint Paul, Ephésiens 4: 'Un seul corps, un seul esprit, comme vous avez été appelés à une seule espérance par votre vocation; un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême'" (Article VII).
Toute communion ecclésiale en l'absence d'unité doctrinale est de l'unionisme ou de l'oecuménisme. Il est bon et nécessaire que l'Eglise luthérienne témoigne autour d'elle, qu'elle professe ses convictions et les fasse connaître. Pour cela, il faut côtoyer les autres Eglises et fréquenter, rencontrer ses représentants pour dialoguer avec eux et, si possible, découvrir ou réaliser l'unité doctrinale. Mais tant que celle-ci n'a pas été constatée, toute communion ecclésiale serait une compromission avec l'erreur, une façon de pactiser avec elle, de dire qu'en fin de compte les divergences doctrinales qui caractérisent la chrétienté ne sont pas si importantes que cela et qu'on peut légitimement les ignorer. Ce n'est pas ce qui s'appelle confesser la vérité.
Il existe différents types de gouvernement de l'Eglise. Tout d'abord le type épiscopalien selon lequel le Christ a confié le gouvernement de son Eglise aux apôtres dont les successeurs sont les évêques. Détenteurs du ministère, ceux-ci dirigent l'Eglise en la dotant des pasteurs, docteurs, évangélistes et missionnaires dont elle a besoin. Le peuple des fidèles n'a pas de responsabilité réelle en matière de doctrine, de discipline ou de gouvernement. C'est le système qui prévaut dans l'Eglise catholique, l'Eglise anglicane, les Eglises épiscopaliennes et certaines Eglises luthériennes. Dans l'Eglise catholique, ce système fonctionne sous la souveraineté du pape, qui est considéré comme le successeur de Pierre, le prince des apôtres et le vicaire du Christ. Entouré du collège des évêques, mais aussi indépendamment d'eux, il exerce une primauté dans l'Eglise et est doté du charisme de l'infaillibilité quand il s'exprime en chef de l'Eglise et promulgue un dogme ex cathedra.
Le système presbytérien confie l'autorité dans l'Eglise et son gouvernement au conseil des presbytres, composé du pasteur et des anciens. L'autorité de ce collège lui vient non de l'Eglise locale, mais du Christ lui-même. Enfin, le système congrégationaliste affirme l'autonomie de la paroisse et la participation de tous les fidèles à son gouvernement. L'assemblée synodale est conçue comme un simple corps consultatif qui ne peut rien imposer aux Eglises locales, si ce n'est la fidélité à l'enseignement et à la pratique reconnus scripturaires.
La doctrine des deux règnes:
Bien des Eglises luthériennes vivent sous un régime non laïc et entretiennent des liens étroits avec l'Etat (Allemagne, Scandinavie, Finlande et, en France, l'Alsace et une partie de la Lorraine). Cela signifie que l'Etat leur reconnaît le statut d'Eglise officielle. Dans ces pays, elle est un organisme public: ses bâtiments sont construits et entretenus et ses pasteurs salariés avec les deniers publics. C'est là une anomalie, une aberration de l'histoire de l'Eglise résultant de l'ancien principe selon lequel un pays adhérait d'office à la religion de son prince: "Cujus regio, ejus religio". Cette situation qu'on retrouve d'ailleurs encore dans d'autres Eglises n'est pas biblique et ne reflète pas ce qu'on appelle dans le luthéranisme la doctrine des deux règnes.
Aux termes de cette doctrine, Dieu exerce un double règne. Le règne de puissance en vertu duquel tout lui appartient, par lequel il gouverne l'univers tout entier et fait concourir toutes choses à l'accomplissement de son dessein (Psaume 46; 50:9-12; 102:25-27; Esaïe 44-47; Matthieu 28:18). C'est le règne dans lequel le Seigneur déverse sur ses créatures toutes ses bénédictions matérielles. Il fait se succéder les saisons, fait alterner la pluie et le beau temps, bénit et multiplie la semence répandue dans les champs pour qu'elle nourrisse hommes et animaux. Il donne aux hommes l'intelligence qui leur permet d'aller de découvertes en découvertes, toutes utiles et bénéfiques pour guérir les maladies, faciliter le travail des hommes et leur procurer de meilleurs conditions de vie. Il veut en particulier que règnent l'ordre, l'équité et la justice, que soient secourus les pauvres et les faibles, protégés ceux qui font le bien et châtiés les malfaiteurs. Luther appelait cela la main gauche de Dieu. Pour exercer, il a établi en particulier des magistrats et des gouvernements qui ont pour mission de prendre la défense de ceux qui s'acquittent fidèlement de leurs devoirs, de châtier les malfaiteurs et de veiller à la justice, l'équité, la paix, la liberté et les droits légitimes de chaque humain. C'est pourquoi il est nécessaire que "toute personne soit soumise aux autorités supérieures, car il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu, et les autorités qui existent ont été instituées de Dieu. C'est pourquoi celui qui s'oppose à l'autorité résiste à l'ordre que Dieu a établi, et ceux qui résistent attireront une condamnation sur eux-mêmes" (Romains 13:1.2). Cf. encore Romains 13:3-7; 1 Timothée 2:2; 1 Pierre 2:13.14. Pour accomplir leurs tâches, les autorités édictent des lois et veillent à leur application. Dieu se sert d'elles, quel que soit le régime politique particulier dans le cadre duquel elles agissent, pour protéger l'homme dans sa vie, son honneur et ses biens. Elles n'ont de pouvoir que sur la personne physique des hommes et sur leur façon de se comporter dans la société.
Puis il existe cet autre règne que Dieu exerce par la prédication de l'Evangile. Règne intérieur caractérisé par la grâce, par lequel le Seigneur gagne les coeurs avec les promesses de son pardon et de son salut et vient habiter en eux. Puisque c'est l'Eglise chrétienne qui a été chargée de prêcher l'Evangile, c'est à travers elle qu'il l'exerce. Celle-ci assume donc sur les âmes et les consciences le pouvoir spirituel de Dieu. Par contre, l'Eglise n'a aucun pouvoir sur les corps. Et tandis que l'Etat gouverne par la loi naturelle inscrite dans les coeurs et promulguée dans les codes civil et pénal, l'Eglise gouverne par les promesses de l'Evangile et a pour seule mission d'instruire les hommes par la Parole de Dieu et de les inviter au salut par la foi en Jésus-Christ. Le Réformateur appelait cela la main droite de Dieu. L'Eglise luthérienne a toujours insisté sur le fait que ces deux règnes doivent être distingués avec soin. Toute ingérence de l'Etat dans les affaires de l'Eglise, et inversement, doit être proscrite comme contraire à la volonté du Seigneur.
Questions de révision et exercices:
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1) Enumérez les principales particularités de l'Eglise chrétienne.
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2) Que signifie la triple affirmation suivante: L'Eglise chrétienne est sainte, infaillible et apostolique?
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3) Pourquoi l'Eglise chrétienne est-elle à la fois invisible et visible?
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4) Qu'est-ce qu'on appelle les notes ou marques de l'Eglise?
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5) Quand deux Eglises différentes peuvent-elles, selon l'Ecriture Sainte, pratiquer la communion ecclésiale?
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6) Définissez la doctrine luthérienne des deux règnes.
2. LE MINISTERE
Le sacerdoce universel des croyants:
Dans Lévitique 8, il est demandé à Moïse de consacrer Aaron et ses fils comme prêtres ou sacrificateurs. Ils devaient tenir lieu d'intermédiaires entre Dieu et le peuple. Chaque jour ils présentaient des sacrifices pour le pardon des péchés du peuple, et le grand jour des expiations, le souverain sacrificateur pénétrait dans le Saint des saints avec le sang des victimes, pour le pardon de ses péchés et ceux du peuple (Lévitique 16).
Cette fonction n'existe plus, car ces sacrifices étaient la préfiguration de celui que Jésus devait apporter en son temps. Le Christ seul, qui nous a rachetés par son sang, est notre prêtre (Hébreux 2:17; 9:12; 10:14). Il a obtenu pour les pécheurs un libre accès au trône de la grâce, si bien qu'il est, comme la Bible ne cesse de le répéter, le seul intermédiaire ou médiateur entre le Seigneur et eux (1 Timothée 2:5; Hébreux 8:6; 9:15; 12:24).
L'Ecriture Sainte va encore plus loin. Elle affirme que tous les croyants sont des sacrificateurs devant Dieu: "Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle, un saint sacerdoce, afin d'offrir des victimes spirituelles agréables à Dieu, par Jésus-Christ... Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière" (1 Pierre 2:5.9). Jésus a fait de nous "un royaume et des sacrificateurs pour notre Dieu" (Apocalypse 1:5.6; 5:10). Les croyants sont ainsi les prêtres de la nouvelle alliance. Il sont invités à apporter à Dieu les sacrifices de leur obéissance, les offrandes de leurs prières et l'hommage de leur adoration (Romains 6:13; 12:1; 15:16; Psaume 51:19; 1 Corinthiens 3:21-23; Hébreux 13:16).
Jésus-Christ a même confié à son Eglise et donc à chacun de ses membres ce qu'on appelle le pouvoir des clés, qui consiste à pardonner les péchés aux pécheurs pénitents et à les retenir aux impénitents aussi longtemps qu'ils ne s'en repentent pas (Martin Luther, Petit Catéchisme). Il a donné les "clés du Royaume" à l'apôtre Pierre (Matthieu 16:19), puis à tous les disciples en leur disant: "Recevez le Saint-Esprit. Ceux à qui vous pardonnerez les péchés, ils leur seront pardonnés, et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus" (Jean 20:22.23). Il a aussi affirmé qu'en liant et déliant les péchés, l'Eglise agissait en son nom (Matthieu 18:17-20).
Tous les croyants ont un libre accès au trône de la grâce, apportent à Dieu leurs sacrifices et leurs offrandes, sont ses témoins dans le monde, publient ses hauts faits, annoncent le pardon du Christ à ceux qui le cherchent, consolent, reprennent, exhortent et encouragent. Il s'entraident sur le chemin de la foi et prient les uns pour les autres, ainsi que pour le monde. Cependant, tous ne sont pas appelés à prêcher, à baptiser et à distribuer la Sainte Cène.
Le ministère de la Parole et des sacrements:
Le monde a besoin de la Parole de Dieu et des sacrements pour découvrir le Christ et trouver par la foi en son nom le pardon et le salut, et l'Eglise en a besoin pour s'édifier dans la foi et la piété. "Comment invoqueront-ils celui en qui ils n'ont pas cru? Et comment croiront-ils en celui dont ils n'ont pas entendu parler? Et comment en entendront-ils parler, s'il n'y a personne qui prêche? Et comment y aura-t-il des prédicateurs, s'ils ne sont pas envoyés?... La foi vient de ce qu'on entend, et ce qu'on entend vient de la parole de Christ" (Romains 10:14.15.17). Voilà pourquoi le Seigneur a institué le ministère de la Parole et des sacrements et pourquoi il le confie à certains hommes dans l'Eglise.
Jésus dit aux apôtres: "Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit" (Matthieu 28:19). "Prêchez l'Evangile à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira point sera condamné" (Marc 16:15.16). L'apôtre Paul déclare que pour croire il faut entendre l'Evangile. Pour cela, il faut qu'il soit prêché, et pour qu'il le soit, il faut que des hommes soient envoyés (Romains 10:14.15). Il reconnaît aussi que les prédicateurs de l'Evangile comme lui sont des "ambassadeurs de Dieu" qui exercent le ministère de la réconciliation (2 Corinthiens 5:19.20).
Il y avait dans l'Eglise de l'époque des apôtres. Ils étaient au nombre de douze, auxquels vint s'ajouter Paul. Directement appelés par le Christ, ils avaient été les témoins de tout ce qu'il avait dit et fait, notamment de sa résurrection, et furent chargés d'évangéliser le monde de l'époque et de fonder l'Eglise (Matthieu 28:18-20; Marc 16:15.16; Actes 1:15-26; 9:1 ss.; 26:9-18).
Il y avait aussi des prophètes, autres que ceux de l'ancienne alliance, mais qui, au moins par moments, avaient comme eux le don de prédire l'avenir et de prêcher la Parole de Dieu (Actes 11:28; 21:10.11; 1 Corinthiens 14:1.29; 1 Thessaloniciens 5:20.21), ainsi que des évangélistes (Actes 21:8; 2 Timothée 4:5; Ephésiens 4:11).
Par ailleurs, les apôtres s'entourèrent d'aides et de collaborateurs, appelés anciens ou évêques, docteurs et pasteurs (1 Timothée 3:1-7; Tite 1:5-9; Actes 20:17-38). Ces hommes étaient chargés d'exercer le ministère dans les Eglises locales et secondés, à leur tour, par des diacres (Actes 6:1-8; Philippiens 1:1; 1 Timothée 3:8-13).
Tous ces prédicateurs étaient établis dans leur ministère par le Christ ou Dieu: "Christ a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs, pour le perfectionnement des saints, en vue de l'oeuvre du ministère et de l'édification du corps de Christ" (Ephésiens 4:11). "Dieu a établi dans l'Eglise premièrement des apôtres, secondement des prophètes, troisièmement des docteurs..." (1 Corinthiens 12:28).
Les apôtres avaient été directement choisis et envoyés dans le monde par Jésus. Les quelques prophètes qui agissaient dans l'Eglise de l'époque ont sans doute été reconnus comme tels en raison des dons qui étaient les leurs. Quant aux anciens ou évêques, ils furent mis en place dans l'Eglise par l'Eglise elle-même, sur recommandation des apôtres, ou inversement par les apôtres ou leurs collaborateurs avec le consentement de l'Eglise (Actes 14:23; Tite 1:5). Cf. aussi le récit de l'élection des diacres de Jérusalem, Actes 6:1-8. Mais tous ceux parmi eux qui prêchaient la Parole étaient investis du ministère institué par le Christ. Paul le reconnaît, quand il demande aux anciens d'Ephèse de prendre garde au troupeau sur lequel le Saint-Esprit les a établis évêques (Actes 20:28). L'Eglise luthérienne enseigne donc que personne ne doit exercer de ministère dans l'Eglise, s'il n'a pas été dûment appelé à cela (Confession d'Augsbourg, Article XIV).
Pour être aussi efficace que possible dans l'évangélisation du monde et l'édification de ses fidèles, et pour répondre à tous ses besoins, l'Eglise a tout intérêt à diversifier ses ministères et à répartir les tâches, comme elle l'avait fait à l'époque des apôtres.
L'Eglise catholique enseigne qu'il existe plusieurs ministères institués par le Christ et a instauré parmi eux une hiérarchie dite d'origine divine. Elle distingue notamment entre évêque, prêtre et diacre. Seul l'évêque est dit compétent pour consacrer d'autres prêtres. L'Eglise luthérienne enseigne, au contraire, qu'il n'y a qu'un ministère divinement institué dans l'Eglise, celui qui consiste à annoncer l'Evangile et à administrer les sacrements (Confession d'Augsbourg, Article V). Ce sont la tradition et des raisons pratiques qui font que les responsables nommés pour diriger l'Eglise s'appellent tantôt évêques, tantôt présidents et tantôt inspecteurs ecclésiastiques, et qu'il sont nommés à vie ou au contraire pour un mandat limité dans le temps. La distinction faite entre le ministère pastoral et celui de l'évêque est une disposition humaine qui peut être abolie. Il n'y a pas de hiérarchie divinement instituée, et Jésus-Christ est par ailleurs le seul chef de l'Eglise.
Quant à la succession apostolique, qui est dite avoir lieu par une imposition des mains remontant jusqu'aux apôtres qui, eux, l'auraient reçue du Christ, il est des Eglises qui la considèrent comme vitale et indispensable. Les Luthériens estiment qu'elle ne se fonde pas sur une ordonnance divine, qu'elle est historiquement fort douteuse, qu'elle ne fait pas partie de l'essence de l'Eglise et que la vraie succession apostolique de celle-ci consiste dans la fidélité à l'enseignement des apôtres.
La vocation au ministère pastoral a lieu dans l'Eglise luthérienne par l'Eglise locale, donc l'assemblée des fidèles, en consultation avec les responsables du Synode. Quant à l'ordination au ministère et à l'installation dans le champ de travail, elles sont de la compétence des ministres qui imposent les mains à leur frère et invoquent sur lui les bénédictions divines.
L'ordination qui n'est pas d'institution divine, mais que l'Eglise apostolique a pratiquée en l'empruntant au judaïsme de l'époque, est un acte liturgique qui revêt les significations suivantes: 1) Il est l'attestation officielle que le candidat a été reconnu par les instances de l'Eglise comme qualifié pour le ministère pastoral. 2) Il atteste qu'il a été légitimement et régulièrement appelé au ministère. 3) Il est le lieu où le candidat promet solennellement qu'il exercera son ministère dans la fidélité à la Parole de Dieu et à l'enseignement des Confessions luthériennes. 4) Il consiste à imposer les mains au nouveau pasteur, en invoquant le Seigneur en sa faveur et en implorant sur lui ses bénédictions.
Il est des Eglises luthériennes de type épiscopalien qui assimilent l'ordination, en tant qu'acte accompli par le clergé, à l'établissement dans le ministère, définitif et illimité dans le temps, et définissent l'installation, qui est affaire à la fois du clergé et de l'Eglise, comme l'acte identifiant, à un moment donné de sa carrière, le champ d'action d'un pasteur. D'autres Eglises luthériennes, dont la nôtre, n'ordonnent un candidat au ministère que lorsqu'il a reçu sa première vocation, et font coïncider l'ordination avec l'installation dans la première paroisse, confessant ainsi que c'est en devenant ministre d'une Eglise locale qu'on devient ministre de l'Eglise universelle.
Questions de révision et exercices:
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1) Définissez le sacerdoce universel des croyants.
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2) Définissez le ministère de la Parole et des sacrements.
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3) Pourquoi, si tous les croyants sont des prêtres, ne sont-ils pas tous habilités à prêcher la Parole de Dieu et à administrer les sacrements? Justifiez votre réponse par des textes bibliques.
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4) Enumérez et définissez quelques ministères dans l'Eglise apostolique.
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5) Quels sont la raison d'être de la vocation au ministère et le sens de l'ordination?
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6) En quoi la doctrine catholique des ministères est-elle différente de la doctrine luthérienne?
La place et le rôle du chrétien dans l'Eglise:
La Bible enseigne que la vie du chrétien est un service permanent qu'il rend à Dieu dans l'Eglise et dans le monde. Dans l'Eglise en particulier, tous les croyants sont appelés à se mettre au service les uns des autres, sans aspirer à des positions d'honneur (Luc 22:26.27). D'autre part, le Nouveau Testament présente l'Eglise chrétienne, universelle et locale, comme le corps du Christ dans lequel tous les membres sont solidaires les uns des autres (Romains 12:4-8; 1 Corinthiens 12:12-31). Il y occupent une place et y jouent un rôle qui sont tributaires des dons reçus du Seigneur. L'Eglise ne peut vraiment s'épanouir que si chaque croyant en est une pierre et un membre vivant, demandant à Dieu de sanctifier les dons qu'il lui a plu de lui accorder et les utilisant à sa gloire et pour le bien-être de son peuple. C'est la vision organique de l'Eglise. L'étude de cette question relève de ce qu'on appelle en anglais le "stewardship". Cf. le chapitre sur les dons dans l'Eglise, leur pluralité, leur diversité, leur complémentarité, leur unité, leur interdépendance et la souveraineteé de Dieu dans leur attribution, in W. Kreiss, Pierres vivantes et gérants fidèles, C.E.T., 1992.
La mission de l'Eglise:
Etant dans le monde, mais pas du monde (Jean 17:6-19), l'Eglise chrétienne a une double tâche. Elle doit baptiser et enseigner, instruire dans la foi ses enfants et ses adultes pour qu'ils deviennent des chrétiens engagés et fidèles. Mais elle doit aussi faire de la mission. Jésus-Christ lui en a donné l'ordre explicite. Cette obligation résulte du fait que Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu'il se repente et vive, et d'autre part de ce que le Christ est mort pour tous les hommes et les a tous rachetés. Aussi sont-ils tous appelés à le connaître. La repentance et le pardon des péchés doivent être "prêchés en son nom à toutes les nations" (Luc 24:47). L'Eglise chrétienne doit tenter de s'implanter partout par la prédication de l'Evangile et l'administration des sacrements. Et partout où elle s'est implantée, elle doit s'efforcer de devenir dans les meilleurs délais indépendante, autonome et responsable de son expansion. Deux tiers du monde n'ont pas encore été vraiment évangélisés. D'autre part, les pays traditionnellement chrétiens ont cessé de l'être et ont plus que jamais besoin de l'Evangile.
La mission de l'Eglise ne consiste pas dans la transformation du monde. Le Christ ne propose pas au monde un programme social destiné à surmonter les injustices, réaliser l'équité, le bien-être et la paix. Il ne plaide pas pour l'instauration dans les peuples de valeurs morales et d'un ordre meilleurs. L'action de l'Eglise ne se situe pas au niveau social ou moral. Son devoir n'est pas de changer le monde, mais de l'appeler à la repentance. "Sauvez-vous de cette génération perverse", prêchaient les apôtres (Actes 2:40). Les chrétiens savent qu'avant le retour de Jésus-Christ il n'y aura pas chez les hommes de société correspondant à la volonté de Dieu. D'autre part, le tableau que Jésus et les apôtres brossent du monde dans les derniers temps ne laisse pas espérer d'amélioration et ne nous autorise pas à croire que l'Eglise pourra l'influencer par les valeurs qu'elle prône.
L'Eglise chrétienne n'a pas à influencer le monde, mais à le gagner pour le Christ. Ce n'est que de cette façon qu'il peut changer. Il faut aux hommes un autre coeur pour devenir meilleurs, et ce coeur, seul le Saint-Esprit peut le leur donner par la prédication de l'Evangile qui régénère, renouvelle et sanctifie. Lorsque l'Eglise chrétienne est solidement implantée dans un pays, elle influence la société, la marque de son empreinte. C'est ainsi que naît une culture chrétienne. L'implantation d'une telle culture cependant n'est pas la mission propre de l'Eglise. Elle est par contre un beau fruit de la proclamation de l'Evangile du salut. Il ne s'agit donc pas d'inviter les hommes à penser et agir chrétiennement, tout en les laissant dans leur incrédulité, mais de prêcher la repentance et la foi en Jésus-Christ, de faire d'eux des chrétiens qui ensuite, tout naturellement, penseront et agiront en chrétiens.
L'Eglise chrétienne doit aussi faire de la mission, parce que selon l'enseignement de la Bible il n'y a de salut qu'en Jésus-Christ et qu'aucun autre nom n'a été donné aux hommes par lequel ils puissent être sauvés (Actes 4:12). Il est seul "le chemin, la vérité et la vie" et nul ne vient au Père que par lui (Jean 14:6). Le christianisme prétend être la seule religion vraie qui puisse sauver l'homme. Prétention inouïe qui soulève bien des protestations et que même beaucoup de théologiens et de chrétiens récusent. Il est de bon ton aujourd'hui de professer que Dieu peut se servir aussi d'autres religions pour sauver les hommes, que le Christ est caché aussi dans d'autres croyances, qu'on peut être sauvé par Jésus sans le connaître, en suivant les lumières dont on dispose. D'où le mot d'ordre: "Dialoguons avec les représentants des autres religions, mais n'essayons pas de les convertir!"
Ce n'est pas là du tout l'enseignement de la Bible. Les prophètes de l'ancienne alliance et les apôtres de l'alliance nouvelle n'ont en rien pactisé avec les dieux des nations ou célébré des cultes communs avec les païens (1 Rois 18; Actes 14:11-15; 19:27). L'Evangile cesse d'être source de vie, même pour l'Eglise, si elle n'a pas le courage de dire qu'il est la vérité chargée de conquérir le monde entier et de dissiper les ténèbres de l'erreur. Faire oeuvre sociale au nom du Christ, construire par amour pour Dieu et pour le prochain des écoles et des hôpitaux, soulager la souffrance dans le monde, exercer la miséricorde est une belle et noble façon de servir le Seigneur. Mais la mission proprement dite qui a été confiée à l'Eglise et qu'elle est absolument seule à pouvoir mener à bien, est l'annonce de la Parole de Dieu et l'appel à la repentance et la conversion.
Beaucoup d'Eglises luthériennes, surtout là où elles sont Eglises d'Etat, sont multitudinistes. D'autres Eglises le sont aussi, sans pour autant être Eglises d'Etat. Elles considèrent comme membres tous ceux qui ont un jour reçu le Baptême, qu'ils professent ou non la foi chrétienne. Beaucoup d'entre eux ne sont chrétiens que de nom. L'Eglise évangélique luthérienne est par définition une Eglise de professants. Non qu'elle refuse le Baptême aux enfants et le réserve à ceux qui le demandent après une expérience de la conversion, comme le font les Evangéliques, mais pour y être considéré comme un chrétien véritable, il faut porter les marques visibles de la foi qui sont l'amour de la Parole et des sacrements et une vie chrétienne. Un chrétien évangélique luthérien ne peut pas dire: "Je crois, mais je ne pratique pas", car il sait qu'il n'y a pas de foi véritable sans l'écoute de l'Evangile, la communion au corps et au sang du Christ, la prière et l'adoration. Si l'Eglise chrétienne est le corps du Christ, on en devient par la foi un membre vivant. La notion de membre mort est contradictoire. Quand un sarment est mort, c'est qu'il n'est plus relié au cep, même s'il n'en a pas été physiquement retranché. Un membre mort n'est plus relié à Jésus-Christ. Il ne fait plus partie de son corps qu'est Eglise.
Questions de révision et exercices:
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1) Analysez 1 Corinthiens 12:12-31 et tirez-en des leçons pour chaque chrétien.
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2) Quelle est la différence entre évangéliser et prêcher un Evangile social?
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3) Qu'est-ce qu'une Eglise d'Etat et que faut-il en penser?
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4) En quoi une Eglise multitudiniste est-elle infidèle à sa mission?
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Par lutherien le 26 Novembre 2009 à 16:39
LES MOYENS DE GRACE: PAROLE DE DIEU ET SACREMENTS
"C'est par ce moyen et non pas d'une autre façon, c'est par la Parole sainte, soit qu'on l'entende prêcher, soit qu'on la lise, et par l'usage des sacrements administrés conformément à la Parole, que Dieu veut appeler tous les fidèles à la félicité éternelle, les attirer, les convertir, les régénérer et les sanctifier... C'est de cette façon que le Saint-Esprit, qui opère tout cela, pénètre dans le coeur" (Formule de Concorde, Solida Declaratio, II, 51.54).
1. QU'EST-CE QU'UN MOYEN DE GRACE?
La Bible nous invite à distinguer entre le salut tel qu'il a été acquis en son temps par Jésus-Christ et le salut tel qu'il est appliqué à tous ceux qui entendent l'Evangile et le reçoivent avec foi. On appelle cela distinguer entre le salut objectif et le salut subjectif. La christologie enseigne comment, en la personne de son Fils, Dieu a racheté le monde et l'a réconcilié avec lui-même, expiant ses péchés et lui acquérant le pardon et la vie éternelle. La doctrine du salut a montré tout ce qu'il fait dans le temps pour appliquer au pécheur le salut acquis: il l'appelle, le convertit, le justifie, le sanctifie et le maintient dans la foi jusqu'à la victoire finale.
Le présent chapitre va nous montrer quels sont les moyens qu'il utilise pour cela. Il n'y a à vrai dire qu'un moyen de grâce ou de salut, c'est l'Evangile dont l'apôtre dit: "Je n'ai point honte de l'Evangile. C'est la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec, parce qu'en lui est révélée la justice de Dieu par la foi et pour la foi, selon qu'il est écrit: Le juste vivra par la foi" (Romains 1:16.17). L'Evangile est moyen de grâce ou de salut parce qu'il révèle la grâce de Dieu en Christ, nous dit ce que le Seigneur a fait pour racheter le monde. Or cet Evangile avec ses promesses parvient à nous de plusieurs façons: sous forme de Parole de Dieu que nous pouvons lire (Bible) ou entendre (prédication), et dans les sacrements que sont le Baptême et la Sainte Cène. A la suite de saint Augustin, on dit en théologie que les sacrements sont Parole de Dieu visible: Dieu y énonce les mêmes promesses et y offre les mêmes bienfaits, le pardon et le salut, mais d'une façon visible et non plus seulement audible, car ses promesses sont liées à l'eau du Baptême, au pain et au vin de la Cène.
Les moyens de grâce sont de la sorte des moyens institués par le Christ pour offrir et appliquer aux hommes la grâce, le pardon et la vie éternelle acquis par lui. Par l'offre même de ces bienfaits, ils font naître et préservent dans les coeurs la foi qui sauve.
Jésus dit aux disciples d'Emmas: "La repentance et le pardon des péchés sont prêchés en son nom à toutes les nations" (Luc 24:47). L'apôtre Paul écrit: "C'est par lui que le pardon des péchés est annoncé, et quiconque croit en lui est justifié par lui de toutes les choses dont vous ne pouviez être justifiés par la loi de Moïse" (Actes 13:38.39). Voilà pour la prédication de l'Evangile. Mais le pardon et le salut sont aussi offerts et promis dans le Baptême et la Sainte Cène. Avant de monter au ciel, le Christ dit aux disciples: "Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé" (Marc 16:16), et Pierre dit à la foule, le jour de la Pentecôte: "Repentez-vous et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour le pardon des péchés" (Actes 2:38). Quant à la Cène, Jésus dit en tendant la coupe aux disciples: "Ceci est mon sang, le sang de l'alliance, qui est répandu pour plusieurs en rémission des péchés" (Matthieu 26:28).
Mais ce n'est pas tout: En offrant le pardon et le salut, les moyens de grâce font naître la foi dans les coeurs et l'y affermissent. "La foi vient de ce qu'on entend, et ce qu'on entend vient de la parole de Christ", dit l'apôtre (Romains 10:17). Pierre précise à ses lecteurs qu'ils ont été "régénérés non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu" (1 Pierre 1:23.24). L'Evangile est donc semblable à une semence qui germe et produit la vie. Jacques de même dit de Dieu: "Il nous a engendrés selon sa volonté, par la parole de la vérité" (Jacques 1:18). Parlant du Baptême, Jésus affirme que "si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu" (Jean 3:5). Saint Paul l'appelle "le bain de la régénération et du renouvellement du Saint-Esprit" (Tite 3:5).
Nous reviendrons là-dessus dans le détail. Pour l'instant, il suffit de constater que Dieu utilise des moyens précis pour offrir au monde les bienfaits que le Christ lui a acquis quand il était sur terre. Il s'agit de l'Evangile et des sacrements. C'est par eux qu'il accomplit sa volonté de salut, que le Saint-Esprit agit dans les coeurs, appelle au salut, fait naître la foi, la fortifie et donne au croyant la volonté et la force de marcher chrétiennement et de rester fidèle jusqu'à la mort. L'Eglise luthérienne insiste beaucoup sur ce point, car il existe de nombreuses communautés qui enseignent que le Saint-Esprit agit immédiatement dans les coeurs, qu'il ne se sert pas pour cela de la Parole de Dieu et des sacrements. On appelle cela l'illuminisme théologique.
Questions de révision et exercices:
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1) Qu'est-ce qu'un moyen de grâce?
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2) Y a-t-il contradiction quand on dit que l'homme est sauvé par la foi et qu'on affirme en même temps qu'il l'est par les moyens de grâce?
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3) En quoi le rôle de la foi et celui des moyens de grâce sont-ils différents?
La Parole de Dieu:
Dieu utilise sa Parole pour faire son oeuvre et conduire les hommes au salut. Ceux-ci sont pécheurs et il faut les délivrer de leur mal. Voilà pourquoi la Parole de Dieu est Loi et Evangile. La Loi a pour fonction de révéler à l'homme son péché et sa misère, pour qu'il en prenne conscience, et de l'appeler à la repentance: "Nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu... C'est par la Loi que vient la connaissance du péché" (Romains 3:19.20). Ailleurs, l'apôtre Paul affirme qu'elle "produit la colère" (Romains 4:15), qu'il n'aurait pas "connu la convoitise, si la Loi n'eût dit: Tu ne convoiteras point" (Romains 7:7).
L'Evangile, au contraire, annonce la miséricorde de Dieu et l'oeuvre que Jésus a accomplie, et promet le pardon et le salut à ceux qui croient en lui. Il est "une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit" (Romains 1:17). "La prédication de la croix est une folie pour ceux qui périssent. Mais pour nous qui sommes sauvés, elle est une puissance de Dieu" (1 Corinthiens 1:18). La lettre, c'est-à-dire la Loi, tue, mais l'Esprit qui agit dans l'Evangile vivifie (2 Corinthiens 3:6; Jean 6:63.68).
Il existe ainsi une différence fondamentale entre la Loi et l'Evangile. Le mot "Loi" a plusieurs sens dans la Bible. Il peut désigner l'ensemble de la Parole de Dieu ou bien le Pentateuque (livres de Moïse) ou le Décalogue, ou encore la loi civile et politique. Dans ce chapitre où elle est opposée à l'Evangile, la Loi désigne tout discours par lequel Dieu exige que sa sainte volonté soit faite, condamne le péché, menace le transgresseur de sa colère et du châtiment, et lui demande de se repentir et de se détourner du mal. L'Evangile, de son côté, est "bonne nouvelle". Il n'exige rien et ne menace jamais, mais révèle l'amour dont Dieu aime le pécheur et le pardon qu'il lui offre en Jésus-Christ. La Loi et l'Evangile sont révélés dans la Bible. Mais tandis que l'Evangile n'est révélé que là, dans la Parole de Dieu, il existe aussi une connaissance naturelle de la Loi, incomplète et corrompue, mais réelle tout de même, car elle est inscrite dans la conscience de l'homme. L'apôtre Paul écrit en effet: "Quand les païens qui n'ont point la loi font naturellement ce que prescrit la loi, ils sont, eux qui n'ont point la loi, une loi pour eux-mêmes. Ils montrent que l'oeuvre de la loi est écrite dans leur coeur, leur conscience en rendant témoignage et leurs pensées s'accusant et se défendant tour à tour" (Romains 2:14.15).
L'Eglise luthérienne définit de la façon suivante la différence entre la Loi et l'Evangile:
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1) La Loi nous dit ce que nous devons faire; l'Evangile, par contre, nous dit ce que Dieu a fait et continue de faire pour notre salut.
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2) La Loi nous montre notre péché et la colère de Dieu; l'Evangile, par contre, nous révèle notre Sauveur et la grâce de Dieu.
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3) La Loi exige, menace et condamne; l'Evangile, par contre, nous promet, nous donne et nous garantit la rémission des péchés, la vie et le salut.
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4) La Loi doit être prêchée à tous et spécialement aux pécheurs impénitents; l'Evangile, par contre, doit être prêché aux pécheurs repentants (Explication du Petit Catéchisme de M. Luther, p. 45).
Les sacrements:
La chrétienté est divisée sur la question de savoir combien il y a de sacrements. L'Eglise catholique en compte sept, le Baptême, la confirmation, la Sainte Cène, la pénitence appelée de nos jours sacrement de la réconciliation, l'extrême-onction ou sacrement des malades, l'ordre et le mariage, tandis que le protestantisme n'en connaît que deux, le Baptême et la Sainte Cène. Le mot ne figurant pas dans la Bible, tout est donc une question de définition. L'Eglise luthérienne définit le sacrement comme un acte institué par Jésus-Christ lui-même, dans lequel il offre sous des éléments visibles sa grâce salutaire, son pardon et son salut, confirme et scelle ces bienfaits aux croyants. Dans ce sens précis, il ne peut y avoir que deux sacrements.
On appelle "matière" du sacrement l'utilisation d'un élément visible et le geste accompli, soit l'application de l'eau dans le Baptême et la distribution et consommation du pain et du vin dans la Cène. On appelle au contraire "forme" du sacrement ce qui fait qu'un acte donné est un sacrement. Il s'agit de la Parole de Dieu, sans laquelle il n'y aurait pas de sacrement, de la promesse de l'Evangile liée à l'application de l'eau dans le Baptême, à la distribution et la consommation du pain et du vin dans la Cène.
Quant au but du sacrement, il consiste à offrir de façon individuelle, avec un support visible, et donc à sceller à celui qui le reçoit avec foi, les promesses qui sont celles de l'Evangile, le pardon des péchés et la vie éternelle. Les sacrements agissent de la même façon que l'Evangile. Ils sont efficaces comme moyens de grâce, et leur efficacité ne dépend ni de celui qui les administre ni de ceux qui les reçoivent. Elle se fonde sur les seules promesses de Dieu. Cependant leurs effets salutaires ne sont reçus que par la foi. L'offre du pardon est toujours valide de la part du Seigneur, quelles que soient les dispositions du bénéficiaire, mais n'est appropriée que par la foi.
Ce sont les pasteurs dûment appelés au ministère qui ont pour mission en temps normal de prêcher la Parole de Dieu et d'administrer les sacrements. Le Baptême toutefois peut et doit être administré par n'importe quel chrétien, quand il y a danger de mort, donc urgence.
Nous enseignons enfin que les sacrements sont nécessaires au salut, tout simplement parce que Jésus-Christ les a institués pour offrir aux hommes sa grâce et la vie éternelle. Un chrétien ne peut en aucune façon les mépriser ou ne pas recourir à eux, pas plus qu'il ne peut mépriser la prédication de l'Evangile. Cependant, la foi seule étant d'une nécessité absolue, on peut être sauvé même si on n'a pas eu la possibilité de recevoir le Baptême ou la Sainte Cène.
Questions de révision et exercices:
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1) Quelles sont les différences entre la Loi et l'Evangile?
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2) Donnez la définition luthérienne du sacrement.
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3) Que signifie la phrase: "Le sacrement est Parole visible"?
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4) Peut-on être sauvé sans le Baptême et sans la Sainte Cène? Justifiez votre réponse.
2. LE BAPTEME
"Le Baptême n'est pas une eau ordinaire, mais une eau administrée par suite d'un commandement de Dieu et unie à sa Parole... Le Baptême opère la rémission des péchés, il délivre de la mort et du diable et il donne le salut éternel à tous ceux qui croient, conformément aux paroles et aux promesses de Dieu" (Martin Luther, Petit Catéchisme).
L'institution et l'administration du Baptême:
Le Baptême a été institué par Jésus-Christ avant de remonter au ciel, quand il dit aux disciples: "Allez, faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit" (Matthieu 28:18-20). Ou encore: "Allez par tout le monde et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné" (Marc 16:15.16). En réalité, Jésus a repris un baptême qui existait déjà, celui de Jean-Baptiste dans le désert. Il avait entre-temps accompli le salut que ce sacrement est chargé d'offrir aux monde.
Le Baptême consiste en l'application d'eau au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Le mot vient d'un terme grec qui signifie laver, éventuellement, mais pas nécessairement, en plongeant dans l'eau. Ceux qui prétendent que le Baptême doit avoir lieu par immersion soutiennent généralement que le mot en question signifie plonger. C'est inexact, parce que la chose n'est pas prouvée. Le mot ne signifie rien d'autre que laver.
Il est fort possible que beaucoup de baptêmes administrés à l'époque aient eu lieu par immersion. Jean-Baptiste l'a sans doute fait (Marc 1:4-11), Philippe peut-être aussi quand il baptisa l'eunuque d'Ethiopie (Actes 8:36-39). Mais il paraît évident aussi qu'on ait baptisé par simple effusion de l'eau. Ce fut sans doute le cas le soir de la Pentecôte, quand trois mille personnes reçurent le Baptême (Actes 2:41), ou bien quand on baptisait des gens dans les maisons (Actes 9:17-19; 10:47.48; 16:33). D'autre part, si l'immersion symbolise bien le fait que par le Baptême le croyant meurt au péché et vit avec le Christ, l'effusion ou aspersion rappelle que le sang de notre Sauveur nous purifie. L'Eglise luthérienne a toujours affirmé que la façon dont l'eau était appliquée dans le sacrement importait finalement assez peu et que la validité du Baptême ne dépendait pas de la quantité d'eau utilisée.
Les bienfaits et l'efficacité du Baptême:
Le Baptême est selon le clair enseignement de la Bible porteur de toutes les grâces et de tous les bienfaits que Jésus-Christ a mérités et acquis au monde par sa mort rédemptrice et sa résurrection victorieuse. Dieu y offre tout d'abord le pardon des péchés. Au soir de la Pentecôte, Pierre dit à la foule: "Repentez-vous et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour le pardon de vos péchés, et vous recevrez le don du Saint-Esprit" (Actes 2:38). Certes, il faut se repentir, mais la promesse du pardon est directement liée au Baptême. Ananias dit à Saul de Tarse qui venait de rencontrer le Christ sur le chemin de Damas: "Lève-toi, sois baptisé et lavé de tes péchés" (Actes 22:16). D'autre part, l'apôtre Paul écrit: "Christ a aimé l'Eglise et s'est livré lui-même pour elle, afin de la sanctifier, après l'avoir purifiée par le bain d'eau dans la parole, afin de faire paraître devant lui cette Eglise glorieuse, sans tache ni ride ni rien de semblable, mais sainte et irrépréhensible" (Ephésiens 5:25). Enfin, il est dit que Dieu nous a sauvés "non à cause des oeuvres de justice que nous aurions faites, mais selon sa miséricorde, par le bain de la régénération et du renouvellement du Saint-Esprit, qu'il a répandu sur nous avec abondance par Jésus-Christ notre Sauveur, afin que justifiés par sa grâce, nous devenions en espérance héritiers de la vie éternelle" (Tite 3:4-7). Même chez Jean-Baptiste, le lien entre la repentance, le Baptême et le pardon est évident: "Jean parut, baptisant dans le désert et prêchant le baptême de la repentance pour la rémission des péchés" (Marc 1:4).
L'Ecriture Sainte enseigne aussi que Dieu offre dans le Baptême le salut. Jésus dit aux disciples que "celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé", et que "celui qui ne croira pas sera condamné" (Marc 16:16). Certes, il est question de deux choses dans ce texte, de la foi et du Baptême, et en temps normal le Baptême est administré à ceux qui ont entendu l'Evangile et l'ont accepté par la foi. Mais il est vrai aussi que le salut est promis à ceux qui reçoivent ce sacrement. Il est donc légitime de dire qu'il est un moyen de salut. Saint Paul, nous l'avons vu, dit aussi que Dieu nous a "sauvés... selon sa miséricorde, par le bain de la régénération et du renouvellement du Saint-Esprit" (Tite 3:4.5). Enfin, l'apôtre Pierre déclare que l'eau du déluge fut une "figure du baptême... qui maintenant vous sauve" (1 Pierre 3:21).
La Bible ajoute encore que le Baptême fait entrer en communion avec Dieu: "Faites de toutes les nations des disciples, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit" (Matthieu 28:19), et plus particulièrement avec Jésus-Christ: "Vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ. Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ" (Galates 3:26.27). Revêtir Christ, c'est entrer en communion avec lui et bénéficier ainsi de tout ce qu'il a fait pour le salut du monde. C'est notamment être revêtu de son pardon. Selon l'épître aux Romains, nous avons été "baptisés en Christ", "en sa mort", "afin que comme Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, de même nous aussi nous marchions en nouveauté de vie" (Romains 6:1-4). Le Baptême unit donc le croyant à la mort du Christ par laquelle il est racheté, tout en lui rappelant que le Christ vit d'une vie nouvelle et en l'invitant à faire de même.
Si le Baptême offre le pardon des péchés et le salut à celui qui le reçoit avec foi, c'est qu'il fait naître la foi dans le coeur et la fortifie. Il scelle les promesses qui y sont liées. Nous disons qu'il est moyen de régénération. Voilà pourquoi Jésus parle de "naître d'eau et d'Esprit" (Jean 3:5) et pourquoi saint Paul appelle le Baptême un "bain de la régénération et du renouvellement du Saint-Esprit" (Tite 3:5). Nous croyons que le Baptême régénère aussi bien le nourrisson que l'adulte. Il établit un lien invisible, inexplicable entre le nourrisson et le Christ, le revêt de son Sauveur et lui communique ses grâce. Ce sont des grâces que par la suite, à mesure qu'il grandira, il saisira par une foi consciente, mais elles lui appartiennent dès son Baptême. Quant à l'adulte qui demande à être baptisé en confessant le Christ, le sacrement lui scelle de façon visible ce que lui a déjà offert l'Evangile qu'il a entendu.
Questions de révision et exercices:
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1) Qu'est-ce que le Baptême?
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2) Commentez Tite 3:4-7.
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3) Qu'est-ce que le Baptême apporte de plus, s'il est vrai que Dieu offre déjà son pardon et son salut dans sa Parole?
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4) Est-ce que dans le Baptême le pardon et la vie éternelle sont toujours offerts par Dieu et toujours reçus par l'homme?
Le Baptême des enfants:
Le monde protestant est profondément divisé sur la question du Baptême des enfants. De nombreuses communautés évangéliques rejettent cette pratique, soutenant que le Baptême ne peut être légitimement administré que s'il est demandé par quelqu'un qui a passé par la repentance et la conversion. Dans ces milieux évangéliques, il n'a généralement qu'une valeur symbolique et est conçu comme une profession de foi et un engagement public à suivre le Christ. En d'autres termes, une telle théologie fait du Baptême un acte de l'homme. C'est le croyant qui agit, mais Dieu lui-même n'y fait rien.
Les explications précédentes espèrent avoir montré que ce n'est pas exact, que le Baptême est le lieu où Dieu dans sa miséricorde promet, offre et scelle au croyant le pardon des péchés et la vie éternelle. La Bible enseigne par ailleurs que l'homme est par nature corrompu, pécheur et condamné par la Loi. C'est ce qu'on appelle le péché originel. C'est à partir de ces deux enseignements de l'Ecriture qu'il faut se demander s'il convient ou non de baptiser les enfants. C'est à partir de là aussi que la réponse devient claire et trouve sa légitimité.
L'Eglise luthérienne ne peut pas expliquer ce qui se passe quand un nourrisson reçoit le sacrement, comment Dieu s'y prend pour lui communiquer ses grâces. Elle n'a pas non plus besoin de le faire. Si tout pouvait s'expliquer, il n'y aurait plus de mystères et la foi chrétienne ne serait plus une foi. L'Eglise luthérienne baptise les petits enfants pour les raisons suivantes:
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1) Jésus-Christ a ordonné de baptiser toutes les nations, sans en exclure les nourrissons (Matthieu 28:19).
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2) Des familles entières ont été baptisées par les apôtres (Actes 16:15.33.34; 1 Corinthiens 1:16). Celles-ci étaient composées d'adultes; parfois, quand elles étaient aisées, de serviteurs, et tout naturellement, semble-t-il, d'enfants. Rien ne nous autorise à croire que ces derniers aient été exclus du sacrement. Nous n'avons pas non plus à prouver qu'ils ont été baptisés; il revient plutôt aux adversaires du baptême des enfants de démontrer qu'ils ne l'ont pas été.
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3) Le baptême des enfants découle de la nécessité dans laquelle ils se trouvent, de leur corruption naturelle et de la volonté de Dieu de les faire participer à son salut. Nous n'avons aucune certitude qu'il le fasse, en ce qui le concerne, autrement que par le Baptême, et ce n'est pas la foi des parents qui les préserve du péché originel et les dispense de la régénération.
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4) Nous ne pouvons pas expliquer la foi des enfants. Nous ne pouvons pas non plus expliquer celle des adultes. Il est évident qu'ils ne peuvent pas comprendre l'Evangile ni saisir ses promesses avec leur entendement. Nous ne savons pas non plus comment un homme dans son sommeil ou dans un coma prolongé ou un malade mental peuvent rester unis à leur Sauveur, et nous n'essayons même pas de le faire. La question n'est pas de savoir ce que Dieu peut faire ou non. Il pourrait, bien sûr, s'il le voulait, sauver les petits enfants sans Baptême et donc sans régénération, mais nous n'avons aucune certitude qu'il veuille le faire de cette façon. Nous savons par contre qu'il offre le pardon et la vie éternelle dans le sacrement.
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5) On prétend souvent qu'il faut laisser les enfants grandir pour décider eux-mêmes s'ils veulent appartenir au Christ et à telle ou telle Eglise. Mais le péché est un mal, une maladie dangereuse et mortelle. Or quels sont les parents qui pourraient attendre que leurs enfants soient assez grands pour choisir leur médecin et faire le nécessaire pour guérir? Il est tout à fait évident que l'Eglise n'a pas seulement pour mission de baptiser, mais aussi d'instruire. Elle instruit donc les enfants après les avoir baptisés et leur fait découvrir leur Sauveur, comme elle exhorte aussi les parents à faire leurs devoirs de parents chrétiens. Il est tout à fait clair que le Baptême ne sert à rien si on se détourne du Christ. Ses grâces ne sont reçues que par la foi, et là où il n'y a pas de foi, le sacrement n'a aucune efficacité, même si l'offre de Dieu demeure valide.
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L'enfant qui reste dans l'alliance du Baptême vit continuellement sous la grâce de Dieu. En grandissant, il apprend à réfléchir comme un adulte, entend l'appel de Dieu, découvre le Christ et s'attache à lui par une foi consciente. Ce pas est nécessaire dans la vie du chrétien, mais une telle "conversion" n'empêche pas que cette personne ait vécu avec Dieu et sous sa grâce avant de le faire. Elle n'est au fond qu'une confirmation de son désir de rester sous la grâce de Dieu. Mais il est vrai aussi que beaucoup de baptisés meurent dans l'impénitence et l'incrédulité. La faute n'en incombe certainement pas au Baptême qu'ils ont reçu dans leur petite enfance. Ils ne sont pas pour autant oubliés de Dieu qui, dans sa grâce, les appelle continuellement. Les baptisés déchus de la grâce sont tout aussi perdus que ceux qui n'ont pas été baptisés. L'incrédulité condamne, avec ou sans Baptême. Pourtant, Dieu reste fidèle à son alliance, et lorsqu'un tel homme se repent et revient à lui, il n'a pas besoin d'être rebaptisé. Celui qui se repent retourne à la promesse du Baptême. "La repentance, disait Luther, n'est pas autre chose qu'un retour au Baptême, qu'une reprise de l'oeuvre commencée et abandonnée".
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6) Il existe de nombreux témoignages de l'Eglise ancienne attestant qu'elle baptisait les enfants. Les Pères de l'Eglise qui s'expriment à ce sujet sont unanimes. Il paraît donc évident que le baptême des enfants est une pratique remontant aux origines de l'Eglise.
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7) Nous baptisons les enfants dans l'obéissance à la Parole de Dieu, parce que le Baptême est le moyen choisi par lui pour leur offrir son pardon et la vie éternelle. Qu'en est-il des enfants des parents chrétiens qui meurent avant d'avoir pu recevoir le sacrement? La Bible ne nous oblige pas à affirmer qu'ils sont condamnés. Il n'existe pas non plus de lieu qui leur soit réservé dans l'éternité, comme les soi-disant "limbes des enfants" du dogme catholique. "Ce n'est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux qu'il se perde un seul de ces petits" (Matthieu 18:14). Porter son enfant au Baptême est un acte de confiance en la Parole de Dieu. Inversement, c'est le mépris des sacrements qui est condamnable et non le fait d'en avoir été privé. L'Eglise est appelée à consoler les parents dont les enfants sont morts avant le Baptême, en leur rappelant la miséricorde de Dieu. Mais elle n'est pas pour autant autorisée à différer l'administration du sacrement en encourageant les parents à attendre pour cela que leurs enfants aient atteint l'âge de raison.
La signification du Baptême dans la vie du chrétien:
Nous avons vu ce que Dieu fait dans le Baptême, ce qui se passe quand quelqu'un reçoit ce sacrement. Reste à voir ce qu'il signifie dans la vie quotidienne du croyant. Si la résurrection de Jésus-Christ est le oui de Dieu à l'oeuvre qu'il a accomplie sur la croix, le Baptême est le oui qu'il a prononcé une fois pour toutes sur son enfant. Il est l'acte par lequel il lui dit: "Je suis ton Dieu, je t'ai appelé par ton nom, tu es à moi!" Et tout ce qu'il fait par la suite en faveur de son enfant, il le fait au nom de ce oui, de cet engagement pris à son égard. Il faut donc parler du Baptême à la fois dans le passé et dans le présent. Il est une fontaine dont l'eau vive ne tarit jamais et à laquelle l'enfant de Dieu peut boire chaque jour.
Face à sa corruption naturelle et au péché, le croyant, conscient de ses fautes, peut se consoler de la grâce de Dieu qui lui a été offerte en Jésus-Christ, scellée et garantie dans le sacrement. Il sait que le Seigneur ne le rejette pas s'il vient à lui d'un coeur contrit, et qu'il le recouvre de sa justice (Galates 3:27). Se repentir signifie pour lui revenir d'un coeur humble et croyant à l'offre du pardon faite dans le Baptême et en vivre.
Face aux tentations de la chair, du monde et de Satan, le chrétien se souvient qu'en vertu de son Baptême il est enfant de Dieu et que son Père céleste a conclu avec lui une alliance qu'il ne rompra jamais. Certes, il a des ennemis qui lui veulent du mal, le monde, Satan et sa propre chair. Mais il sait aussi que le Seigneur est fidèle à ses engagements et qu'il ne manquera pas de venir à son secours. Il se souvient notamment de cette admirable promesse qu'il a faite aux siens: "Quand les montagnes s'éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s'éloignera point de toi et mon alliance de paix ne chancellera point, dit l'Eternel qui a compassion de toi" (Esaïe 54:10).
Dans toutes les détresses et afflictions matérielles, le croyant baptisé se sait assuré de l'amour paternel et de la fidèle providence de celui qui lui a déclaré dans son Baptême qu'il était son Père et entendait le rester à jamais. Le Baptême l'a placé sur le chemin du ciel sur lequel il sait que toute souffrance et épreuve est un moyen pédagogique dont le Seigneur se sert pour l'inciter à l'humilité et au recours constant à l'Evangile, et ainsi le fortifier dans la foi.
A l'approche de la mort, le chrétien qui fonde sa foi sur Jésus, son Rédempteur, peut avoir la consolante certitude que Dieu lui ouvrira le ciel qu'il lui a offert dans le Baptême. Luther écrit dans le Petit Catéchisme: "Le Baptême opère la rémission des péchés, il délivre de la mort et du diable et il donne le salut éternel à tous ceux qui croient". Mourir, c'est livrer un combat, le dernier combat. La mort est le salaire du péché, mais aussi pour le croyant l'amie qui le conduit auprès de son Rédempteur. Les promesses de l'Evangile ont retenti personnellement pour chaque chrétien dans son Baptême et lui ont été scellées à tout jamais. Le sacrement l'a marqué d'un sceau divin indélébile, que seules l'incrédulité ou l'impiété pourraient effacer. A l'heure de sa mort, l'enfant de Dieu peut, confiant, se fonder sur les promesses de son Baptême: son Sauveur ne l'abandonnera pas, mais l'aidera à franchir le dernier pas.
En attendant ce moment béni, le croyant trouve dans son Baptême la force de servir son Dieu, de marcher dans l'obéissance, de vivre dans la sainteté et la justice. Il est un bain de la régénération (Tite 3:5) par lequel le Saint-Esprit opère une vie nouvelle. La Bible enseigne que le chrétien est baptisé dans la mort du Christ et enseveli avec lui, pour ressusciter avec lui pour une vie nouvelle. Le Baptême est ainsi source de sanctification. Se souvenant des grâces reçues, le chrétien se doit de servir son Dieu et de le glorifier par une vie sainte. Dans les promesses faites et scellées par l'eau du Baptême, il trouve la force de faire ce que son Dieu lui demande de faire. Le sacrement est ainsi moyen de sanctification au même titre que la prédication de la Parole de Dieu.
Questions de révision et exercices:
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1) Indiquez les différentes raisons pour lesquelles l'Eglise luthérienne baptise les petits enfants.
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2) Pouvons-nous expliquer comment Dieu agit dans le coeur de l'enfant au moment de son Baptême?
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3) Que dites-vous
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- à l'adolescent qui est resté fidèle à l'alliance du Baptême?
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- à celui qui l'a rompue et qui vit dans le péché?
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- à celui qui l'a rompue et cherche le pardon?
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- aux parents qui décident de laisser leurs enfants choisir eux-mêmes s'ils veulent appartenir à Dieu ou pas?
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- aux parents qui ont perdu un enfant avant de pouvoir le baptiser?
3. LA SAINTE CENE
"La Sainte Cène est un sacrement institué par notre Seigneur Jésus-Christ, dans lequel nous mangeons son vrai corps et buvons son vrai sang sous les espèces du pain et du vin" (Martin Luther, Petit Catéchisme). "Nous croyons que dans la Sainte Cène le pain et le vin sont le vrai corps et le vrai sang du Christ qui sont donnés et reçus. Ils sont reçus non seulement par les chrétiens pieux, mais aussi par les mauvais chrétiens" (Martin Luther, Articles de Smalcalde, III, 6, 1).
La Sainte Cène est le deuxième sacrement institué par notre Seigneur Jésus-Christ. Elle qui est le sacrement de la communion, est devenue malheureusement celui de la désunion. C'est en effet une question sur laquelle le protestantisme est profondément divisé jusqu'à ce jour.
L'enseignement de la Bible:
Les trois évangiles appelés les Synoptiques (Matthieu, Marc et Luc) racontent l'institution de la Sainte Cène, ainsi que l'apôtre Paul. Les paroles prononcées ce jour-là par Jésus sont le fondement de l'enseignement de l'Ecriture à ce sujet. Les voici avec leurs différentes variantes: "Pendant qu'ils mangeaient, Jésus prit du pain et, après avoir rendu grâces, il le rompit et le donna aux disciples en disant: Prenez, mangez, ceci est mon corps. Il prit ensuite une coupe et, après avoir rendu grâces, il la leur donna en disant: Buvez-en tous, car ceci est mon sang, le sang de l'alliance qui est répandu pour beaucoup, pour le pardon des péchés" (Matthieu 26:26-28). Chez Marc, ces paroles sont à peu près les mêmes, si ce n'est qu'il précise que tous les disciples burent la coupe. Autre différence: Il y est dit non pas que Jésus rendit grâces à propos du pain, mais qu'il le bénit (Marc 14:22-24). Selon Luc, Jésus dit du pain qu'il "est donné pour vous" et demande aux disciples de le manger "en mémoire de moi". A propos de la coupe, il déclare non pas quelle est le sang de l'alliance, mais "la nouvelle alliance en mon sang" (Luc 22:19.20). Ce sont là des différences mineures dues au fait que Jésus s'exprimait en araméen et que ses paroles furent traduites en grec par les évangélistes, et que par ailleurs il a peut-être, pendant la distribution de la Sainte Cène, prononcé plusieurs les mêmes paroles avec quelques petites variantes. En tout cas, elles ne changent rien au sens du texte.
Le sens de ces mots est tout ce qu'il y a de plus clair, et l'Eglise luthérienne a toujours insisté sur la nécessité de les laisser s'exprimer le plus naturellement du monde et de les interpréter littéralement. Selon cette interprétation, Jésus a, au cours du repas pascal pris avec les disciples la veille de sa mort, pris du pain et l'a rompu. Geste indispensable pour le distribuer et qui n'a pas de signification particulière. Il le donna aux disciples et leur demanda de le manger en disant: "Ceci est mon corps". Il fit de même avec la coupe qui, bien que le texte ne le dise pas explicitement, contenait du vin, car c'est ce que les Juifs buvaient en célébrant la Pâque. Il la leur tendit, demanda aux disciples d'en boire et leur dit que c'était son sang ou la nouvelle alliance en son sang.
Les chrétiens réformés disent qu'il faut interpréter ce texte d'une façon symbolique et affirmer que le pain et le vin représentent le corps et le sang ou en sont l'image. Il existe quelques variantes dans leur interprétation, mais ils parviennent tous à la même conclusion: c'est un symbole. Le pain brisé symbolise le corps du Christ brisé sur la croix (ce qui est d'ailleurs faux, car son corps n'a pas été brisé et ne devait pas l'être, Jean 19:31-37), et le vin qui coule de la coupe est l'image de son sang coulant sur la croix. Les Réformés citent volontiers, pour justifier leur interprétation, Jean 6:63 où Jésus dit: "C'est l'Esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien". A quoi les Luthériens répondent que dans Jean 6 il n'est pas question de la Sainte Cène, même si les paroles de Jésus ressemblent beaucoup à celles qu'il a prononcées en administrant le sacrement. On affirme aussi que la présence du corps et du sang du Christ ne peut pas être une présence réelle, puisque son corps et son sang sont dans le ciel. Il s'agit donc d'une présence spirituelle: en mangeant le pain et en buvant le vin, le communiant croyant élève son coeur vers le ciel et s'unit spirituellement, par la foi, au corps et au sang du Christ. A cela les Luthériens répondent qu'il ne faut pas modifier le sens des paroles de Jésus et qu'il est tout-puissant, qu'il peut donc faire participer son corps et son sang à son omniprésence, les rendre présents partout où il le veut.
Ajoutons encore un autre texte biblique. L'apôtre Paul écrit aux Corinthiens: "La coupe de bénédiction que nous bénissons n'est-elle pas la communion au sang de Christ? Le pain que nous rompons n'est-il pas la communion au corps de Christ?" (1 Corinthiens 10:16). Le calice est "coupe de bénédiction" parce qu'il procure une grande bénédiction aux communiants, leur apportant le pardon des péchés, mais aussi parce qu'il fait l'objet d'une bénédiction ou d'une action de grâces. Le Christ a béni les éléments et rendu grâces à Dieu, en prononçant une prière qui ne nous a pas été conservée. Le pain et le vin, dit Paul, sont la communion, plus précisément, comme le veut la traduction littérale, la participation au corps et au sang du Christ. Cela signifie tout simplement qu'en prenant le pain et le vin bénits, le communiant reçoit le corps et le sang du Christ.
L'Eglise luthérienne rejette aussi la doctrine catholique de la transsubstantiation selon laquelle le prêtre, par un pouvoir qu'il a reçu dans son ordination, change les substances du pain et du vin en corps et sang du Christ. Il reste du pain et du vin consacrés la couleur, la consistance et le goût, mais ce n'est plus du pain et du vin. Ce n'est plus que le corps et le sang du Christ. Voilà pourquoi les hosties consacrées qui n'ont pas été consommées sont enfermées dans le "tabernacle" et font l'objet d'un culte, et le vin n'est consommé habituellement que par le prêtre (communion sous une seule espèce). Il s'agit là d'une mutilation du sacrement institué par le Christ qui, du reste, a dit explicitement aux disciples: "Buvez-en tous!"
Chose plus grave encore: L'Eglise catholique enseigne que l'eucharistie est le renouvellement non sanglant, de nos jours on dit plus volontiers la re-présentation, l'actualisation ou la réactualisation du sacrifice du Christ, et que ce geste a une vertu expiatoire pour le prêtre qui l'effectue, pour l'assemblée qui communie et, d'une façon plus générale, pour les vivants et les morts. On transforme ainsi la Cène, même si on affirme que c'est Jésus qui accomplit ce geste par le prêtre, en un rite méritoire qui vaut aux hommes des bénédictions divines, et on offense ainsi le Seigneur. En effet, si son sacrifice doit être renouvelé ou réactualisé, ne laisse-t-on pas entendre qu'il n'a pas été suffisant, qu'il a besoin, pour être efficace, devenir opérant et sauver les hommes, du concours de l'Eglise? C'est avec la plus grande vigueur que Luther s'est opposé à une telle doctrine.
Il est clair que la Sainte Cène nous met devant un profond mystère que nous ne pouvons pas élucider. On a objecté que la doctrine luthérienne est irrationnelle, qu'elle oblige à croire l'incompréhensible et l'incroyable. Sans doute, mais en va-t-il autrement avec les doctrines de la Trinité, de la rédemption ou de la justification? Existe-t-il une seule doctrine rationnelle? Nous ne pouvons pas expliquer avec notre raison comment le corps et le sang de Jésus-Christ remonté au ciel sont réellement présents partout où le sacrement est célébré. Mais nous le croyons, parce que lui-même l'a dit. On a objecté aussi que cette doctrine était impossible, que pour manger réellement le corps, il faudrait le mâcher, le digérer et l'éliminer comme le pain. On est allé jusqu'à parler d'anthropophagie. A cela l'Eglise luthérienne répond que si le corps et le sang du Christ sont réellement présents, ils ne le sont pas localement. Quoiqu'il y ait "manducation orale" (manducation par la bouche) de son corps et de son sang, ils ne sont pas enfermés dans le pain et le vin ni mâchés, digérés et éliminés avec eux. C'est une présence réelle, substantielle, mais profondément mystérieuse, qu'on appelle pour cela sacramentelle. Enfin, on a dit qu'une présence réelle était inutile. "C'est l'Esprit qui vivifie, la chair ne sert de rien" (Jean 6:63). Rappelons cependant que ce texte n'est pas une révélation divine sur la Sainte Cène. Et enfin, depuis quand revient-il à l'homme de dire ce qui lui est utile ou non en matière de foi? Dieu ne sait-il pas mieux que nous de quoi nous avons besoin?
La présence réelle se fonde sur les paroles que Jésus a prononcées en instituant le sacrement, et non sur la foi des communiants. Il s'ensuit, et c'est une affirmation caractéristique de la doctrine luthérienne, que tous ceux qui se présentent à la Table du Seigneur reçoivent le corps et le sang du Christ, ce qu'on appelle les éléments célestes du sacrement, et cela indépendamment de leur foi ou de leur incrédulité. Les communiants indignes également, mais eux les reçoivent pour leur jugement. L'apôtre Paul affirme en effet que "celui qui mangera le pain et boira la coupe du Seigneur indignement, sera coupable envers le corps et le sang du Seigneur" et que "celui qui mange et boit sans discerner le corps du Seigneur, mange et boit un jugement contre lui-même" (1 Corinthiens 11:27.29).
Questions de révision et exercices:
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1) Comment définissez-vous la Sainte Cène?
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2) Pourquoi pensez-vous que Jésus ait institué la Sainte Cène la veille de sa mort, et de surcroît le jour de la Pâque?
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3) Quelles sont les erreurs au sujet de la Sainte Cène qui ont cours dans l'Eglise catholique et dans l'Eglise réformée?
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4) Que signifient les expressions "présence réelle ou substantielle", "présence sacramentelle" et "manducation orale"?
Les effets de la Sainte Cène
Jésus nous explique quels sont les effets de la Sainte Cène quand il dit de son corps qu'il est donné et de son sang qu'il est répandu pour nous, pour la rémission de nos péchés et lorsque, par ailleurs, il précise que la coupe est la nouvelle alliance en son sang. Il offre donc aux communiants ce par quoi il a expié leurs péchés et les a réconciliés avec Dieu. En un mot, il nous donne les gages de notre rédemption. La Sainte Cène a ainsi les mêmes effets que l'Evangile ou le Baptême. Elle nous scelle les grâces du Christ, en particulier le pardon des péchés. Luther écrit:
"La grâce de la Sainte Cène nous est indiquée par ces mots: Donné et répandu pour vous en rémission des péchés. Ainsi, en vertu de ces paroles, nous recevons dans la Sainte Cène la rémission des péchés, la vie et le salut, car où il y a rémission des péchés, là aussi est la vie et le salut" (Luther, Petit Catéchisme).
Les effets de la Sainte Cène sont les suivants:
Elle offre aux communiants les gages de leur rédemption et les fortifie ainsi dans la foi au pardon. Elle est pour l'âme ce que la nourriture naturelle est pour le corps, procurant au croyant une force et une certitude dont il a toujours besoin: Dieu lui pardonne ses péchés. Les promesses de l'Evangile sont, de la part de Dieu, une déclaration d'amour. Dans la Sainte Cène, le corps et le sang de Jésus-Christ sont une déclaration d'amour rendue visible, tangible, ce qu'un bouquet de fleurs est pour une fiancée. Il y a dans le sacrement application individuelle et personnalisée des promesses universelles de l'Evangile.
D'autre part, la Sainte Cène unit étroitement au Christ. Elle est communion à son corps et à son sang. En la recevant, on reçoit Jésus-Christ en soi et vit en étroite communion avec lui. Elle est aussi proclamation de la mort rédemptrice du Christ. L'apôtre Paul écrit: "Toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne" (1 Corinthiens 11:26). En communiant, le peuple de Dieu commémore le sacrifice de son Sauveur, confesse qu'il l'a racheté par son sacrifice expiatoire.
Le sacrement de la Cène a aussi pour effet de concrétiser la communion fraternelle de tous ceux qui s'approchent de la table du Seigneur. "Puisqu'il y a un seul pain, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps, car nous participons tous au même pain" (1 Corinthiens 10:17). C'est le repas de la convivialité. Unis dans une même foi, rassemblés autour de la même table, désireux de recevoir les mêmes gages du pardon et toujours prêts à se pardonner réciproquement, les croyants se souviennent qu'ils ne sont pas seuls dans le monde, mais qu'ils forment une même famille autour du même Chef. Ils grandissent ainsi dans l'amour fraternel.
L'eucharistie fortifie aussi dans la certitude de la résurrection pour la vie éternelle. Le Christ ressuscité et victorieux nourrit les siens de son corps, gage de leur future résurrection. Il leur certifie ainsi qu'il ne les abandonnera pas à la misère et l'humiliation présentes, mais qu'un jour il les transformera et les glorifiera par le pouvoir qu'il a de s'assujettir toutes choses" (Philippiens 3:21). En communiant avec foi, le chrétien attend la rédemption de son corps (Romains 8:33).
Enfin, la Sainte Cène est le repas de l'Eglise qui attend le retour de son Seigneur. Jésus dit, en l'instituant: "Je vous le dis, je ne boirai plus désormais de ce fruit de la vigne, jusqu'au jour où j'en boirai avec vous dans la maison de mon Père" (Matthieu 26:29). Et Paul commente en ces termes: "Toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne" (1 Corinthiens 11:26). L'eucharistie est ainsi le repas d'un peuple en voyage, d'une Eglise qui vit dans l'attente du renouvellement de toutes choses. Elle est préfiguration du banquet céleste, des noces de l'Agneau. C'est la manne dans le désert dont Jésus nourrit son peuple, avant de le faire entrer dans le pays où coulent le lait et le miel. C'est la nourriture divine qui le fortifie pour son voyage et pour le combat qu'il doit mener jusqu'à la victoire finale.
L'administration de la Sainte Cène:
L'eucharistie est administrée par l'Eglise luthérienne dans le cadre d'une liturgie qui remonte à l'Eglise ancienne, qui est très riche en signification et prépare le chrétien à communier d'un coeur repentant, croyant et rempli d'adoration pour ce profond mystère. Dans cette liturgie, la consécration du pain et du vin par la récitation, de la part du pasteur, des paroles d'institution est un élément vital et indispensable. C'est en vertu des paroles du Christ, en effet, que l'eucharistie est un sacrement et que son corps et son sang sont présents. L'Eglise luthérienne enseigne que cette présence a lieu pendant tout le temps que dure l'administration du sacrement.
Pour qu'il soit administré conformément à son institution, il faut aussi que les éléments soient effectivement distribués aux communiants. Par contre, il ne doivent pas faire l'objet d'un culte, car non seulement ils ne sont pas destinés à être adorés, mais la présence du corps et du sang du Christ cesse quand tous ont communié.
L'Eglise luthérienne enseigne et confesse qu'on communie indignement quand on le fait avec un coeur impénitent et sans foi. Elle se sait en cela liée aux paroles de l'apôtre déjà citées: "Celui qui mangera le pain ou boira la coupe du Seigneur indignement, sera coupable envers le corps et le sang du Seigneur. Que chacun donc s'éprouve soi-même et qu'ainsi il mange du pain et boive de la coupe, car celui qui mange et boit sans discerner le corps du Seigneur, mange et boit un jugement contre lui-même" (1 Corinthiens 11:27-29).
Le discernement du corps et du sang du Seigneur implique 1) la repentance par laquelle le communiant se sait et se confesse coupable et en demande pardon à Dieu, 2) la foi en la mort rédemptrice du Christ, source du pardon et du salut, 3) la volonté sincère de se détourner du mal et de vivre saintement, et bien sûr aussi la foi en la présence réelle du corps et du sang du Christ sous les espèces du pain et du vin. C'est la raison pour laquelle l'Eglise évangélique luthérienne n'admet pas à la Cène ceux qui ne sont pas capables de s'examiner conformément à l'Ecriture Sainte, quelles que soient les raisons de cette incapacité (ignorance, handicap mental grave, incrédulité, impiété).
Il s'agit des enfants qui n'ont pas encore atteint un degré de connaissance suffisant pour s'examiner. La Bible cependant ne prescrit aucun âge; c'est à l'Eglise d'agir pour le mieux. Il s'agit par ailleurs des malades mentaux souffrant de troubles tels qu'ils ne sont pas en mesure de s'examiner, ainsi que des malades en état d'inconscience. D'autre part, l'Eglise exclut de la Sainte Cène ceux qui ont fait l'objet d'une procédure d'excommunication parce qu'il vivent dans le péché ou dans l'incrédulité, et ne s'en sont pas repentis. Il va de soi que le jour où ils s'en repentent (et la repentance doit être publique quand le péché l'a été), ils sont à nouveau admis à la Table du Seigneur. L'Eglise évangélique luthérienne refuse aussi la Cène à tous ceux qui professent de fausses doctrines, sont attachés à l'erreur et y souscrivent, et quand ce ne serait que par l'appartenance à une Eglise qui ne confesse pas la vérité.
Elle pratique pour toutes ces raisons ce qu'on a l'habitude d'appeler la communion close. Elle considère que l'eucharistie n'est pas seulement un moyen de grâce, mais aussi le témoignage de l'unité de la foi, que dans ce domaine elle n'est pas une méthode pour réaliser l'unité, mais qu'elle ne peut en être que le signe visible et le témoignage. Elle ne donne donc la Cène qu'à ceux qui professent la même foi, à ses membres et à ceux d'Eglises soeurs. L'apôtre Paul écrit: "Puisqu'il y a un seul pain, nous qui sommes plusieurs, nous formons un seul corps, car nous participons tous à un même pain" (1 Corinthiens 10:17).
Cette pratique est peu comprise à une époque d'unionisme et d'oecuménisme où les Eglises veulent s'unir par-delà leurs divergences doctrinales, laissant entendre que celles-ci ne constituent pas des erreurs, mais sont des opinions différentes et également légitimes. L'Eglise luthérienne et les autres Eglises qui pratiquent la communion close se heurtent ainsi à l'incompréhension générale. Elle reste cependant convaincue que, ce faisant, elle agit conformément à la Parole de Dieu et aux exigences de vérité qui sont les siennes. Il lui est demandé de rester fidèle à cette pratique, tout en faisant preuve d'un maximum de compréhension, de patience et de charité.
Questions de révision et exercices:
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1) Quels sont les bienfaits que le Christ offre dans la Sainte Cène et quels sont les effets du sacrement sur celui qui communie dans la foi?
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2) Quels sont les effets de la Sainte Cène sur celui qui communie indignement?
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3) Est-il important de se préparer à la communion et en quoi cela consiste-t-il?
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4) Que signifie "consacrer le pain et le vin"?
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5) Que signifie l'expression "communion close" et quel est le bien-fondé de cette pratique?
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Par lutherien le 26 Novembre 2009 à 16:38
LA DOCTRINE DU SALUT:
1. LA PREDESTINATION
"Un chrétien ne doit s'intéresser à l'article de l'éternelle élection divine que dans la mesure où celle-ci est révélée dans la Parole de Dieu, laquelle nous présente le Christ comme le livre de vie que la prédication de l'Evangile descelle et nous ouvre, comme il est écrit: "Ceux qu'il a élus, il les a aussi appelés" (Romains 8:30). C'est donc en Christ que nous devons chercher l'éternelle élection du Père qui, dans son conseil divin éternel, a résolu de ne sauver personne en dehors de ceux qui confessent son Fils, le Christ, et qui croient vraiment en lui. Il faut écarter les autres pensées, qui ne viennent pas de Dieu, mais sont inspirées par l'Ennemi qui s'efforce par là d'affaiblir ou même de ruiner la glorieuse assurance que nous donne cette salutaire doctrine. Grâce à elle, nous savons que nous sommes élus en Christ, par pure grâce et sans aucun mérite de notre part, pour la vie éternelle et que personne ne peut nous ravir de sa main... Nous devons nous en souvenir dans nos plus grandes tentations et y puiser une assurance qui nous rendra capables d'éteindre les traits enflammés du Malin" (Formule de Concorde, Epitome, Article XI, 13).
La doctrine de la prédestination ou de l'élection est sans doute la plus mystérieuse et la plus difficile de toute la Bible. On l'appelle traditionnellement la croix des théologiens. Beaucoup d'entre eux ont voulu spéculer sur des questions auxquelles l'Ecriture Sainte ne répond pas et ont, à cause de cela, sombré dans des erreurs parfois très graves.
Encore une fois, la révélation de Dieu est partielle. Il nous a dit ce que nous devions savoir pour être des chrétiens heureux, confiants et vigilants et pour parvenir au salut. Ni plus ni moins. Il est une question notamment à laquelle la Bible ne répond pas: Pourquoi, s'il est vrai que le salut est un don gratuit de Dieu, tous les hommes ne sont-ils pas sauvés? Pourquoi les uns et pas les autres, si la grâce est la même pour tous? La doctrine de la prédestination n'a pas pour mission de résoudre cette énigme qui en reste une pour l'homme aussi longtemps qu'il est sur la terre. Par contre, elle est chargée de consoler, de réconforter, de réjouir les croyants et de leur donner l'espérance de la victoire finale et de la vie éternelle. C'est la seule raison pour laquelle Dieu l'a révélée dans la Bible.
L'enseignement de la Bible:
La doctrine de l'élection est présentée dans un certain nombre de textes dont voici les plus importants:
"Dieu nous a sauvés et nous a adressé une sainte vocation, non à cause de nos oeuvres, mais selon son propre dessein et selon la grâce qui nous a été donnée en Jésus-Christ avant les temps éternels et qui a été manifestée maintenant par l'apparition de notre Seigneur Jésus-Christ" (2 Timothée 1:9). Dans ce texte, l'apôtre affirme que c'est conformément à son dessein et à une grâce qui nous était destinée de toute éternité que nous avons été appelés au salut, et cela sans aucun mérite de notre part. En d'autres termes, si Dieu nous a appelés à croire en Jésus-Christ pour nous sauver un jour, c'est parce qu'il l'a voulu et qu'il avait de toute éternité décidé de le faire.
"Pour nous, frères bien-aimés du Seigneur, nous devons à votre sujet rendre continuellement des actions de grâces à Dieu, parce que Dieu vous a choisis dès le commencement pour le salut, par la sanctification de l'Esprit et par la foi en la vérité. C'est à quoi il vous a appelés par notre Evangile, pour que vous possédiez la gloire de notre Seigneur" (2 Thessaloniciens 2:13.14). Le choix divin s'est donc fait dès le commencement, c'est-à-dire dans l'éternité. C'est par la sanctification au sens large du terme, c'est-à-dire par tout ce que le Saint-Esprit accomplit en nous et notamment par la foi que Dieu nous conduit là où il a décidé de nous conduire, dans la gloire céleste.
"Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ, comme il nous a élus en lui avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et irrépréhensibles devant lui, nous ayant prédestinés dans son amour à être ses enfants d'adoption par Jésus-Christ, selon le bon plaisir de sa volonté... En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d'après le conseil de sa volonté, afin que nous servions à la louange de sa gloire, nous qui d'avance avons espéré en Christ" (Ephésiens 1:3-5.11.12). Il serait intéressant de lire tout le texte d'Ephésiens 1:3-14, une des plus belles pages de la Bible. Une fois de plus, l'apôtre, qui ne cherche qu'une chose, à réjouir le coeur de ses lecteurs croyants, leur rappelle qu'ils sont ce qu'ils sont, des pécheurs rachetés et pardonnés, en marche vers la vie éternelle, parce que Dieu a voulu qu'ils soient cela. Il en a pris la décision de toute éternité, mu par sa seule volonté, et la réalise dans le temps en les appelant à la foi en Christ. Grâce à cette élection, ils sont "scellés du Saint-Esprit... lequel est un gage de notre héritage" (V.14). Et tout cela pour que toute gloire soit rendue à Dieu!
"Nous savons... que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein. Car ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son Fils fût le premier-né d'entre plusieurs frères. Et ceux qu'il a appelés, il les a aussi justifiés; et ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés" (Romains 8:28-30). Les appelés sont des prédestinés au salut. Si Dieu les appelle dans le temps, les invite à croire en Christ et à trouver en lui le pardon et la justice, si on peut dire dès maintenant qu'ils sont glorifiés en espérance, c'est parce que Dieu les a prédestinés à cela. Il n'improvise pas, n'agit pas au hasard, mais accomplit un dessein, mène à bien une décision qu'il a prise dans l'éternité. Ce sont là les textes de la Bible les plus importants concernant la prédestination. Cf. encore Matthieu 22:14; 24:22.24; Romains 9:11.23; 11:5.7; 1 Pierre 1:2.
Petite synthèse:
Résumons tout cela dans les affirmations suivantes:
L'élection ou prédestination est une décision que Dieu a prise dans l'éternité, avant de créer le monde.
Elle a pour fondement la grâce de Dieu en Jésus-Christ: c'est en lui que nous sommes élus et c'est par la foi en son nom que nous parviendrons au salut.
La prédestination consiste en ce que de toute éternité Dieu a décidé de sauver des hommes en les appelant à la foi en Christ, en leur accordant le pardon des péchés et la grâce de la persévérance. Le chrétien est donc invité à croire qu'en l'appelant à la foi, Dieu réalise un plan éternel et qu'il saura le mener à bien.
Tous les hommes ne sont pas élus. "Il y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus" (Matthieu 22:14). Et cependant Dieu veut le salut de tous les hommes: "Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (1 Timothée 2:4). Il ne veut pas "qu'aucun périsse, mais que tous arrivent à la repentance" (2 Pierre 3:9). S'il est vrai que tous ne sont pas élus, il est faux de dire que certains ont été prédestinés à la damnation.
Les élus seront sauvés à coup sûr, puisque Dieu a décidé de toute éternité de leur donner la vie éternelle: "Il s'élèvera de faux Christs et de faux prophètes, ils feront de grands prodiges et des miracles, au point de séduire, s'il était possible, même les élus" (Matthieu 24:24). Mais justement, ce n'est pas possible. Nul ne peut arracher ses brebis de la main de Jésus ni de celle de son Père (Jean 10:28.29). Il n'en est pas moins vrai qu'il y a des croyants qui déchoient de la foi. Certains parmi eux s'en repentent et reviennent à Jésus-Christ, tandis que les autres périssent dans leur incrédulité. C'est un mystère insondable.
C'est une vérité divinement révélée que si un homme est sauvé, il l'est par la grâce de Dieu et ne le mérite en rien, et que celui qui périt périt par sa propre faute, sans que Dieu l'ait voulu.
Encore une fois, la Bible ne nous dit pas pourquoi tous ne sont pas sauvés. Certains ont voulu le lui faire dire, mais ils ont chaque fois sombré dans une fausse doctrine. Calvin disait que si tous ne sont pas sauvés, c'est parce que Dieu ne veut pas les sauver tous, que certains sont prédestinés au salut et d'autres à la damnation. C'est une doctrine terrible qui fait, en dernière analyse, de Dieu l'auteur de la chute.
Ceux qu'on appelle les synergistes ou arminiens affirment le contraire: Dieu voudrait sauver tous les hommes, mais tous ne le seront pas, parce qu'ils ne font pas ce qu'il faut pour cela. Sachant cela, il n'a élu pour le salut que ceux dont il savait à l'avance qu'ils croiraient et persévéreraient dans la foi. C'est une erreur dont la conséquence logique est que, si je suis élu, c'est parce que Dieu savait de toute éternité que je ferais le nécessaire pour croire et persévérer dans la foi. Dans ce cas, mon élection et donc mon salut final reposent sur mes bonnes dispositions et ne sont plus des gratuités du Seigneur.
Il faut renoncer à toute spéculation, s'en tenir fermement et exclusivement à ce que Dieu a révélé dans l'Ecriture Sainte et comprendre que cette doctrine si mystérieuse veut procurer aux croyants l'assurance de la vie éternelle, en les gardant humbles et confiants.
Questions de révision et exercices:
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1) Faites parler Ephésiens 1:3-14, en formulant à l'aide de ce texte la doctrine biblique de la prédestination et en en tirant les applications voulues. Comptez notamment le nombre de fois où le texte fait référence à Jésus-Christ et tirez-en des conclusions.
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2) Quelles sont les deux fausses doctrines de la prédestination dont il faut se garder. En quoi sont-elles fausses et qu'ont-elles de dangereux?
2. LA DOCTRINE DU SAINT-ESPRIT
Le Saint-Esprit, on l'a vu en étudiant la doctrine de Dieu, est la troisième personne de la sainte Trinité, de la même essence divine que le Père et le Fils. Dans le présent chapitre, il sera question non pas de sa personne, mais de son oeuvre, de la mission qui est la sienne et qui consiste à appliquer aux hommes le salut acquis par le Christ.
L'oeuvre du Saint-Esprit:
Le Saint-Esprit a participé à la création du monde. Il se mouvait au-dessus des eaux (littéralement: il "couvait les eaux"), dit le texte de la Bible (Genèse 1:2). Le psalmiste proclame que "les cieux ont été faits par la parole de l'Eternel et toute leur armée par le souffle de sa bouche" (Psaume 33:6), tandis que Job confesse: "L'Esprit de Dieu m'a créé et le souffle du Tout-Puissant m'anime" (Job 33:4). Cf. encore Psaume 104:29.30.
Mais ce qui nous intéresse ici, c'est la part du Saint-Esprit dans l'oeuvre du salut. Dieu le Père a mis en place un plan de salut et prédestiné des hommes à la vie éternelle. Le Fils a, en son temps, exécuté ce plan en rachetant les hommes. Que fait le Saint-Esprit? Eh bien, il ne manque pas de travail. Il a de quoi faire, car c'est à lui que revient la tâche d'appeler le pécheur au salut, de le convertir, de lui appliquer le pardon, de le sanctifier et préserver dans la foi jusqu'à la fin, jusqu'au moment de la victoire finale.
Bien qu'il soit la troisième personne de la Trinité, la Bible le présente comme un don qui est fait aux croyants: "Si donc, méchants comme vous l'êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent" (Luc 11:13; Actes 2:38; 8:20). Il est aussi une puissance: "Vous recevrez une puissance, le Saint-Esprit survenant sur vous" (Actes 1:8). Jésus l'appelle le Consolateur qui rend témoignage (Jean 14:16.26; 15:26; 16:1; Actes 5:32; Romains 8:16; 1 Jean 5:6).
Le Saint-Esprit a toujours été à l'action dans le monde, y compris sous l'ancienne alliance. La Bible dit qu'il venait sur certains hommes (Juges 14:6; 15:14 ss.), qu'il entrait en eux (Ezéchiel 2:2; 3:24) ou était en eux (Genèse 41:38; Nombres 27:18; Daniel 5:11.12.14; 6:4). D'ailleurs partout où il y a foi, le Saint-Esprit agit. Il est donc faux de dire qu'il est venu pour la première fois au moment de la Pentecôte, et cela bien que l'évangéliste dise: "L'Esprit n'avait pas encore été donné, parce que Jésus n'avait pas encore été glorifié" (Jean 7:39). Jésus lui-même communiqua le Saint-Esprit aux disciples en soufflant sur eux (Jean 20:22). En disant qu'il n'avait pas encore été donné, saint Jean songeait à son effusion particulière, visible, "charismatique" le jour de la Pentecôte, qui permit aux apôtres de parler en langues. Cette effusion-là, prédite par les prophètes Jérémie, Ezéchiel et Joël, "inaugure les derniers jours", comme le dit l'apôtre (Actes 2:17). Elle devait jeter les bases de l'Eglise chrétienne. Le Saint-Esprit ne sera plus donné en quelque sorte au compte-gouttes, mais offert à tous. Tous connaîtront le Seigneur dans la nouvelle alliance (Jérémie 31:34) et seront enseignés de Dieu (Esaïe 54:13).
Les dons de l'Esprit:
Le Saint-Esprit apporte à ceux qui le reçoivent dans leur coeur et l'y laissent agir des dons multiples. Il y a tout d'abord les dons communs dont tous les croyants ont besoin pour vivre dans la foi, servir Dieu et parvenir au salut. Il s'agit notamment de la connaissance, de la sagesse, de l'obéissance, de la persévérance, du discernement, de la patience, de l'amour et, d'une façon générale, de tous les fruits de la foi. Les chrétiens possèdent ces dons à des degrés divers.
Mais il y a aussi les dons extraordinaires ou miraculeux. Ce sont des charismes particuliers tels que le don de guérison par imposition des mains, le parler en langues, le don d'interprétation et le don de prophétie (1 Corinthiens 12:8-2). Ces charismes sont des "signes" (Marc 16:17; 1 Corinthiens 14:22). Jésus avait fait des miracles pour s'accréditer comme le Messie promis. De la même façon il a été donné à l'Eglise, notamment au début de son histoire, d'accomplir des choses étonnantes et miraculeuses pour attester que le message qu'elle annonce lui vient de Dieu. Ces signes sont en quelque sorte les lettres de créance de ceux qui les accomplissaient.
Le Seigneur accorde ces dons où, quand et à qui il veut. Il est évident qu'il peut le faire aujourd'hui encore, s'il en a décidé ainsi. Cela dit, ces charismes ne sont pas indispensables au salut, tandis que la foi, l'amour, la patience ou la persévérance le sont. Il ne faut pas leur attribuer plus de valeur qu'ils n'en ont. Il ne faut surtout pas, à l'exemple des Pentecôtistes, en faire la preuve visible d'un "baptême dans l'Esprit" par lequel tous les chrétiens devraient passer. Enfin, la prudence s'impose. Ces prodiges ne viennent pas nécessairement de Dieu; on les rencontre aussi dans d'autres religions. Pour plus de détails sur cette question, on pourra consulter un ouvrage spécialisé.
Questions de révision et exercices:
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1) Dites en quelques phrases en quoi consiste l'oeuvre du Saint-Esprit.
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2) Si vous aviez à identifier les cinq dons les plus importants du Saint-Esprit, lesquels mentionneriez-vous?
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3) Et quel est selon vous le don le plus important?
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4) Que répondre à ceux qui prétendent que tout chrétien peut et doit pouvoir parler en langues, s'il fait le nécessaire pour cela?
2. LA VOCATION
Dieu appelle les hommes au salut. Il les invite à se repentir de leurs péchés et à accepter d'un coeur croyant le pardon et le salut que Jésus-Christ a acquis sur la croix et qui sont offerts dans l'Evangile. Il est réconcilié avec le monde, mais le salut qui est là, disponible pour tous, demande à être approprié par la foi. Il faut que l'homme tende la main et se le laisse donner. Pour cela, il faut qu'il soit appelé, invité. Voilà pourquoi Dieu avait envoyé des prophètes, puis son Fils qui passa l'essentiel de son temps à prêcher l'Evangile, et enfin les apôtres.
Dieu ne cesse d'appeler les hommes, car il veut leur salut: "Les noces sont prêtes, mais les conviés n'étaient pas dignes. Allez donc dans les carrefours et appelez aux noces tous ceux que vous trouverez" (Matthieu 22:8.9). "Il y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus" (Matthieu 22:14). Et Jésus pleura sur Jérusalem en disant: "Combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l'avez pas voulu" (Matthieu 23:37).
Quand la Bible dit que tous les hommes ou que beaucoup d'hommes sont appelés, elle songe à cette invitation qui s'adresse à tous. On appelle cela la vocation extérieure. Quand, par contre, elle dit des croyants qu'ils sont des appelés, elle applique le mot à des gens qui n'ont pas seulement été appelés extérieurement, qui n'ont pas seulement entendu l'Evangile, mais qui l'ont reçu avec foi, qui ont été convertis. On parle alors de vocation intérieure. C'est dans ce deuxième sens que l'apôtre Paul utilise le terme. Il écrit par exemple aux chrétiens de Rome: "Vous avez été appelés par Jésus-Christ..., tous ceux qui à Rome sont bien-aimés de Dieu, appelés à être saints" (Romains 1:6.7). "Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein" (Romains 8:28). "Dieu est fidèle, qui vous a appelés à la communion de son Fils... Considérez, frères, que parmi vous qui avez été appelés, il n'y a ni beaucoup de sages selon la chair, ni beaucoup de puissants, ni beaucoup de nobles" (1 Corinthiens 1:9.26).
La vocation est l'oeuvre commune aux trois personnes de la Trinité. Le Père appelle (1 Corinthiens 1:9; 2 Timothée 1:9; 1 Pierre 5:10), le Fils appelle (Matthieu 11:28; Luc 5:32; Romains 1:6) et le Saint-Esprit appelle, puisqu'il rend témoignage au Christ et à la vérité (Jean 15:26; Actes 5:31).
L'Eglise luthérienne insiste beaucoup sur le fait que l'appel au salut a lieu dans l'Evangile. C'est là et là seulement que Dieu dit aux hommes qu'il veut les sauver par la foi en Christ. La dernière parole du Christ à ses apôtres fut celle-ci: "Allez par tout le monde et prêchez la bonne nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné" (Marc 16:15.16). "Il vous a appelés par notre Evangile, pour que nous possédions la gloire de notre Seigneur Jésus-Christ" (2 Thessaloniciens 2:14). Pierre dit à tous ceux qui avaient entendu sa prédication: "Repentez-vous et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour le pardon de vos péchés, et vous recevrez le don du Saint-Esprit" (Actes 2:38). Puis il est dit: "Ceux qui reçurent de bon coeur sa parole furent baptisés et, en ce jour-là, le nombre des disciples augmenta d'environ trois mille âmes" (Actes 2:41). Tout homme doit donc entendre l'Evangile pour être sauvé. Ce n'est pas dans les prières ou les exercices de piété qu'on découvre et trouve le salut, mais dans les promesses de l'Evangile. Voilà pourquoi il est indispensable qu'il soit prêché au monde et que l'Eglise fasse de la mission.
Qui est appelé? Quand Jésus dit: "Il y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus" (Matthieu 22:14), il ne veut pas dire que tous ne sont pas appelés au salut, que certains hommes en sont exclus, mais que le nombre des appelés est beaucoup plus grand que celui des élus. L'ordre: "Allez, faites de toutes les nations des disciples" (Matthieu 28:19) montre que l'appel divin est universel. C'est ce qui ressort aussi très clairement de la parabole des noces: "Appelez aux noces tous ceux que vous trouverez. Ces serviteurs allèrent dans les chemins, rassemblèrent tous ceux qu'ils trouvèrent, méchants et bons, et la salle des noces fut pleine de convives" (Matthieu 22:19.20). Dieu "annonce maintenant à tous les hommes, en tous lieux, qu'ils aient à se repentir", dit l'apôtre Paul aux païens d'Athènes (Actes 17:30).
Dieu veut vraiment sauver tous les hommes. Il veut que "tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité" (1 Timothée 2:4). Il ne veut pas "qu'aucun périsse, mais que tous arrivent à la repentance" (2 Pierre 3:9). Aussi Jésus eut-il le coeur déchiré de constater que Jérusalem rejetait son Evangile. Il pleura sur la ville qui ne voulait pas se repentir et croire (Matthieu 23:37). Etienne fit de même, le jour de son procès (Actes 7:51).
Alors il reste une question à laquelle nous ne répondrons pas, parce que nous ne sommes pas en mesure de le faire: Pourquoi, si Dieu veut le salut de tous et y invite tous ceux qui entendent son Evangile, tous ne sont-ils pas sauvés? Des théologiens ont répondu qu'en fait, Dieu ne voulait pas sauver tous les hommes, mais que certains étaient prédestinés à la condamnation éternelle (cf. la doctrine de la prédestination). D'autres affirment que si tous ne sont pas sauvés, c'est parce qu'ils ne font pas le nécessaire pour cela. Du fait que l'homme peut résister à la grâce ils concluent qu'il peut aussi se préparer à elle et participer de façon active à sa conversion. Cela paraît logique, mais ce n'est pas biblique. L'homme peut tout faire pour sa perdition, et rien pour son salut. S'il est converti, il le doit à Dieu seul. Le mystère demeure donc.
Questions de révision et exercices:
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1) Quelle est la différence entre vocation extérieure et vocation intérieure?
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2) Qu'est-ce qui autorise tout homme à croire aux promesses de l'Evangile?
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3) Ne pourrait-on pas dire que Dieu appelle à la foi en Christ tous ceux qui entendent l'Evangile, mais que pour ceux qui ne l'entendent pas, il existe d'autres chemins du salut?
3. LA CONVERSION
"L'homme a été si profondément corrompu par la chute de nos premiers parents que, sous le rapport des choses spirituelles, relatives à la conversion et au salut, il est aveugle par nature et ne peut comprendre la Parole de Dieu quand elle est prêchée... Il est et reste ennemi de Dieu jusqu'à ce qu'il soit converti, rendu croyant, régénéré et renouvelé par la vertu du Saint-Esprit, au moyen de la Parole prêchée et écoutée, par pure grâce et sans aucune coopération de sa part... Dans la nature de l'homme, après la chute et avant la régénération, il ne subsiste pas même une étincelle des forces spirituelles grâce auxquelles il pourrait se préparer à recevoir la grâce de Dieu ou la saisir quand elle est offerte, ou être, de lui-même et par lui-même, apte à la recevoir et s'y disposer, ou contribuer à sa conversion soit en agissant spontanément et en opérant quelque chose en totalité, soit en y coopérant pour une moitié ou pour une part même minime" (Formule de Concorde, Solida Declaratio, Article II, 5.7).
Qu'est-ce que la conversion?
La conversion est l'acte par lequel le pécheur revient à Dieu. Il est délivré de son aveuglement spirituel, reconnaît et confesse ses fautes et accepte d'un coeur croyant le pardon que le Christ lui offre dans l'Evangile. Il devient ainsi enfant de Dieu et héritier de la vie éternelle. "Reviens, infidèle Israël... Revenez, enfants rebelles" disait Dieu à son peuple (Jérémie 3:12.14). Quand les apôtres prêchèrent à Antioche, "un grand nombre de personnes crurent et se convertirent au Seigneur, leur Dieu" (Actes 11:21). "Repentez-vous et convertissez-vous, pour que vos péchés soient effacés", dit Pierre à ses compatriotes (Actes 3:19).
Se convertir signifie littéralement faire demi-tour, se détourner des idoles ou du péché pour se tourner vers Dieu: "Nous vous exhortons à renoncer à ces choses vaines, pour vous tourner vers le Dieu vivant" (Actes 14:15). La description la plus complète de la conversion proposée par la Bible est sans doute celle-ci: "Je t'ai choisi du milieu de ce peuple et du milieu des païens, vers qui je t'envoie, afin que tu leur ouvres les yeux, pour qu'ils passent des ténèbres à la lumière et de la puissance de Satan à Dieu, pour qu'ils reçoivent par la foi en moi le pardon des péchés et l'héritage avec les sanctifiés" (Actes 26:18). Cf. encore Matthieu 21:32; Luc 1:16; 22:32; Actes 9:35; 15:3.19; 1 Thessaloniciens 1:9; 1 Pierre 2:25.
Se convertir signifie faire demi-tour, changer de direction, revenir là où on aurait toujours dû rester, auprès de Dieu, en communion avec lui. Quand un homme se convertit à Dieu, tout change dans sa vie. Il n'adore plus d'idoles, ne vit plus dans les péchés des païens, se détourne du mal, met sa confiance en Dieu, marche dans la crainte du Seigneur. Tout cela présuppose un changement intérieur radical. Quelque chose a fondamentalement changé dans son coeur. Intérieurement il s'est détourné du mal qu'il a en horreur, et n'a plus qu'un désir: servir Dieu. Ce changement intérieur qui prélude à la conversion s'appelle la repentance. On comprend pourquoi Jean-Baptiste, puis le Christ, et enfin les apôtres ne cessèrent d'appeler à la repentance (Matthieu 3:11; Marc 1:4; Matthieu 4:17; 11:20 ss.; 18:3; Marc 1:15; Luc 13:3.5). Sans elle, il n'y a pas de conversion. Rien ne change dans la vie d'un homme, si rien n'a changé dans son coeur. Dans la 1° de ses 95 thèses sur les indulgences, Luther dit que la repentance est un acte de tous les jours. Tous les jours, en effet, le croyant reconnaît ses péchés, se tourne vers Dieu, les lui confesse et s'efforce de marcher devant sa face dans la foi, l'amour et l'obéissance.
La Bible compare la conversion à une nouvelle naissance. C'est ce qu'on appelle la régénération. Chaque fois qu'un homme se convertit à Dieu, il naît de nouveau. Le changement qui s'opère en lui est si radical qu'on peut dire qu'il est devenu un nouvel homme. "Si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu" (Jean 3:3). "Vous avez été régénérés non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu" (1 Pierre 1:23). Cf. encore Jean 1:12.13; Tite 3:5-7; 1 Jean 3:9.
Autre image, dont le sens est rigoureusement le même: la conversion est une résurrection spirituelle. Quand un pécheur se convertit, un homme ressuscite pour une vie nouvelle. "Dieu qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, nous qui étions morts par nos offenses, nous a rendus à la vie avec Christ. C'est par grâce que vous êtes sauvés. Il nous a ressuscités ensemble et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes en Jésus-Christ" (Ephésiens 2:4). Par le baptême nous sommes "ressuscités en lui et avec lui" pour une vie nouvelle (Colossiens 2:12.13).
La conversion est aussi une illumination. Les ténèbres de l'ignorance cèdent la place à la lumière du salut. L'apôtre compare la conversion au jaillissement de la lumière dans la création du monde, quand il écrit: "Dieu qui a dit: La lumière brillera du sein des ténèbres! a fait briller la lumière dans nos coeurs pour faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ" (2 Corinthiens 4:6). Il demande à Dieu d'illuminer le coeur de ses lecteurs (Ephésiens 1:18), lui que Dieu a choisi pour ouvrir les yeux des païens et les faire passer des ténèbres à la lumière (Actes 26:18).
Comment a lieu la conversion?
Dieu convertit l'homme, parce qu'il est "riche en miséricorde", "à cause du grand amour" dont il l'aime (Ephésiens 2:4). Saul le blasphémateur et le persécuteur de l'Eglise a été converti parce que Dieu lui a fait "miséricorde" (1 Timothée 1:13.14.16) et "grâce" (Galates 1:15).
L'appel au salut et la conversion sont ainsi des effets de la grâce divine. Le Seigneur convertit les hommes, parce qu'il n'accepte pas l'idée qu'ils périssent éternellement. L'homme ne peut revenir au Seigneur que si le Seigneur le fait revenir à lui: "Fais-nous revenir vers toi, ô Eternel, et nous reviendrons" (Lamentations 5:21). La conversion est donc l'oeuvre de Dieu, un don de sa grâce. C'est ce qu'affirment toutes les images employées pour la décrire (nouvelle naissance, résurrection spirituelle, illumination). On appelle cela le monergisme divin. Dieu agit seul quand il fait venir les hommes à lui et naître la foi dans leurs coeurs. L'homme ne peut pas coopérer à sa conversion. Croire en Christ, c'est tendre la main. Même cela, il ne peut le faire de lui-même. Il faut que Dieu la lui fasse tendre, sinon il ne la tendra jamais.
Pour convertir les hommes, Dieu se sert d'un moyen ou d'un instrument, l'Evangile dans la Parole et les sacrements. "La foi vient de ce qu'on entend, et ce qu'on entend vient de la parole de Christ", dit l'Ecriture (Romains 10:17). Nous avons été régénérés "non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu" (1 Pierre 1:23; Jacques 1:18). L'Evangile est une semence de vie: il fait jaillir la vie là où il n'y avait que mort spirituelle. La Bible a encore une autre façon, fort belle, de dire la même chose. Elle dit de Lydie, la marchande de pourpre: "Le Seigneur lui ouvrit le coeur, pour qu'elle soit attentive à ce que Paul disait" (Actes 16:14).
L'Evangile est moyen de salut, moyen par lequel Dieu offre le salut et donne aux hommes la grâce de le recevoir avec foi. C'est vrai de l'Evangile prêché, mais aussi de l'Evangile rendu visible dans les sacrements. Eux aussi sont des moyens par lesquels il offre le salut et fortifie dans la foi. C'est pourquoi le baptême, par exemple, est appelé "bain de la régénération" (Tite 3:5).
Quelques précisions:
La conversion est instantanée comme l'est une naissance ou une résurrection. Il faut parfois de longues années pour la préparer, mais le moment venu, elle se produit en un instant.
Tout en affirmant clairement que Dieu est l'auteur de la conversion, la Bible invite et appelle l'homme à se convertir, ce qui fait dire au prophète: "Fais-moi revenir, et je reviendrai, car tu es l'Eternel, mon Dieu" (Jérémie 33:18). "Fais-nous revenir vers toi, ô Eternel, et nous reviendrons" (Lamentations 5:21). Ce sont deux façons différentes et complémentaires de parler de la conversion. L'une souligne qu'elle est l'oeuvre de Dieu et l'autre rappelle qu'elle est une affaire qui engage l'homme personnellement.
La conversion est quelque chose d'instantané, mais en même temps de continu. C'est tous les jours que le chrétien se tourne, c'est-à-dire se convertit à Dieu. On appelle cela la conversion au sens large.
Enfin, la conversion peut se renouveler. Un homme régénéré par le Saint-Esprit peut à nouveau se détourner de Dieu, sombrer dans le péché et déchoir de la grâce. Mais il peut aussi, du moins tant qu'il n'est pas endurci, s'en repentir et revenir à Dieu. Il y a des gens qui "croient pour un certain temps et succombent au moment de la tentation", dit la parabole du semeur (Luc 8:13). Il y en a qui font "naufrage par rapport à la foi" (1 Timothée 1:19). Les prophètes n'ont fait qu'appeler à la repentance un peuple qui se détournait toujours de son Dieu (Ezéchiel 18:31.32; 31:11). Celui qui est "tombé" est appelé à se repentir (Apocalypse 2:5.16.21.22). Cependant il est impératif de rappeler qu'on ne joue pas avec la grâce. Personne n'a la certitude qu'il pourra se repentir après avoir renié son Dieu. A force de fermer son coeur à l'Evangile, on l'endurcit au point qu'une conversion peut devenir impossible. C'est ce qu'enseignent des textes comme Hébreux 6:4-8; 10:26.27. La grâce de Dieu est trop belle et trop précieuse pour qu'on puisse la mépriser impunément.
Questions de révision et exercices:
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1) Quel est le rapport entre la repentance et la conversion?
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2) Analysez Actes 26:17.18.
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3) Qu'est-ce que le monergisme divin?
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4) Vous paraît-il important ou indispensable de pouvoir dire à quel moment précis de votre vie vous avez été converti?
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5) Que répondre à ceux qui disent qu'on ne peut pas perdre la grâce et qu'on ne peut pas non plus se reconvertir?
4. LA JUSTIFICATION
"Nous enseignons ensuite que nous ne pouvons obtenir la rémission des péchés et la justice devant Dieu par notre mérite, nos oeuvres et nos satisfactions, mais que nous recevons la rémission des péchés et devenons justes devant Dieu par grâce, à cause du Christ et par la foi, si nous croyons que le Christ a souffert pour nous et que, grâce à lui, le pardon des péchés, la justice et la vie éternelle nous sont donnés. Car cette foi là, Dieu veut nous l'imputer à justice devant lui, comme saint Paul le dit aux Romains, chapitres 3 et 4" (Confession d'Augsbourg, Article IV).
L'enseignement de la Bible:
La doctrine de la justification est enseignée dans la Bible avec une telle clarté qu'on se demande comment l'Eglise a fait pour s'en détourner aussi vite et à tel point. Sans doute Satan connaissait-il l'enjeu et voulait-il ravir au peuple de Dieu le fondement de son salut.
Voici les textes les plus importants qui proviennent tous des épîtres de l'apôtre Paul: "Je n'ai point honte de l'Evangile: c'est la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec, parce qu'en lui est révélée la justice de Dieu par la foi et pour la foi, selon qu'il est écrit: Le juste vivra par la foi" (Romains 1:16.17). Longtemps Luther avait cru que la justice dont parle ce texte était celle par laquelle Dieu est juste en lui-même et exige le châtiment du coupable, jusqu'au jour où il comprit que la justice révélée dans l'Evangile est totalement différente de celle manifestée dans la Loi, qu'il s'agit de la justice que Dieu offre en Christ au pécheur repentant et croyant, de la justice du Christ dont il le recouvre dans sa grâce.
"Maintenant, sans la Loi est manifestée la justice de Dieu à laquelle rendent témoignage la loi et les prophètes, justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ pour tous ceux qui croient. Il n'y a point de distinction, car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu; et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. C'est lui que Dieu a destiné à être une victime propitiatoire pour ceux qui auraient la foi en son sang" (Romains 3:21-24). La justification est un acte de la grâce divine en faveur d'hommes pécheurs qui ne peuvent rien faire pour leur salut. Le salut leur est offert en Jésus-Christ qui a racheté le monde par son sang, et ils l'obtiennent par la foi en son nom.
"Abraham crut à Dieu et cela lui fut imputé à justice. Or à celui qui fait une oeuvre, le salaire est imputé non comme une grâce, mais comme une chose due. Mais à celui qui ne fait point d'oeuvre, mais qui croit en celui qui justifie l'impie, sa foi lui est imputée à justice... Heureux ceux dont les iniquités sont pardonnées et dont les péchés sont couverts! Heureux l'homme à qui le Seigneur n'impute pas son péché" (Romains 4:3-5.7.8). L'apôtre Paul cite deux textes de l'Ancien Testament concernant Abraham et David et montre, à l'aide de ces textes, que la justification est la non-imputation au croyant de ses péchés ou, ce qui revient au même, l'imputation de la justice du Christ. Et cela sans mérite.
"Sachant que ce n'est pas par les oeuvres de la Loi que l'homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ, nous aussi nous avons cru en Jésus-Christ, afin d'être justifiés par la foi en Christ et non par les oeuvres de la Loi, parce que nulle chair ne sera justifiée par les oeuvres de la Loi" (Galates 2:16). Ce texte oppose la foi aux oeuvres et affirme très clairement que la justification a lieu seulement par la foi en Christ. On pourra lire encore les passages suivants: Romains 5:1.2.9; Galates 3:8.11.24; Ephésiens 2:8.9; Philippiens 3:8.9; Tite 3:5-7.
Faisons quelques constatations. Il ressort de ces textes que la justification est un effet de la grâce divine. Cette grâce est le sentiment qu'inspire à Dieu la situation dans laquelle se trouve le pécheur, la miséricorde qui le pousse à venir à son secours. C'est elle qui l'incite à agir. Il ne nous justifie donc pas parce que nous en serions dignes ou que quelque chose en nous l'y inciterait, mais parce qu'il ne peut pas se résigner à ce que nous soyons condamnés. L'apôtre prend bien soin de préciser: "Si c'est par grâce, ce n'est plus par les oeuvres, autrement la grâce n'est plus une grâce. Et si c'est par les oeuvres, ce n'est plus une grâce, autrement l'oeuvre n'est plus une oeuvre" (Romains 11:6). L'Eglise catholique enseigne traditionnellement que la grâce de Dieu est une aide, une assistance qu'il procure à l'homme pour qu'avec elle il travaille à son salut. Selon cette doctrine qui est tout à fait fausse et dangereuse, la justification est le résultat de la coopération de l'homme avec Dieu et a lieu par la foi et les oeuvres. Le croyant doit s'en rendre digne par ses oeuvres et ses mérites.
Tous ces textes mentionnent Jésus-Christ. La justification n'a jamais lieu sans lui, mais est étroitement liée à l'oeuvre qu'il a accomplie par sa mort et sa résurrection. Le croyant est justifié par la foi en Christ, parce que celui-ci a payé sa dette et expié ses fautes. Sa justice lui est imputée, de sorte qu'il en est recouvert. C'est cela, le pardon: la non-imputation des péchés ou l'imputation de la justice de Jésus.
L'homme est justifié par la foi, dit la Bible. Cette foi, disait Luther, est la main que tend le mendiant pour recevoir une aumône. Si elle justifie, ce n'est pas parce qu'elle serait une sorte de vertu agréable à Dieu, mais parce qu'elle saisit le pardon et la justice du Christ. Il est vrai que la foi change l'homme et produit des oeuvres, mais ce n'est pas pour cela qu'elle justifie. La justification du pécheur a lieu en effet avant tout changement intérieur, par l'imputation au pécheur repentant et croyant de la justice de son Sauveur. Voilà pourquoi on peut dire aussi bien: "Jésus justifie le pécheur" que: "La foi justifie le pécheur".
Si la foi est une main tendue, le geste par lequel le pécheur perdu se réfugie auprès de Jésus-Christ, elle est, bien sûr, connaissance et assentiment, mais avant tout confiance. Elle est connaissance et assentiment, parce que pour être justifié il faut connaître l'Evangile, Jésus et son salut, et croire que les promesses divines sont vraies. Elle est confiance, parce qu'elle est la certitude que Jésus-Christ est mort pour moi, que son sacrifice a été parfait, qu'il a expié mes fautes et m'a réconcilié avec Dieu. Nul n'est donc sauvé simplement parce qu'il connaît les grandes affirmations de la Bible - les démons les connaissent aussi, dit Jacques! -, comme nul n'est sauvé par la foi d'un autre. Croire, c'est se jeter dans les bras de Jésus et accepter son salut d'un coeur humble et confiant: "Etant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, à qui nous devons d'avoir eu par la foi accès à cette grâce dans laquelle nous demeurons fermes, et nous nous glorifions de l'espérance de la gloire de Dieu" (Romains 5:1.2).
La théologie luthérienne enseigne encore que la foi n'est jamais seule, mais qu'elle justifie seule. Cela signifie que la vraie foi produit toujours des oeuvres, sinon elle serait morte, mais qu'elle justifie avant de les produire ou sans elles. De même qu'un corps sans respiration est mort, de même une foi sans oeuvres est morte (Jacques 2:26). Ce n'est pas la vraie foi en Jésus. C'est donc une foi qui ne sauve pas!
Enfin, comme nous l'avons vu, la justification a lieu en ce que Dieu couvre ou n'impute pas le péché ou bien, mais cela revient au même, en ce qu'il impute la justice du Christ. C'est la même chose ou, si on préfère, ce sont les deux aspects d'un même acte. L'un dit les choses négativement, l'autre le fait affirmativement. Il s'ensuit que ce qui rend le croyant juste devant Dieu, c'est la justice de son Sauveur, et s'il en est ainsi, il est par la foi entièrement juste, aussi juste que le Christ lui-même. Le verbe "justifier" est ce qu'on appelle un verbe causatif ou déclaratif. Il signifie "déclarer juste", "considérer comme juste", "prononcer juste". En un mot, "acquitter". Pour un juge, justifier un prévenu, c'est le déclarer non coupable, l'acquitter, prononcer un non-lieu. C'est exactement ce que Dieu fait au nom de son Fils. Le croyant étant recouvert de la justice de son Sauveur, il ne voit plus ses péchés et n'a donc plus aucune raison de le poursuivre de sa colère et de son châtiment. Bien des choses voudraient le condamner, mais elles ne le peuvent plus: "Qui accusera les élus de Dieu? C'est Dieu qui justifie. Qui les condamnera? Christ est mort. Bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu et il intercède pour nous" (Romains 8:33.34).
Questions de révision et exercices:
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1) Expliquez Philippiens 3:8.9 et montrez l'importance de cette doctrine pour l'apôtre Paul.
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2) Quels sont, dans la justification du pécheur, les rôles de la grâce, du Christ et de la foi?
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3) Est-il biblique de dire que l'homme est justifié "à cause de sa foi"?
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4) Que signifie dans la doctrine de la justification le mot "imputation"?
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5) Quelle est la différence entre non-imputation (ou pardon) des péchés et imputation de la justice du Christ?
Quelques précisions:
Le pécheur repentant qui est justifié par la foi en Jésus-Christ, passe instantanément de l'état de condamnation à celui de la grâce. Si, en le justifiant, Dieu l'acquitte et lui impute la justice du Christ ou, ce qui revient au même, l'en recouvre, il est à l'instant entièrement et parfaitement juste. Et cela, quel que soit son degré de sanctification. A la différence de l'Eglise catholique, le luthéranisme enseigne que la justification n'est pas un acte médicinal, une guérison progressive moyennant un changement continu dans l'homme, mais une sentence de grâce prononcée en sa faveur. Il est vrai que Luther mit un certain temps pour le comprendre, mais sa position à ce sujet finit par devenir très claire.
La Bible parle aussi d'une justification par les oeuvres. Jacques écrit: "Abraham, notre père, ne fut-il pas justifié par les oeuvres, lorsqu'il offrit son fils sur l'autel?... Vous voyez que l'homme est justifié par les oeuvres et non par la foi seulement" (Jacques 2:21.24). Dans la scène bien connue du jugement: "J'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger. J'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire..." (Matthieu 25:31-46), Jésus affirme nettement que les hommes seront jugés selon leurs oeuvres.
L'Ecriture se contredit-elle? Non, car il ne s'agit pas de la même chose. En exposant la doctrine de la justification, l'apôtre Paul explique comment le pécheur passe de l'état de condamnation à celui de la grâce, comment il trouve le pardon et le salut. Quand, au contraire, Jésus et Jacques parlent des oeuvres, ils veulent nous mettre en garde contre tout laisser-aller. La grâce de Dieu ne nous autorise pas à vivre dans le péché. D'ailleurs la foi chrétienne produit toujours les fruits que Dieu attend d'elle, même s'ils sont loin d'être aussi nombreux qu'ils pourraient l'être. Les oeuvres sont donc en quelque sorte les témoins de la foi: elles nous justifient aux yeux du monde, attestent que nous vivons dans la repentance et la foi et rendent gloire à Dieu.
Le chrétien est assuré de sa justification. L'Eglise catholique enseigne autre chose. Elle affirme qu'aucun croyant n'a la certitude d'être en état de grâce et, s'il mourait à l'instant, d'aller au ciel. Elle faisait même du doute une vertu et précisait que la certitude de la justification et du salut était le privilège d'une petite élite, de ceux qui coopèrent suffisamment avec la grâce de Dieu, accomplissent assez d'oeuvres et acquièrent assez de mérites pour aller à coup sûr au paradis.
L'Eglise luthérienne confesse, quant à elle, que le croyant peut être certain de sa justification et de son salut. Il y a deux raisons à cela: ce que le Christ a fait, il l'a fait pour tous les hommes, donc aussi pour lui. D'autre part, il l'a fait à la perfection et c'est suffisant pour son salut. Si par la foi en lui le pécheur est acquitté, absous, recouvert de son innocence et de sa justice, il a la certitude que plus rien ne peut le condamner et le séparer de Dieu. Abraham "ne douta point par incrédulité, au sujet de la promesse de Dieu, mais il fut fortifié par la foi, donnant gloire à Dieu et ayant la pleine conviction que ce qu'il promet il peut aussi l'accomplir" (Romains 4:26). "Les héritiers le sont par la foi, pour que ce soit par grâce, afin que la promesse soit assurée à toute la postérité" (Romains 4:16).
La certitude de la justification est tout sauf de l'orgueil. Dans le coeur du croyant, elle cohabite avec l'humilité la plus sincère et la foi plus confiante. Elle se fonde sur la suffisance et la perfection de l'oeuvre de Jésus-Christ, sur la fermeté des promesses divines, sur la conviction que la foi sauve parce qu'elle saisit le Christ et sur le témoignage intérieur du Saint-Esprit. Celui-ci en effet "rend lui-même témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers: héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ" (Romains 8:17).
La théologie luthérienne affirme que la justification du pécheur par la foi est l'article le plus important de la doctrine chrétienne, celui grâce auquel l'Eglise subsiste ou avec lequel elle s'effondre. C'est pour la pureté de cette doctrine que le Réformateur Martin Luther s'est battu pendant toute sa vie. Rien ne lui était plus précieux, à lui qui savait s'analyser et qui avait une conscience si nette de ses péchés, que l'affirmation que le pécheur est justifié par grâce, par la foi en Jésus-Christ. C'était pour lui la source de toute consolation et de toute certitude. Voici ce qu'il écrit à ce sujet:
"Dans cet article, il ne faut céder et renoncer à rien, faute de quoi le ciel et la terre et tout ce qui ne veut pas subsister, s'écroulera. Car, dit Pierre (Actes 4), aucun autre nom n'a été donné aux hommes par lequel nous devions être sauvés, et par ses meurtrissures nous sommes guéris (Esaïe 53). Tout repose sur cet article, tout ce que nous enseignons et vivons contre le pape, le diable et le monde. Il faut donc qu'en cela nous soyons sûrs de nous, sinon tout est perdu, le pape, le monde et tout ce que vous voudrez remporteront la victoire et auront raison" (Articles de Smalcalde, I, 1, 5).
Questions de révision et exercices:
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1) Pourquoi la justification est-elle instantanée et non progressive?
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2) Luther a dit que le croyant était à la fois "entièrement pécheur" et "entièrement juste". Expliquez cela.
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3) Pourquoi disons-nous que la doctrine de la justification est la plus importante de toute la Bible et qu'est-ce que cela signifie pour la prédication et la cure d'âme?
5. LA SANCTIFICATION
L'enseignement de la Bible:
La sanctification fait suite à la justification. Elle est l'acte permanent par lequel le pécheur pardonné et justifié renonce chaque jour, par amour, gratitude et obéissance envers Dieu, au péché, crucifie le vieil homme, se renouvelle selon l'image de Dieu et vit à sa gloire dans la sainteté et la justice. Elle est une oeuvre que Dieu dans sa grâce accomplit par la Parole et les sacrements. Cette définition montre toute la différence existant entre la justification et la sanctification.
Dieu dit à son peuple: "Soyez saints, car je suis saint, moi l'Eternel, votre Dieu" (Lévitique 19:2; 1 Pierre 1:16). Les chrétiens sont saints en ce sens que Dieu les a mis à part pour le servir. Pardonnés et justifiés par la foi, ils lui appartiennent et sont donc appelés à vivre saintement pour le glorifier. La Bible dit les deux: "Vous êtes saints" (Psaume 16:3; 34:10; 89:6; Romains 8:27; 12:13; Ephésiens 1:18; 2:19; 1 Pierre 2:9) et: "Soyez saints" (Ephésiens 1:4; 5:27; 1 Pierre 1:15.16; 2 Pierre 3:11).
Le verbe "sanctifier" et le substantif "sanctification" sont employés dans la Bible de deux façons. Tantôt ils désignent, dans un sens large, tout ce que Dieu fait pour sauver les hommes (il les appelle la foi, les fait grandir et persévérer en elle, leur donne la volonté et la force de marcher dans la sainteté et leur accorde la victoire finale). Tantôt ils sont employés dans un sens plus restreint et désignent la vie chrétienne. Quand la Bible dit des chrétiens qu'ils sont "sanctifiés", sans ajouter d'autres précisions (Hébreux 2:11; 10:11.14.29), elle veut sans doute dire que Dieu les a mis à part pour qu'ils lui appartiennent et le servent. Quand par contre elle nous demande de nous sanctifier pour que nous soyons purs et irréprochables, de rechercher la sainteté, en renonçant à tout ce qui est mauvais (Romains 6:19.22; 1 Thessaloniciens 4:3-7; 5:23), elle parle de la sanctification au sens strict du terme, c'est-à-dire de la vie chrétienne de ceux qui ont été pardonnés et justifiés par la foi.
C'est dans ce dernier sens qu'il sera question de sanctification dans ce chapitre. Voici quelques textes qui montrent en quoi elle consiste: "Que le Dieu de paix vous sanctifie lui-même tout entiers, et que tout votre être, l'esprit, l'âme et le corps, soit conservé irrépréhensible lors de l'avènement de notre Seigneur Jésus-Christ" (1 Thessaloniciens 5:23). "Ce que Dieu veut, c'est votre sanctification... Que chacun de vous sache posséder son corps dans la sainteté et dans l'honnêteté... Dieu ne nous a pas appelés à l'impureté, mais à la sanctification" (1 Thessaloniciens 4:3-7).
La Bible présente la sanctification sous un double aspect: elle consiste pour le chrétien à se "dépouiller du vieil homme" et à "revêtir l'homme nouveau". Deux textes de l'apôtre Paul la décrivent dans le détail: "C'est en lui (Jésus) que vous avez été instruits à vous dépouiller, par rapport à votre vie passée, du vieil homme qui se corrompt par les convoitises trompeuses, à être renouvelés dans l'esprit de votre intelligence et à revêtir l'homme nouveau créé selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité" (Ephésiens 4:21-24). "Ne mentez pas les uns aux autres, vous étant dépouillés du vieil homme et de ses oeuvres et ayant revêtu l'homme nouveau qui se renouvelle, dans la connaissance, selon l'image de celui qui l'a créé... Ainsi donc, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, revêtez-vous de sentiments de compassion, de bonté, d'humilité, de douceur, de patience" (Colossiens 3:9.10.12).
Se dépouiller du vieil homme, c'est crucifier la chair, c'est-à-dire renoncer à notre ancienne nature, à tout ce qui marque la vie de l'homme avant que le Saint-Esprit l'ait régénéré. C'est dire non au péché et au mal qui déplaisent à Dieu, se détourner de toute forme d'injustice, parce qu'il l'a en horreur. Positivement, c'est rechercher le bien, s'appliquer à la justice et la sainteté, vivre dans l'amour, la bonté, la patience. En un mot, c'est, pour le chrétien, faire tout ce qui est en son pouvoir pour plaire à son Seigneur. Ainsi il renaît petit-à-petit à l'image de Dieu à laquelle il avait été créé à l'origine.
La sanctification est donc quelque chose de progressif et de continu dans la vie du chrétien, un combat qu'il est appelé à mener chaque jour et qui ne s'achève que lorsqu'il meurt dans la foi. L'apôtre Paul reconnaît en lui deux lois ou deux hommes qui se font la guerre, si bien qu'il ne fait pas le bien qu'il aimerait faire et fait le mal qu'il ne voudrait pas faire (Romains 7:15-25). Faisant écho à cet enseignement de l'Ecriture Sainte, Martin Luther écrit dans le Petit Catéchisme que "le vieil homme qui est en nous doit être noyé dans une contrition et une repentance de tous les jours, qu'il doit mourir avec tous ses péchés et ses convoitises, et que tous les jours aussi doit renaître en nous un homme nouveau qui vive à jamais dans la justice et la pureté devant Dieu".
Questions de révision et exercices:
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1) Que signifient les expressions "vieil homme" et "nouvel homme"?
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2) Montrer à l'aide d'Ephésiens 4:21-24 et Colossiens 3:9-12 en quoi consiste la sanctification du chrétien.
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3) Quelles sont les différences entre la justification et la sanctification?
Quelques précisions:
D'où vient la sanctification? La Bible dit: "Soyez saints" (Lévitique 19:2). "Livrez vos membres comme esclaves à la justice" (Romains 6:19). "Que chacun de vous sache posséder son corps dans la sainteté" (1 Thessaloniciens 4:4). Elle parle donc à l'impératif, comme lorsqu'elle appelle à la repentance: "Repentez-vous", "Convertissez-vous", "Crois au Seigneur Jésus". Mais elle dit aussi: "Que le Dieu de paix vous sanctifie tout entiers... Celui qui vous a appelés est fidèle, et c'est lui qui le fera" (1 Thessaloniciens 5:23.24). "C'est Dieu qui produit en nous le vouloir et le faire, selon son bon plaisir" (Philippiens 2:13). "Que le Dieu de paix vous rende capables de toute bonne oeuvre pour l'accomplissement de sa volonté et fasse en vous ce qui lui est agréable en Jésus-Christ" (Hébreux 13:21).
L'homme naturel est incapable de se sanctifier. Il aime le péché, fuit Dieu et rejette sa volonté. Pour y prendre plaisir et l'accomplir, il faut un coeur nouveau, celui que Dieu donne à l'homme quand il le convertit et le régénère. La sanctification n'est pas pour une moitié l'oeuvre de Dieu, et pour l'autre celle de l'homme, mais elle est l'oeuvre que le Seigneur accomplit dans la vie du croyant en recourant au coeur nouveau qu'il lui a donné. Ce coeur nouveau affectionne le bien et désire plaire à Dieu. Aussi ce dernier s'adresse-t-il à lui, fait-il appel à lui, le sollicite-t-il et donne-t-il en même temps au croyant les forces dont il a besoin pour vivre saintement. "Un homme ne peut recevoir que ce qui lui a été donné", disait Jésus (Jean 3:27). "Qu'as-tu que tu n'aies reçu?", demande Paul (1 Corinthiens 4:7). David, conscient de ses faiblesses, dit au Seigne
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Par lutherien le 26 Novembre 2009 à 16:36
JESUS-CHRIST: SA PERSONNE ET SON OEUVRE
"Je crois que Jésus-Christ, vrai Dieu, né du Père de toute éternité, vrai homme, né de la vierge Marie, est mon Seigneur. Il m'a racheté, moi perdu et condamné, en me délivrant du péché, de la mort et de la puissance du diable. Non point à prix d'or ou d'argent, mais par son saint et précieux sang, par ses souffrances et sa mort innocentes, afin que je lui appartienne et que je vive dans son Royaume, pour le servir éternellement dans la justice, dans l'innocence et la félicité, comme lui-même, étant ressuscité des morts, vit et règne éternellement. C'est ce que je crois fermement" (Martin Luther, Petit Catéchisme).
Le chapitre qui parle de Jésus-Christ, de sa personne et de son oeuvre, s'intitule la christologie. C'est de loin le plus important et aussi le plus beau et le plus consolant de la doctrine chrétienne. Il est unique en son genre et fait toute la différence entre le christianisme et toutes les autres religions du monde. Il montre comment Dieu a décidé de réparer lui-même le mal commis par les hommes et de les délivrer du péché, de la mort et de la condamnation éternelle qu'ils ont méritée.
Le christianisme est en effet la seule religion du monde qui enseigne que Dieu lui-même, en la personne de son Fils Jésus-Christ, s'est fait homme pour racheter les hommes, et que le pardon et le salut s'obtiennent par la foi en lui, sans aucune oeuvre ni mérite. Tel est le message de l'Evangile, mot qui signifie "bonne nouvelle". La Bible dit qu'il est une "puissance de Dieu pour le salut" (Romains 1:16). Il fait naître la foi dans le coeur, le transforme radicalement et procure à l'homme qui se sait ainsi pardonné et sauvé la paix, la joie, la certitude de la vie éternelle et le sincère désir de servir Dieu.
1. JESUS DE NAZARETH, LE MESSIE PROMIS
Celui que les prophètes ont annoncé:
Jésus de Nazareth était attendu. Zacharie, le père de Jean-Baptiste, Marie et Joseph, les bergers de Bethléhem, Siméon et Anne, Jean-Baptiste et tous les pieux Juifs de l'époque, sans oublier des païens comme les mages l'attendaient. C'est que les prophètes avaient prédit sa venue. Déjà dans le jardin d'Eden Dieu avait annoncé que la "postérité de la femme" triompherait de Satan et délivrerait l'humanité (Genèse 3:15). Puis le Seigneur promit à Abraham une postérité en qui seraient bénies toutes les nations de la terre (Genèse 12:7; 18:18; 28:14). Il est Emmanuel, Dieu avec nous (Esaïe 7:14; 9:5.6), le Serviteur de l'Eternel venu pour le salut de son peuple (Esaïe 52:13-53:12), le Fils de David au règne éternel (2 Samuel 7:4-16; Psaume 2:7; 110:3; Esaïe 11), le Fils de l'homme à la domination universelle (Daniel 7:13.14), le prophète semblable à Moïse qu'il s'agit d'écouter (Deutéronome 18:15-20), et sans doute aussi ce personnage mystérieux que l'Ancien Testament appelle l'ange (ou plutôt l'envoyé) de l'Eternel (Genèse 16:7-14; 18:19; 22:11-18; cf. Esaïe 63:8.9).
Il existe dans l'Ancien Testament bien des figures annonciatrices de Jésus-Christ. Son oeuvre a été préfigurée par Adam (Romains 5:12-21; 1 Corinthiens 15:20-22), par le grand prophète Moïse (Deutéronome 18:15-20) et par le fidèle serviteur de Dieu qu'a été, malgré ses erreurs et ses péchés, le grand roi David.
On peut dire à juste titre que l'Ancien Testament, comme le Nouveau, est rempli du Christ. C'est une grave erreur de le rejeter comme le "livre des Juifs". Il est riche en enseignements divers et montre notamment comment Dieu a accompli les promesses qu'il avait faites à Abraham, Isaac et Jacob, et à tout le peuple issu des patriarches. Il est un monument de la fidélité du Seigneur qui a tenu parole, malgré toutes les désobéissances de son peuple. En cela, l'histoire d'Israël est la préfiguration de l'histoire de l'Eglise chrétienne. Négliger de lire et de méditer l'Ancien Testament, c'est passer à côté de grandes richesses. Il est vrai que le message du Nouveau Testament est plus clair et plus complet, parce qu'il atteste l'accomplissement des promesses divines, mais on méconnaît beaucoup de choses dans le Nouveau Testament si on ignore l'Ancien.
Les titres de Jésus:
Les titres de Jésus sont significatifs, car ils le décrivent dans sa personne et son oeuvre. Ils contiennent tout un enseignement. Les plus courants sont les suivants:
Jésus:
C'est le nom que Dieu lui-même lui a donné quand il envoya son ange annoncer sa naissance à Joseph (Matthieu 1:21), la forme grecque d'un nom araméen (Yeschuah) provenant de l'hébreu, qui signifie "Yahvé, sauve!"
Christ:
Il faudrait dire "le Christ", titre qui provient de la traduction en grec du mot hébreu rendu par Messie qui veut dire l'oint. On avait l'habitude d'oindre avec une huile sainte les sacrificateurs, les rois et parfois les prophètes. Jésus a été symboliquement oint par Dieu, c'est-à-dire mis à part et rempli du Saint-Esprit pour être notre Prophète, notre Sacrificateur et notre Roi (Psaume 2:2; 45:7; Esaïe 11:2; 61:1; Actes 4:27; 10:38). En un mot, tout ce qu'il a fait pour nous et qu'il continue de faire, il le fait en tant qu'Envoyé de Dieu (Matthieu 10:40; Jean 4:34; 5:23.24; 6:29).
Fils de David:
Jésus n'est pas seulement un descendant de David comme tant d'autres, comme le prouve son arbre généalogique (Matthieu 1:6), mais il est son fils par excellence (Matthieu 1:1). On l'invoque et l'acclame comme tel (Matthieu 9:27; 15:22; 20:30.31; 21:9). Il est en effet le Fils promis à David. Son règne universel, glorieux et éternel a été préfiguré par celui de David. Il en est le prolongement dans l'éternité.
Fils de l'homme:
C'est le titre que Jésus avait l'habitude de se donner (Matthieu 16:27.28; 17:22; 20:18.19.28; Jean 6:27.53.62). Il affirme à la fois qu'il est vrai homme et le Messie promis et attendu (Daniel 7:13.14), qui reviendra un jour dans la gloire pour juger le monde entier et délivrer son peuple (Matthieu 24:30; 25:31).
Seigneur:
"Kurios", en grec. Rarement employé à propos de Jésus tant qu'il était sur terre, le titre lui est régulièrement attribué par les apôtres après son ascension (Actes 2:36; 1 Corinthiens 12:3; Philippiens 2:11). Quand on sait que "kurios" traduit l'hébreu Yahvé ou Jéhovah, appliquer ce titre à Jésus-Christ revenait, de la part des apôtres, à confesser sa divinité et à le considérer comme l'égal du Père. C'est ce que font les chrétiens, en même temps qu'ils l'acclament comme leur Seigneur et leur Roi.
Questions de révision et exercices:
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1) Essayez de citer de mémoire trois prophéties messianiques.
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2) En quoi Moïse et David préfiguraient-ils le Christ?
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3) Pourquoi pensez-vous qu'un texte comme Esaïe 52:13-53:12 parle de Jésus et non d'un autre?
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4) Que nous apprend la lecture de l'Ancien Testament?
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5) Pourquoi à votre avis, si Jésus est annoncé dans l'Ancien Testament, le peuple d'Israël l'a-t-il dans sa grande majorité rejeté?
2. QUI EST JESUS?
Jésus, tel qu'il est apparu aux hommes:
Avant d'étudier ce que la Bible nous dit de la personne de Jésus-Christ, avant de parler de sa divinité pour passer ensuite à l'étude de son humanité, essayons de brosser le tableau succinct du personnage tel qu'il s'est présenté à son peuple et qu'il a été salué par les croyants d'Israël. C'est répondre à la question: Comment a vécu Jésus et qu'a-t-il fait? Nous commencerons donc, pour reprendre les termes de Martin Luther, par en bas et remonterons vers le haut.
Le Réformateur écrit:
"L'Ecriture commence très doucement. Elle nous conduit d'abord chez un homme, le Christ, puis chez celui qui est le Seigneur de toutes les créatures, enfin chez celui qui est Dieu. Je suis ainsi conduit de façon agréable et j'apprends à connaître Dieu. Mais les philosophes et docteurs ont voulu à tout prix commencer par en haut. Nous commençons en bas, puis nous remontons progressivement".
En l'an 27 ou 28 de notre ère, Jean-Baptiste, un prophète à l'ancienne, accoutré comme Elie, attire les foules sur les rives du Jourdain et leur prescrit le baptême de la repentance, en vue d'accueillir celui dont il prépare la voie, Yeschuah de Nazareth, dont les évangiles nous disent qu'il est né à Bethléhem, dans une étable. Ce Jésus acquiert rapidement une popularité considérable qui alertera en peu de temps le parti des pharisiens et finira par émouvoir les autorités romaines soucieuses de maintenir la paix en ce coin turbulent de l'empire. Il prêche "avec autorité et non pas comme les scribes" (Matthieu 7:29). Il fonde son enseignement sur une référence constante à la loi et aux prophètes, proclame le Royaume de Dieu et accomplit des prodiges et des miracles. Sa doctrine soulève protestations et indignation. Il procède à une interprétation de la Loi fondamentalement différente de celle qui avait cours en Israël. Jésus formule des exigences absolues, éclate en indignations foudroyantes, fulmine contre l'hypocrisie et l'injustice. Cette prise à partie de l'élite religieuse d'Israël (pharisiens, scribes, sadducéens) ne l'empêche pas de faire preuve d'une compréhension et d'une miséricorde inconcevables à l'égard des parias, de ceux qui sont tombés au plus bas de l'échelle sociale et religieuse. Il accepte l'hommage d'une prostituée, mange en compagnie des escrocs, ouvre le ciel à un brigand. Partout où on l'implore avec foi, il guérit des malades et délivre des démoniaques. Il a même ressuscité des morts. Soulager, consoler, sécher les larmes, rendre l'espoir à ceux qui n'en ont plus, telle est sa mission. Il enseigne en même temps que le véritable accomplissement de la Loi ne consiste pas dans la simple exécution de quelques rites religieux ni dans une justice purement extérieure, mais dans l'obéissance réelle et l'amour sincère de Dieu et du prochain. Jésus a demandé qu'on aime ses ennemis, qu'on bénisse ceux qui vous maudissent et qu'on réponde au mal par le bien. Il en a donné en même temps l'exemple. Mais lui qui se proclame doux et humble de coeur (Matthieu 11:29) ose se dire plus grand que Jonas (Matthieu 12:41), plus grand que le plus grand des rois d'Israël (Matthieu 12:42), plus grand que Jacob et Abraham (Jean 4:12; 8:53). Il se dit le plus grand "parmi ceux qui sont nés de femmes" (Matthieu 11:11). Il s'élève au-dessus du temple de Dieu lui-même (Matthieu 12:6).
Ce qui distingue Jésus des prophètes et docteurs d'Israël, c'est la manière dont il se présente aux foules et enseigne. Certes, on avait l'habitude en Israël d'entendre des hommes parler sur l'ordre de Dieu et revêtus de son autorité. Les prophètes agissaient ainsi et revendiquaient cette autorité, quand ils disaient: "Ainsi parle l'Eternel", "Oracle de l'Eternel", "La main de l'Eternel fut sur moi", etc. Et quoique beaucoup de Juifs aient été convaincus que l'époque prophétique était révolue depuis la mort du dernier d'entre eux, Malachie, on attendait la venue d'un grand prophète, celui dont Moïse avait parlé (Deutéronome 18:15). On demanda à Jean-Baptiste s'il ne l'était pas (Jean 1:21). Cependant, le prophète n'a pas la Parole de Dieu en lui, de sorte qu'elle serait sa parole; au contraire, elle vient à lui. Il la reçoit et la retransmet. En la prêchant, il s'efforce de mettre ses auditeurs en relation avec Dieu et non avec lui-même. En un mot, il est le représentant de Dieu et non Dieu lui-même.
Quant au rabbi ou docteur, il lui faut être encore plus modeste que le prophète. Il ne parle pas au nom de Dieu et ne dit pas: "Ainsi parle l'Eternel", mais: "Voilà ce qu'enseigne la Loi". Or Jésus n'a jamais parlé de la sorte. Il n'a utilisé aucune des formules propres aux prophètes et aux docteurs de la Loi, mais opposait son Moi personnel à toute la tradition rabbinique, allant jusqu'à réinterpréter la Loi et la violer, au moins extérieurement (sabbat), quand elle faisait l'objet d'une mauvaise interprétation. Il a eu aussi cette formule significative, gage de son autorité divine: "Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens... Mais moi je vous dis..." (Matthieu 5:21-44), son majestueux: "En vérité, en vérité, je vous le dis" (Matthieu 5:16; 8:10; 10:15.23.42; Jean 1:51: 3;3; 5:19.24.25; 6:26.32.47.53, etc.), et son tout aussi majestueux: "C'est moi" (Matthieu 14:27; Marc 6:50; Jean 4:26; 6:20;8:12; 10:7; 11:25; 15:1, etc.). Il enseignait avec autorité, et non comme les scribes. A la différence des prophètes, il disait non pas: "Ainsi parle le Seigneur", mais: "Moi je vous dis". Alors que les prophètes prêchaient Dieu, il s'annonçait lui-même et invitait les gens à venir à lui, à croire en lui et à le suivre. Il était à la fois sujet et objet de sa prédication, quand il disait par exemple: "Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés", "Suis-moi", "Nul ne vient au Père que par moi", "Je suis le chemin, la vérité et la vie", "Je suis la lumière du monde", "Je suis la résurrection et la vie". Et si des Juifs étaient prêts à mourir pour Dieu ou pour la Loi, il demandait à ceux qui le suivaient d'être prêts à subir le martyre pour lui.
Enfin, Jésus accomplit des miracles sans invoquer Dieu à la manière des prophètes. Il n'a pas besoin que Yahvé le mandate pour réaliser un prodige, mais le fait de sa propre autorité. Bref, il apparaît dans des rôles et assume des fonctions dont on n'avait pas l'habitude en Israël. Prophète, docteur, thaumaturge? Il était tout cela à la fois, et en même temps beaucoup plus que cela.
C'est aussi comme Roi-Messie qu'il fut acclamé à son entrée dans Jérusalem. Jésus a bel et bien élevé une prétention à la royauté messianique, en répondant au souverain sacrificateur: "Tu l'as dit: Je le suis!" (Matthieu 26:64; 27:11). En fait, il ne veut pas endosser la conception courante du Messie que les foules avaient tendance à projeter sur lui. Il faut d'abord qu'il meure pour son peuple et pour le monde, pour qu'il n'y ait plus de malentendu sur sa mission messianique. Il est le Messie, mais pas le Messie attendu par un Israël qui s'est détourné de la Parole de Dieu et qui rêve de gloire et de grandeur. Il est le Messie serviteur qui se sacrifie pour le pardon et le salut de son peuple et des hommes du monde entier. Son royaume "n'est pas de ce monde" (Jean 18:36). Il est celui qu'on attend, mais pas tel qu'on l'attend!
La preuve: il va mourir sur une croix, tel un malfaiteur, au grand scandale d'Israël. Plutôt que de croire en sa divinité, on l'accusera de blasphémer. Mais sa résurrection balaiera l'énigme autour de son personnage et mettra fin à tout malentendu. Elle est formellement le signe de l'approbation divine. Jésus a été exécuté à l'issue d'un procès: son peuple voulait sa mort, parce qu'il s'était fait Fils de Dieu. Mais en le ressuscitant des morts, Dieu, le Juge souverain, casse le verdict inique d'Israël et lave le Christ des accusations lancées contre lui. Il est bel et bien le Messie, Fils de Dieu. De plus, il a accompli la mission que le Père lui avait confiée et vaincu le péché, la mort et l'enfer. Il est "la résurrection et la vie" (Jean 11:25.26). Ressuscité des morts, il ne meurt plus. Il est le Prince de la vie et du salut (Actes 3:15; Hébreux 2:10), les prémices de la nouvelle création (Colossiens 1:15.18; Hébreux 1:6), le chef de l'humanité nouvelle qui a reçu de Dieu les pleins pouvoirs dans le ciel et sur la terre (Matthieu 28:18; cf. Daniel 7:14). Dieu l'a fait Seigneur et Christ (Actes 2:36). Il n'est pas devenu Fils de Dieu en ressuscitant des morts, mais parce qu'il était Fils de Dieu, Dieu l'a ressuscité et lui a donné la domination sur toutes choses. Il lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin que tout genou fléchisse devant lui (Philippiens 2:5-11) et qu'il soit adoré comme "le Christ qui est au-dessus de toutes choses, Dieu béni éternellement" (Romains 9:5). Les apôtres sont unanimes à proclamer qu'il est Rédempteur du monde (Romains 3:25.26; 1 Pierre 1:18-21; 1 Jean 1:7; 2:1.2; Apocalypse 5:9.10; 7:14).
Questions de révision et exercices:
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1) En quoi l'autorité avec laquelle Jésus prêchait était-elle différente de celle des prophètes et des apôtres?
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2) Comment Jésus se situait-t-il par rapport à l'Ancien Testament et quel était le contenu de son message?
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3) En quoi était-il différent des docteurs, scribes et pharisiens de son époque?Ê
Jésus, vrai Dieu:
La Bible enseigne que Jésus est le Fils de Dieu: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant" (Matthieu 16:16). "Quand les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils" (Galates 4:4). Jésus lui-même se dit le Fils de Dieu dans ce texte bien connu: "Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle" (Jean 3:16). Cf. encore Romains 1:1-4; Hébreux 1:2, et beaucoup d'autres textes du même genre.
Si Jésus est Fils de Dieu, il est vrai Dieu, de la même façon que le Père ou le Saint-Esprit. Il possède donc ce qu'on appelle la nature divine, c'est-à-dire tout ce qui fait que Dieu est Dieu, ce qui le distingue radicalement des anges, des hommes et de toutes les créatures. Les Témoins de Jéhovah, reprenant une hérésie ancienne, admettent volontiers qu'il est Fils de Dieu, mais soutiennent qu'il n'est pas pour autant vrai Dieu. Ils font de lui un être intermédiaire entre Dieu et les anges. C'est une fausse doctrine. En effet l'Ecriture elle-même appelle Jésus Dieu: "Un enfant nous est né, un fils nous est donné, et la domination reposera sur ses épaules. On l'appellera Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père éternel, Prince de la paix" (Esaïe 9:5). "Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu" (Jean 1:1). "Mon Seigneur et mon Dieu", s'exclama Thomas en voyant le Christ ressuscité (Jean 20:27). Jésus se considérait comme l'égal de Dieu (Jean 5:18; Philippiens 2:5.6). L'apôtre Paul l'appelle "Dieu béni éternellement" (Romains 9:3-5) et déclare qu'en lui "habite corporellement toute la plénitude de la divinité " (Colossiens 2:9). Cf. encore Psaume 45:7; Hébreux 1:8.
Enfin, d'innombrables textes appellent Jésus Seigneur, lui conférant un titre que l'Ancien Testament réservait à Dieu: "Sanctifiez dans vos coeurs Christ le Seigneur" (1 Pierre 3:15). Toute langue doit confesser que "Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père" (Philippiens 2:11). C'est ce qui lui permet de dire que le Père et lui sont un (Jean 10:30), que le Père est en lui et qu'il est dans le Père (Jean 10:38), qu'il accomplit les mêmes oeuvres que le Père (Jean 5:17.19). L'apôtre précise encore qu'il est égal à Dieu (Philippiens 2:6).
Aussi Jésus a-t-il les mêmes qualités ou propriétés que le Père. Comme lui, il est antérieur à Abraham (Jean 8:58), dès le commencement, c'est-à-dire éternel (Jean 1:1; 17:24). Comme lui, il sait toutes choses (Jean 16:30; 21:17), est tout-puissant (Matthieu 28:18), peut s'assujettir toutes choses (Philippiens 3:21), domine sur tout (Daniel 7:13.14; Esaïe 9:5). Comme son Père, il accomplit des oeuvres divines (Jean 5:17.19). Il a participé à la création du monde (Jean 1:3; Colossiens 1:17), ressuscite les morts et donne la vie (Jean 5:21.28; 11:25.26), est le juge des vivants et des morts (Jean 5:27), autant d'oeuvres que Dieu seul peut faire.
Si Jésus est vrai Dieu, il a droit à l'adoration. Il veut être vénéré, invoqué, adoré: "Que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père. Celui qui n'honore pas le Fils n'honore pas le Père qui l'a envoyé" (Jean 5:23). "Que tous les anges de Dieu l'adorent" (Hébreux 1:6). "A celui qui est assis sur le trône et à l'Agneau soient la louange, l'honneur, la gloire et la force aux siècles des siècles" (Apocalypse 5:13).
La doctrine de la divinité du Christ a fait de tout temps l'objet de nombreuses attaques. Dès les débuts, l'Eglise chrétienne dut se défendre contre ceux qui niaient que Jésus était vrai Dieu. Certains enseignaient qu'il n'était qu'un homme, mais un homme dans lequel Dieu agit avec puissance ou bien un homme dont la volonté s'identifia à ce point avec celle de Dieu que celui-ci l'adopta comme son Fils. D'autres soutenaient que Dieu ne s'était pas réellement incarné en Jésus de Nazareth, mais qu'il s'était étroitement lié à lui jusqu'au moment de la mort où il le quitta. Tel autre affirmait qu'il était un être mi-humain et mi-divin que Dieu avait créé avant la fondation du monde. L'Eglise chrétienne dut réagir contre toutes ces erreurs. Elle le fit notamment dans un texte mémorable, le Symbole de Nicée (325), qui figure parmi les confessions de foi de l'Eglise luthérienne:
"Je crois ... en un seul Seigneur, Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles, Dieu né de Dieu, Lumière de Lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, qui n'a pas été fait mais engendré, qui est de même substance que le Père et par qui toutes choses ont été faites...".
De nos jours encore, de nombreux théologiens refusent de croire en la divinité de Jésus. Et si on en croit les sondages d'opinion, il en va de même d'innombrables "chrétiens". Mais on ne peut pas être chrétien, si on ne croit pas cela. Non seulement parce que la Bible l'enseigne très clairement, mais aussi parce que c'est un article de foi fondamental dont dépend le salut tout entier de l'homme. Il a fallu que Jésus soit vrai Dieu pour accomplir la mission qui lui était confiée et racheter le monde. S'il n'avait été qu'un homme, même un super-homme, jamais il n'aurait pu être sans péché et parfaitement juste, et sa mort aurait été tout simplement celle d'un martyr. Elle n'aurait pas eu le pouvoir de nous réconcilier avec Dieu et de nous acquérir le pardon et la vie éternelle. Satan sait ce qu'il fait, quand il incite les ennemis du christianisme, ceux du dehors et ceux du dedans, à nier ou mettre en doute la divinité de Jésus-Christ. En agissant ainsi, il ravit aux hommes la certitude du salut.
Jésus, vrai homme:
Il ne suffit pas à Jésus-Christ d'être Dieu pour sauver les hommes. Encore faut-il qu'il soit homme comme eux, qu'il devienne leur frère pour agir, souffrir et mourir à leur place. Nous disons qu'il possède la nature humaine parce qu'il a tout ce qui fait d'un homme un homme. Jésus est homme, comme le dit l'apôtre: "Nous avons un seul Dieu et un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme" (1 Timothée 2:8). Il s'est lui-même appelé constamment le Fils de l'homme, rendant ainsi témoignage à son humanité véritable: "Qui dit-on que je suis, moi le Fils de l'homme?" (Matthieu 16:13)? "Le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu" (Luc 19:10). "Le Fils de l'homme est venu non pour se faire servir, mais pour servir et donner sa vie comme la rançon de beaucoup" (Matthieu 20:28).
Comme tous les hommes, il possède un corps (Jean 2:21; Matthieu 26:26.28), une âme (Matthieu 26:38), un esprit (Luc 23:46), une volonté humaine (Luc 22:42). Il est "chair et os" (Luc 24:39). Il connaît la faim, la fatigue, la peur, la tristesse et la joie. Il connaît aussi tous les sentiments des hommes.
Vraiment tous? En tout cas tous ceux qui sont justes et louables. En effet, à la différence de ses frères les hommes, Jésus est sans péché. "Qui de vous me convaincra de péché?" pouvait-il dire à ses adversaires (Jean 8:46). Il "n'a point commis de péché" (1 Pierre 2:22; Hébreux 4:15), "n'a point connu le péché" (2 Corinthiens 5:21). Il a été "un agneau sans défaut et sans tache" (1 Pierre 1:18.19), "un souverain sacrificateur saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs" (Hébreux 7:26). C'est une vérité capitale. En effet, si Jésus était né dans le péché, s'il avait hérité du péché originel et fait le moindre mal pendant sa vie, il n'aurait pas accompli la Loi à notre place et n'aurait pas pu nous racheter par son obéissance parfaite. Nous n'aurions donc aucune certitude du salut.
Deuxième différence entre Jésus et les autres hommes, qui explique la première: Il n'est pas issu d'un mariage ni même le fruit de relations sexuelles entre un homme et une femme, mais a été conçu par le Saint-Esprit dans le sein de la vierge Marie (Luc 1:35; Matthieu 1:18-21). On appelle cela la naissance virginale. C'est un grand mystère que la science ne peut pas expliquer, mais nous le recevons avec foi, car il est clairement enseigné dans la Bible. Il est pour nous la garantie que l'homme Jésus est Fils de Dieu et qu'il est né sans péché.
Affirmer qu'il est vrai homme est tout aussi important que confesser sa divinité. Son humanité véritable est pour nous source de consolation, de certitude du salut, au même titre que sa véritable divinité. Jésus-Christ est vrai homme: c'est pour nous la garantie que tout ce qu'il a fait, il l'a fait à notre place, de même qu'il a souffert et qu'il est mort comme notre médiateur, au nom de ses frères les hommes. Il est vrai Dieu: c'est pour nous la certitude qu'il a tout fait à la perfection, que son sacrifice avait le pouvoir de nous racheter et de nous sauver.
Questions de révision et exercices:
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1) Combien de morts Jésus a-t-il ressuscités selon les évangiles, attestant ainsi qu'il est vrai Dieu?
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2) Quelles sont les deux occasions où il a pleuré, montrant ainsi qu'il était vrai homme, et quand la Bible dit-elle qu'il a eu faim et qu'il était triste?
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3) Si Dieu seul peut faire des miracles, comment se fait-il que les prophètes et les apôtres aient eu le pouvoir d'en faire?
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4) Citez de mémoire trois textes affirmant clairement que Jésus-Christ est Dieu.
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5) Dites avec vos propres mots pourquoi il est essentiel qu'il soit vrai Dieu et vrai homme.
Vrai Dieu et vrai homme en une seule personne:
Il n'y a pas deux Jésus, mais un seul qui est à la fois vrai Dieu et vrai homme. Nous disons que la nature divine et la nature humaine sont unies en sa personne unique. C'est ce qu'on appelle l'union personnelle. C'est pourquoi à la question: "Qui dit-on que je suis, moi le Fils de l'homme?", Pierre peut répondre: "Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant" (Matthieu 16:13.16). Le "fils" que Marie enfanta était en même temps "Fils de Dieu" ou "Fils du Très-Haut" (Luc 1:31.32.35). Les apôtres l'ont clairement enseigné, mais Jésus lui-même l'avait proclamé. Il est évident qu'il se savait un homme comme tous ceux qui l'entouraient. Mais il avait aussi conscience d'être Fils de Dieu, Dieu, l'envoyé du Père. Il pouvait dire: "Je suis sorti du Père et je suis venu dans le monde" (Jean 16:28), "Moi et le Père nous sommes un" (Jean 10:30). Cf. encore Luc 2:48; Jean 8:58; 10:38; 17:5.
Les deux natures de Jésus-Christ sont étroitement et indissolublement liées l'une à l'autre, si bien qu'il agit toujours à la fois en vrai homme et en vrai Dieu. Qu'il prêche l'Evangile, qu'il discute avec ses interlocuteurs, qu'il guérisse des malades ou délivre des possédés, qu'il agonise sur la croix et ressuscite le troisième jour, tout cela il le fait en Fils de Dieu incarné, dans l'unité de sa personne. Chacune de ses deux natures participe à ses actes selon ses propriétés respectives qui appartiennent en fait à sa personne tout entière. En théologie, on appelle cela la communication des attributs. Quand le Christ ressuscite Lazare, il le fait en prononçant des mots humains: "Lazare, sors!" revêtus de sa toute-puissance divine. Quand il est présent dans le sacrement de la Sainte Cène, il l'est à la fois en vrai Dieu et vrai homme. C'est pourquoi nous croyons en la présence réelle de son corps et de son sang, présents partout où il le veut. Il serait faux et très dangereux de dire qu'il a fait certaines choses, comme les miracles, en tant que Dieu et d'autres, par exemple sa mort sur la croix, en tant qu'homme. Si seul l'homme Jésus est mort sur la croix, nous ne sommes pas sauvés. Mais le Christ a bien dit que personne ne lui prenait la vie, qu'il avait le pouvoir de la donner et de la reprendre (Jean 10:18). Et l'apôtre Pierre prend la peine de préciser que c'est le "Prince de la vie", c'est-à-dire le Fils de Dieu lui-même devenu homme, que les Juifs ont fait mourir sur la croix (Actes 3:15).
Son abaissement et sa glorification:
L'apôtre Paul, exhortant les chrétiens à l'humilité, les invite à imiter le Christ et écrit: "Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus-Christ, lequel, existant en forme de Dieu n'a point regardé comme une proie à ravir d'être égal à Dieu, mais s'est dépouillé lui-même, en prenant la forme d'un serviteur, en devenant semblable aux hommes. Et il a paru comme un vrai homme, il s'est humilié lui-même, se rendant obéissant jusqu'à la mort, même jusqu'à la mort de la croix. C'est pourquoi aussi Dieu l'a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue confesse que Jésus-Christ est Seigneur, à la gloire de Dieu le Père" (Philippiens 2:5-11).
Dans ce beau texte, Paul affirme deux choses: Jésus-Christ, quand il était sur terre, n'a pas fait étalage de sa toute-puissance et de sa majesté divines. Il n'a pas paradé avec sa divinité, mais l'a cachée en quelque sorte. Il ne l'a révélée que rarement (miracles, transfiguration, résurrection), s'est fait humble et tout petit, le serviteur de tous pour pouvoir les racheter. On appelle cela son abaissement, qui a duré de sa naissance à sa mort.
Mais Dieu son Père l'a récompensé pour son obéissance. Il l'a tout d'abord ressuscité des morts: "Dieu l'a ressuscité" (Actes 2:24.32). "Il a déployé sa force en Christ, en le ressuscitant des morts" (Ephésiens 1:20). Mais la Bible dit aussi qu'il est ressuscité de lui-même, ce qui veut dire qu'il avait le pouvoir de revenir à la vie. Jésus lui-même dit: "Détruisez ce temple, et en trois jours je le relèverai... Il parlait du temple de son corps" (Jean 2:19.21). "Personne ne m'ôte la vie, mais je la donne de moi-même. J'ai le pouvoir de la donner et j'ai le pouvoir de la reprendre" (Jean 10:18). "Je suis la résurrection et la vie" (Jean 11:25).
L'Ecriture enseigne aussi qu'avant de ressusciter des morts, Jésus-Christ s'est rendu en enfer pour y proclamer sa victoire: "Christ a été mis à mort quant à la chair et rendu vivant quant à l'Esprit dans lequel aussi il est allé prêcher aux esprits en prison" (1 Pierre 3:18-20). Il fallait que les démons et les damnés sachent que celui qu'ils avaient injurié, méprisé et rejeté avait accompli son oeuvre et réconcilié le monde avec Dieu, le délivrant du péché, de la mort et des puissances infernales.
Enfin, Dieu l'a fait "asseoir à sa droite" (Marc 16:19; Ephésiens 1:20-22; Hébreux 10:12; 1 Pierre 3:22). C'est un langage imagé qui signifie que le Christ fait à nouveau plein usage de sa toute-puissance et de sa majesté divines et qu'il participe avec son Père au gouvernement du monde. Dieu a mis toutes choses sous ses pieds (1 Corinthiens 15:24-27; Hébreux 2:8.9). Il est Seigneur de l'univers qu'il gouverne dans sa toute-puissance (Matthieu 28:18), et en particulier chef de son Eglise qu'il rassemble, édifie et conduit par son Evangile dans la vie éternelle (Psaume 2:6-8; Hébreux 1:8.9; Esaïe 9:5.6; Jean 18:36.37; Ephésiens 1:22; Colossiens 1:18). On appelle cela sa glorification.
Questions de révision et exercices:
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1) Pourquoi Jésus-Christ n'aurait-il pas pu sauver les hommes en étant seulement homme?
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2) Pourquoi n'aurait-il pas pu les sauver en étant seulement Dieu?
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3) Citez (ou trouvez) quelques textes bibliques montrant qu'il avait conscience d'être à la fois Dieu et homme.
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4) Que se serait-il passé, si Jésus avait, tout le temps où il était sur terre, utilisé sa toute-puissance et sa majesté divines?
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5) Il y a des théologiens qui disent que Jésus est allé en enfer pour y souffrir. D'autres estiment qu'il y est allé pour prêcher l'Evangile aux damnés et leur donner une dernière chance de salut. Que pensez-vous de ces deux opinions?
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6) Le Coran, livre sacré de l'Islam, parle aussi de Jésus. En quoi le fait-il d'une autre façon que la Bible?
3. JESUS-CHRIST PROPHETE
On appelle prophètes des hommes que Dieu avait choisis personnellement, revêtus de son Esprit Saint et divinement inspirés pour qu'ils annoncent sa Parole à son peuple. Jésus fut le dernier et en même temps le plus grand prophète de Dieu: "Après avoir autrefois, à plusieurs reprises et de plusieurs manières, parlé à nos pères par les prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé par le Fils" (Hébreux 1:1). Depuis la mort des apôtres, ses témoins oculaires, il n'y a plus eu de révélations nouvelles. Dieu a dit au monde tout ce qu'il avait à lui dire pour lui faire connaître sa volonté et le chemin du salut.
Comme les prophètes, Jésus a été directement envoyé par son Père: "Celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu, parce qu'e Dieu ne lui donne pas l'Esprit avec mesure" (Jean 3:34). "La paix soit avec vous! Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie" (Jean 20:21).
Un prophète pas comme les autres:
Jésus était différent de tous les autres prophètes parce que Dieu ne lui a pas donné l'Esprit "avec mesure" (Jean 3:34). Pour l'attester aux yeux de tous et l'accréditer comme son envoyé, Dieu fit entendre sa voix du haut du ciel, au moment de son baptême, et le Saint-Esprit descendit sur lui sous la forme d'une colombe (Luc 3:22; Jean 1:32). Un jour qu'il était dans la synagogue de Nazareth, Jésus, citant le prophète Esaïe, dit: "L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres. Il m'a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour publier une année de grâce du Seigneur" (Luc 4:18.19). Moïse avait déjà en son temps annoncé sa venue (Deutéronome 18:18).
"Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité" dit-il devant Ponce Pilate (Jean 18:37). Cela, tous les prophètes envoyés par Dieu l'avaient fait en leur temps. Mais Jésus a ceci de particulier qu'il n'a pas besoin de révélations divines pour parler. Il est omniscient, ce qui signifie qu'il sait toutes choses. Il parle en Fils de Dieu qui est "dans le sein du Père" (Jean 1:18), qui "rend témoignage de ce qu'il a vu et entendu" (Jean 3:31.32). Si déjà les prophètes, en tant que porte-parole de Dieu, ont dit la vérité, à combien plus forte raison Jésus dont la Parole est infaillible. La Bible précise encore qu'il prêchait avec autorité et non comme les scribes (Matthieu 7:23). Ses prédications consignées dans les évangiles montrent son immense talent de prédicateur.
A la différence des prophètes et de tous les autres prédicateurs, Jésus n'annonce pas la venue d'un autre. Il ne parle pas d'un autre, mais de lui-même. Il est à la fois l'annonciateur et l'annoncé. Il est celui en qui il faut croire si on veut être sauvé. C'est pourquoi il dit de lui des choses que les prophètes ne pouvaient pas dire d'eux-mêmes: il se présente comme le serviteur de tous qui est venu donner sa vie en rançon pour les hommes (Matthieu 20:28), le pain de vie qui donne la vie au monde (Jean 6:33.35), le bon berger qui donne sa vie pour les brebis et leur procure ainsi la vie éternelle (Jean 10:11.17.18.28), le cep qui procure la vie aux sarments (Jean 15:1-8), la résurrection et la vie (Jean 11:25.26), le chemin, la vérité et la vie, sans lequel on ne peut pas venir à Dieu (Jean 14:6), celui que Dieu a envoyé dans le monde pour qu'en croyant en lui ont ait la vie (Jean 3:14-16; 6:40.47). Aussi celui qui le rejette rejette-t-il Dieu lui-même et périra-t-il éternellement (Luc 10:16). Le contenu principal de la prédication du Christ fut donc ce qu'on appelle l'Evangile, c'est-à-dire la bonne nouvelle du pardon et du salut par la foi en son nom. C'est ce que la Bible appelle "l'Evangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu" (Marc 1:1).
Et maintenant?
Maintenant qu'il est au ciel, Jésus continue de prêcher. Il ne le fait plus directement, mais par les prédicateurs qu'il donne à son Eglise. Il a tout d'abord suscité les apôtres, témoins oculaires de tout ce qu'il a fait et qui ont entendu son enseignement. Jésus les a inspirés pour qu'ils consignent tout cela par écrit. Les apôtres ne font que lui rendre témoignage.
C'est ce que doivent faire aussi tous les prédicateurs que Jésus donne à son Eglise: "Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie", avait-il dit aux apôtres (Jean 20:21). C'est vrai aussi des autres serviteurs de l'Eglise. C'est Dieu ou Jésus-Christ qui les donne à son peuple: "Il a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs, pour le perfectionnement des saints en vue de l'oeuvre du ministère et de l'édification du corps de Christ" (Ephésiens 4:11; 1 Corinthiens 12:28). Paul peut dire aussi aux anciens de l'Eglise d'Ephèse que c'est le Saint-Esprit qui les a établis dans leur ministère pour paître le troupeau de Dieu (Actes 20:28).
Il existe cependant deux différences entre les apôtres d'un côté et de l'autre les évangélistes, pasteurs, docteurs et missionnaires: Jésus n'appelle pas ces derniers directement, mais se sert de l'Eglise pour établir ces derniers dans leur ministère. C'est l'Eglise, à qui le Seigneur a confié le sacerdoce universel, qui les choisit et leur fait imposer les mains (Actes 14:23; Tite 1:5-9). Mais elle fait cela au nom et avec l'autorité du Christ. C'est pourquoi l'Eglise est tenue d'écouter ses pasteurs et docteurs. Ils sont les envoyés du Seigneur, parlent en son nom et annoncent son Evangile. Rejeter leur parole, c'est rejeter la parole même du Christ. D'autre part, et c'est la deuxième différence, évangélistes, pasteurs, docteurs et missionnaires ne sont pas inspirés par le Saint-Esprit comme l'étaient les apôtres et avant les apôtres, les prophètes. Ils doivent donc conformer tout leur enseignement à la Parole de Dieu. Il n'y aura plus de révélation nouvelle pour guider l'Eglise dans la connaissance et la foi. Il ne faut rien ajouter à la Bible ni rien en retrancher (Apocalypse 22:18.19) et prêcher son message fidèlement. C'est à cela qu'on reconnaît les serviteurs de Dieu et qu'on les distingue des faux docteurs.
Questions de révision et exercices:
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1) Quelle est la différence entre Jésus et les autres prophètes?
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2) Comment expliqueriez-vous ce texte de la Bible: "Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre angulaire" (Ephésiens 2:20)?
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3) Sur quoi se fonde l'autorité des pasteurs et des autres ministres de l'Eglise?
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4) Que répondriez-vous aux Pentecôtistes et autres charismatiques qui affirment que Dieu leur accorde des révélations?
4. JESUS-CHRIST SACRIFICATEUR
La Bible présente le mystère de l'oeuvre du Christ en un langage emprunté à la vie religieuse, sociale et politique de l'époque. Elle parle tantôt de sacrificateur, de sacrifice et de victime, tantôt de rachat ou de rédemption, tantôt de réconciliation et de paix.
Sacrifice expiatoire:
Dire que Jésus-Christ est sacrificateur ou souverain sacrificateur, c'est croire que le sacerdoce institué par Moïse préfigurait son oeuvre. Dieu avait fait mettre en place tout un système sacrificiel (holocaustes, sacrifices d'expiation, de culpabilité, d'actions de grâces) destiné à obtenir le pardon. Ces sacrifices étaient apportés au nom du peuple par les sacrificateurs issus de la famille d'Aaron. Ils rappelaient à Israël que son Dieu avait horreur du péché, que celui-ci entraînait la mort du pécheur, mais que dans sa bonté, le Seigneur autorisait le coupable à offrir à sa place une victime qui devait être un animal sans défaut et sans tache. Tout cela cependant ne faisait que préfigurer l'oeuvre que le Christ allait accomplir en son temps. Il est bien évident, en effet, que les sacrifices d'animaux "ne peuvent rendre parfait sous le rapport de la conscience celui qui rend ce culte" (Hébreux 9:9). Son sang qui n'est pas celui de boucs et de veaux a obtenu "une rédemption éternelle" (Hébreux 9:12). Ce que les victimes animales de l'ancienne alliance n'ont pu réaliser, Jésus l'a donc fait en se sacrifiant pour le monde.
Jésus est à la fois sacrificateur et victime. Sacrificateur, il l'est pour toujours (Hébreux 5:6). A la différence de ses prédécesseurs dans l'ancienne alliance, il est un sacrificateur saint et innocent (Hébreux 7:26). Il est entré non dans un tabernacle fait de main d'homme, mais dans le tabernacle céleste (Hébreux 8:1; 9:24). Et cela, après avoir offert un seul sacrifice. Il n'avait pas à le renouveler ni à en apporter un pour lui-même avant d'en apporter pour le peuple, car il est saint et son sacrifice fut parfait (Hébreux 9:25-28).
Jésus a été aussi victime. Il s'est "offert lui-même sans tache à Dieu" (Hébreux 9:14), s'est "livré" à Dieu pour nous (Galates 2:20; Ephésiens 5:2). La Bible l'appelle "victime expiatoire" (Romains 3:25; 1 Jean 2:2; 4:10). Il s'agissait pour lui d'expier les péchés des hommes.
Rédemption et réconciliation:
L'Ecriture Sainte parle encore de rédemption, quand elle déclare que "nous avons la rédemption par son sang, la rémission des péchés" (Ephésiens 1:7), que nous avons été "rachetés par le sang précieux de Christ comme d'un agneau sans défaut et sans tache" (1 Pierre 1:18). Ailleurs il est dit que nous avons été "délivrés de nos péchés par son sang" (Apocalypse 1:5), que Jésus s'est "acquis" l'Eglise par son sang (Actes 20:28), que ce sang a été répandu pour la rémission de nos péchés (Matthieu 26:28), qu'il a donné sa vie en rançon pour beaucoup d'hommes (Matthieu 20:28). Il s'agissait donc de les délivrer du péché, de la mort et du pouvoir de Satan.
Enfin, il est question de réconciliation. "Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n'imputant point aux hommes leurs offenses" (2 Corinthiens 5:19). "Lorsque nous étions ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils" (Romains 5:10). C'est ainsi que le Christ a fait la paix entre Dieu et le monde (Romains 5:1). Il est notre paix, comme le dit l'apôtre (Ephésiens 2:14). Il nous donne sa paix (Jean 14:27), en lui nous avons la paix (Jean 16:33).
Satisfaction vicaire:
Tout cela revient à affirmer que Jésus a par son obéissance satisfait à la justice divine, qu'il a fait ce qu'elle exigeait et qu'il l'a fait pour nous. C'est le sens de ce terme qui, nous le reconnaissons, n'est pas biblique, mais qui décrit bien ce que, selon la Bible, Jésus a fait.
L'Ecriture Sainte affirme en effet: "Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la Loi et ne le met pas en pratique" (Deutéronome 21:23; Galates 3:10). Tous sont "sous l'empire du péché" (Romains 3:9), le monde entier est "coupable devant Dieu" (Romains 3:19). "Le salaire du péché est la mort" (Romains 6:23). La condamnation a frappé tous les hommes (Romains 5:12). Nous sommes tous par nature des "enfants de colère" (Ephésiens 2:3). En d'autres termes, la Loi de Dieu demande une vie sainte, sans péché, parfaitement juste: "Vous serez saints, car je suis saint, moi l'Eternel votre Dieu" (Lévitique 19:2; 1 Pierre 1:16). Il ne suffit pas de faire de son mieux. L'obéissance doit être totale, parfaite. La justice de Dieu en effet exige le châtiment du pécheur, et celui-ci n'est rien moins que la mort et la condamnation éternelle. La situation de l'homme est donc désespérée, sans issue. Depuis la chute, personne n'est à la hauteur des exigences divines. Nous méritons tous d'être abandonnés par Dieu et livrés aux peines éternelles.
Mais c'est là que le Seigneur, dans sa miséricorde, est intervenu. Jésus s'est fait notre médiateur (1 Timothée 2:5). Le Fils de Dieu s'est incarné, est devenu le frère des hommes et a accompli la loi à leur place (Matthieu 5:17). "Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, né sous la Loi, afin de racheter ceux qui étaient sous la Loi" (Galates 4:4). Sa vie n'a été qu'obéissance parfaite (Jean 6:38; Romains 5:18.19), sainteté et justice. C'est ce qu'on appelle son obéissance active, car tout cela, il l'a fait pour les hommes, pour pallier leurs désobéissances et leurs péchés. Quant à son obéissance dite passive, elle consiste en ce qu'il a accepté d'être châtié à la place des hommes. L'enseignement de la Bible est très clair et formel à ce sujet.
Elle affirme deux choses: Premièrement que Dieu lui a imputé nos péchés, qu'il "a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous" (Esaïe 53:6), qu'il l'a fait "devenir péché pour nous" (2 Corinthiens 5:21), qu'il a "porté nos péchés en son corps sur le bois" (1 Pierre 2:24). Dieu l'a donc tenu pour responsable des péchés commis par les hommes. Ensuite la Bible enseigne qu'il l'a frappé pour les péchés qu'il portait et qu'il n'avait pas commis lui-même: "Christ nous a rachetés de la malédiction de la Loi, étant devenu malédiction pour nous" (Galates 3:13). "Ce sont nos souffrances qu'il a portées, c'est de nos douleurs qu'il s'est chargé, et nous l'avons considéré comme frappé de Dieu et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités. Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c'est par ses meurtrissures que nous sommes guéris... L'Eternel a fait retomber sur lui l'iniquité de nous tous" (Esaïe 53:4.5.6). "Christ a souffert une fois pour nos péchés, lui juste pour les injustes" (Pierre 3:18). Dieu l'a abandonné sur la croix comme le pire des coupables (Matthieu 27:46). Cf. encore Romains 4:25; 5:6-8; 8:32; Galates 1:4; Hébreux 2:9; 9:28; 1 Pierre 2:24; Jean 1:29, etc.
De tout temps, cet enseignement de l'Ecriture Sainte s'est heurté à l'opposition des hommes. Les arguments sont les suivants: Comment, Dieu est dur et intransigeant au point d'exiger la mort et la condamnation éternelle du pécheur? Il a une telle soif de justice qu'il exige le châtiment, et un châtiment terrible? Ne peut-il pas pardonner sans cela? Et pourquoi accepte-t-il la mort d'un innocent? Depuis quand un innocent peut-il payer pour les coupables? Et on pourrait rallonger la liste des questions... Alors certains ont voulu vider la mort du Christ de toute notion de châtiment et d'expiation pour ne voir en elle qu'une simple démonstration d'amour. D'autres ont prétendu que Jésus n'est mort que pour donner un exemple, pour montrer aux hommes jusqu'où doit aller l'obéissance à Dieu. D'autres enfin n'ont pas hésité à dire que sa mort n'était qu'un accident, qu'il avait été victime de ses idées, pour avoir défendu des opinions que son peuple n'a pas acceptées, etc. La doctrine de la Bible est, dit-on, d'un autre âge. On ne peut plus se représenter Dieu de cette façon. Mais l'apôtre Paul en était déjà conscient, lui qui écrivit: "La prédication de la croix est une folie pour ceux qui périssent; mais pour nous qui sommes sauvés elle est une puissance de Dieu... Nous prêchons Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens, mais puissance de Dieu et sagesse de Dieu pour ceux qui sont appelés, tant Juifs que Grecs" (1 Corinthiens 1:18.23.24). Rares sont, de nos jours encore, les théologiens qui souscrivent à cette doctrine avec une foi d'enfant, sans chercher à l'édulcorer, à arrondir ses angles pour lui enlever ce qu'elle a de scandaleux. Pourtant c'est à ce prix-là que nous avons été rachetés, et le théologien du Moyen Age Anselme disait à son interlocuteur qui la mettait en doute: "Tu n'as pas compris de quel poids est ton péché". On pourrait ajouter avec l'apôtre Paul: ni à quel prix tu as été racheté (1 Corinthiens 6:20).
On a soutenu aussi que cette façon de présenter l'oeuvre de Jésus ne peut pas être juste, car elle postule un changement en Dieu: il serait passé de la colère à l'amour. Or Dieu, à la différence des hommes, est immuable. Il ne change pas d'avis et de sentiments. Et pourtant la Bible dit que l'Eternel s'est repenti d'avoir fait ceci ou cela (Genèse 6:6; Exode 32:12-14;; 1 Samuel 15;:11, etc.). Il est vrai qu'il est immuable, mais nous ne pouvons pas le comprendre tel qu'il est, dans sa majesté insondable. Il "habite une lumière inaccessible" (1 Timothée 6:16). Aussi, pour se faire comprendre des pauvres humains que nous sommes, se met-il à notre niveau et utilise-t-il un langage qui nous est accessible. Il lui a plu de nous présenter dans la Bible la mort du Christ comme un sacrifice, de parler de rédemption et de réconciliation. A nous de recevoir cette révélation d'un coeur croyant!
Nous le reconnaissons volontiers, et les apôtres l'ont fait avant nous: ce message de l'Evangile a quelque chose de profondément insensé et scandaleux. Mais aussi de profondément merveilleux. Il fait du christianisme une religion unique en ce monde. Dieu lui-même s'est fait homme et a pris la place des hommes pour subir le châtiment qu'ils ont mérité et leur acquérir ainsi un pardon et un salut gratuits qu'il les invite simplement à saisir par la foi. L'homme n'a pas à se réconcilier son Créateur, à combler ou enjamber le fossé qui le sépare de lui, à assouvir sa colère et mériter ses faveurs. Tout cela, il est incapable de le faire, c'est pourquoi son Dieu l'a fait pour lui. Preuve d'un amour inouï, inconcevable en ce bas monde! "Christ, au temps marqué, est mort pour des impies. A peine mourrait-on pour un juste. Quelqu'un peut-être mourrait pour un homme de bien. Mais Dieu prouve son amour envers nous en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous" (Romains 5:6-8).
L'oeuvre du Christ sur la croix, si elle dévoile la justice parfaite de Dieu et révèle ses saintes exigences, est avant tout une démonstration de son amour. Il est vrai que Dieu est saint et qu'il a en horreur le péché, mais il serait tout à fait faux de dire qu'il ne se réconcilie qu'à contrecoeur. Il aime pardonner et sauver et veut le faire. Si sa sainteté ne lui permet pas de fermer les yeux devant les péchés comme s'ils n'existaient pas, son amour pour les hommes n'accepte pas qu'ils périssent. Sa miséricorde exige qu'ils soient graciés et comblés de ses bénédictions éternelles.
Nous empruntons à Carl Fr. Wisloff l'anecdote suivante: C'est l'histoire d'un missionnaire chez les Indiens à qui un catéchumène dit le jour de son baptême: "A deux reprises nous avons eu des visites de missionnaires avant toi. Le premier nous a dit: "Il ne faut pas adorer plusieurs dieux, car il n'y en a qu'un". Nous lui avons répondu: "Il ne faut pas croire que nous ignorions l'existence du grand esprit, celui qui est au-dessus de tous et de tout". L'autre est venu et nous a dit: "Il ne faut pas voler, il ne faut pas tuer, il ne faut pas commettre d'adultère...". Nous lui avons répondu: "Nous savons tout cela, va le dire à tes frères blancs, car eux ne semblent pas le savoir". Toi tu es venu et tu nous as dit ce que nous n'avons jamais entendu ni cru, que Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle (Jean 3:16)" (Ce que je crois, 1991, p. 91). C'est ce que Jésus lui-même est venu dire aux hommes.
Certains théologiens prétendent que Dieu ne veut pas sauver tous les hommes, mais seulement un nombre restreint d'élus. Ils en concluent que Jésus-Christ n'est mort que pour ceux-la. Ce n'est pas ce qu'enseigne la Bible. Jésus est en effet l'Agneau de Dieu qui ôte "le péché du monde" (Jean 1:29). C'est le monde que Dieu a tant aimé et qu'il veut sauver par la foi en son Fils (Jean 3:16). C'est le monde qu'il a réconcilié avec lui-même (2 Corinthiens 5:19). Jésus est "une victime expiatoire pour nos péchés, non seulement pour les nôtres, mais pour ceux du monde entier" (1 Jean 2:2). L'apôtre Pierre va jusqu'à dire que ceux qui périssent "renient le maître qui les a rachetés" (2 Pierre 2:1).
La rédemption est aussi universelle que l'amour de Dieu. Jésus est mort pour tous les hommes, parce que Dieu veut les sauver tous. Tous ont été objectivement réconciliés avec lui. Une sentence de grâce a été prononcée à Golgotha en faveur de tous. Le salut a été effectivement acquis à tous. C'est ce que l'apôtre Paul affirme très clairement, quand il met en parallèle Adam et le Christ pour montrer que si l'un a été pour tous les hommes cause de condamnation et de mort, l'autre est pour tous source de bénédictions, de pardon et de vie (Romains 5:12-21).
Ce n'est pas à dire que tous les hommes seront réellement sauvés. Il n'y a de salut que par la foi en Jésus. Il faut croire en lui pour ne pas périr (Jean 3:16). Mais cela, nous le verrons dans un autre chapitre.
Précisons encore que la mort du Christ apporte au croyant la délivrance. Il est délivré du châtiment de ses fautes. Dieu ayant imputé ses péchés à Jésus ne les lui impute plus. Il n'est plus en colère, mais donne libre cours à sa grâce. Le croyant est par ailleurs délivré du châtiment principal du péché qu'est la mort. Mais les hommes ne continuent-ils pas de mourir, qu'ils soient croyants ou pas? Si! Il faut donc préciser les choses. Le chrétien est délivré par Jésus de ce qu'on appelle la mort spirituelle, c'est-à-dire de l'incrédulité et
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Par lutherien le 25 Novembre 2009 à 17:43
L'homme est une créature de Dieu, une créature à l'origine parfaite comme tout ce que fait le Seigneur. De plus, il fut créé à l'image de Dieu et représentait ainsi le point culminant de son oeuvre. Nous rejetons comme contraire au clair enseignement de la Bible l'affirmation selon laquelle l'homme serait issu par évolution du monde animal et aurait avec les singes un ancêtre commun. La Bible affirme qu'il fut l'objet d'un acte créateur tout à fait particulier, que Dieu "forma l'homme de la poussière de la terre et souffla dans ses narines un souffle de vie" (Genèse 2:7). Tout en concédant volontiers que ce texte décrit un acte créateur dont les modalités nous seront toujours mystérieuses, nous affirmons que c'est de cette façon, donc par un acte spécial, qu'il a plu à Dieu de créer l'homme, et rien ne nous autorise à croire que cette "poussière" aurait été un animal ou un pré-adamite. Puis la Bible précise que la femme fut tirée de l'homme. Ainsi apparut sur terre le premier couple humain.
Il s'ensuit que l'humanité tout entière descend du premier couple, ce qui fait dire à l'apôtre Paul: "Dieu a fait que tous les hommes, sortis d'un seul sang, habitent sur toute la surface de la terre, ayant déterminé la durée des temps et les bornes de leur demeure" (Actes 17:26). Tous les hommes sont donc solidaires les uns des autres, dans la condamnation comme dans la rédemption. Tous ont péché dans le premier Adam et tous revivront dans le deuxième Adam qu'est le Christ. De même que le péché d'Adam a été imputé à tous les hommes, la justice du Christ est là, prête à être imputée à tous les hommes, et effectivement imputée à tous ceux qui croient.
1. LA CONSTITUTION DE L'HOMME
On affirme communément que l'homme possède une âme et un corps. La philosophie grecque faisait un pas de plus en opposant l'âme au corps. Elle enseignait que le corps étant matière, est quelque chose de mauvais qu'il faut savoir mépriser, et qu'il constitue une prison pour l'âme. Celle-ci est immatérielle et donc bonne par nature, et son vrai bonheur consiste à être libérée du corps. D'où la doctrine de la métempsycose ou migration des âmes qui est professée par la plupart des religions orientales, selon laquelle l'âme d'un homme quitte son corps au moment de la mort, pour entrer dans un autre corps (animal ou humain). S'il s'est efforcé de rechercher le bien, sa vie sera dans cette existence nouvelle meilleure que ce qu'elle a été, jusqu'au jour où, ayant atteint la perfection, son âme sortira de ce cycle de réincarnations pour être enfin libre.
La Bible affirme elle aussi que l'homme a une âme et un corps ou plutôt qu'il est âme et corps, mais n'oppose pas les deux comme des éléments contraires. Ame et corps ont les mêmes besoins et les mêmes aspirations: "O Dieu! tu es mon Dieu, je te cherche. Mon âme a soif de toi, mon corps soupire après toi, dans une terre aride, desséchée, sans eau" (Psaume 63:2). "Mon âme soupire et languit après les parvis de l'Eternel. Mon coeur et ma chair poussent des cris vers le Dieu vivant" (Psaume 84:3). Le corps n'est pas mauvais parce qu'il est matière, et l'âme n'est pas bonne sous prétexte qu'elle est immatérielle. Dieu a créé l'homme bon, dans son corps et dans son âme, et s'il est mauvais depuis la chute, il l'est dans les deux à la fois. On dit que l'enseignement de l'Ecriture Sainte est moniste, par opposition au dualisme de la philosophie grecque et des religions orientales.
L'homme peut tuer son prochain physiquement, mais n'a pas de pouvoir sur sa vie intérieure et sa destinée éternelle. Jésus disait: "Ne craignez pas ceux qui tuent le corps et qui ne peuvent tuer l'âme. Craignez plutôt celui qui peut faire périr l'âme et le corps dans la géhenne" (Matthieu 10:28). De quelqu'un de vivant on dit que son âme est en lui, d'un mourant qu'il rend l'âme, et d'un ressuscité que son âme est revenue en lui (Genèse 35:18; 1 Rois 17:21.22; Jérémie 15:9; Matthieu 27:50; Actes 7:59; 20:10; Apocalypse 6:9).
On dit aussi que l'enseignement de la Bible est dichotomiste, ce qui signifie que l'homme est fait de deux éléments, qu'il a une âme et un corps. Quand il lui arrive de distinguer entre l'âme et l'esprit d'un homme, elle n'en fait donc pas deux éléments distincts. Dans la phrase de Marie: "Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit se réjouit en mon Dieu" (Luc 1:46.47), les deux propositions sont sans doute synonymes. Ce sont alors deux façons différentes de dire la même chose. Ame et esprit semblent être des termes interchangeables. Rendre l'âme est la même chose que rendre l'esprit (Genèse 35:18; Jérémie 15:9; Matthieu 27:50; Actes 7:59).
D'où vient l'âme de l'homme? Cette question a reçu deux réponses différentes. Certains Pères de l'Eglise disaient que Dieu implante une âme à chaque foetus, dans le ventre de sa mère (créationnisme). D'autres au contraire soutenaient que l'âme de l'homme est unie à son corps dès le moment de la conception, que les parents transmettent l'une et l'autre à leurs enfants (tradutianisme). Il existe des arguments pour et contre l'une ou l'autre de ces explications. C'est le genre de question qui ne trouve pas de réponse dans la Bible et où on ne peut pas trancher. L'Eglise luthérienne a cependant une préférence pour le tradutianisme qui lui paraît plus compatible avec la doctrine du péché originel.
L'Ecriture Sainte emploie souvent le mot "chair". Celui-ci désigne très rarement la viande animale ou humaine (Genèse 2:21; 17:11 ss.; 41:2.3; Lévitique 12:3; Esaïe 44:16; Ezéchiel 4:14). Appliqué à l'homme, il le décrit d'une façon générale comme un être pécheur, faible, passager et mortel. Ainsi, dans ce texte bien connu: "Toute chair est comme l'herbe, et tout son éclat comme la fleur des champs. L'herbe sèche, la fleur tombe, quand le vent de l'Eternel souffle dessus. Certainement le peuple est comme l'herbe. L'herbe sèche, la fleur tombe, mais la parole de notre Dieu subsiste éternellement" (Esaïe 40:6.7).
2. L'HOMME AVANT LA CHUTE
La Bible enseigne que l'homme a été créé à l'image de Dieu: "Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance. Dieu créa l'homme à son image, il le créa à l'image de Dieu" (Genèse 1:26.27; 5:1). Les deux mots "image" et "ressemblance" sont sans doute des synonymes.
De quoi s'agit-il? Il est évident qu'il n'est pas question d'une ressemblance corporelle, Dieu n'ayant pas de corps. On peut songer, bien sûr, à tout ce qui distingue l'homme de l'animal et le rapproche de Dieu, le fait notamment qu'il est un être rationnel, intelligent, capable de réfléchir, doué de mémoire, qui possède le sens du beau et sait distinguer entre le bien et le mal, autant de capacités qui font que Dieu lui confia la domination sur la nature. Cependant la Bible va plus loin et propose une définition plus précise. Elle demande en effet aux croyants de se "dépouiller du vieil homme" et de "revêtir l'homme nouveau", et dit de cet homme nouveau qu'il est "créé selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité" (Ephésiens 4:21), qu'il se "renouvelle dans la connaissance selon l'image de celui qui la créé" (Colossiens 3:9.10). Dans l'épître aux Romains, l'apôtre Paul dit de ceux que Dieu a connus d'avance qu'il "les a aussi prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son Fils soit le premier-né de plusieurs frères" (Romains 8:29). Les chrétiens sont destinés à être, partiellement maintenant et tout à fait dans le ciel, semblables à Jésus-Christ leur Seigneur, saints et justes comme lui. Pierre va jusqu'à dire qu'ils deviennent par la foi "participants de la nature divine" (2 Pierre 1:4). Si nous retenons cette définition, nous dirons que l'image de Dieu réside non seulement dans les aptitudes mentales et émotionnelles, mais aussi dans la sainteté, la justice et la connaissance. C'est en cela que l'homme ressemblait à Dieu et qu'il ne lui ressemble plus... Cette image-là, il l'a perdue par la chute. Les deux textes que nous venons de citer exhortent les croyants à progresser dans la connaissance, la sainteté et la justice. C'est ainsi qu'ils ressemblent de nouveau à Dieu. Mais d'une façon bien imparfaite, car le péché est toujours en eux. Ce n'est que dans le ciel qu'ils seront entièrement justes et saints et qu'ils connaîtront le Seigneur de façon parfaite.
Questions de révision et exercices:
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1) En quoi l'évolutionnisme est-il, à votre avis, contraire à l'enseignement de l'Ecriture?
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2) Quelle est la différence, en ce qui concerne la constitution de l'homme, entre la philosophie grecque et les religions orientales d'un côté, le christianisme de l'autre?
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3) Quelle était la condition de l'homme avant la chute?
3. L'HOMME DEPUIS LA CHUTE
L'humanité est aux prises avec le péché, en tout temps et en tout lieu. C'est quelque chose que personne ne peut nier. Il suffit de lire les journaux, d'allumer la télévision ou tout simplement d'ouvrir les yeux et de regarder autour de soi et... en soi. Et il en a toujours été ainsi.
Le péché:
Il existe dans la Bible toute une série de mots hébreux et grecs que les traductions françaises rendent tour à tour par les termes "péché", "injustice", "transgression", "iniquité", "rébellion", "faute", "erreur", etc. Chacun d'eux a sa nuance propre. Ce sont autant de façons différentes de dire que la vie de l'homme n'est pas conforme à ce que Dieu exige dans sa Loi. Alors il existe, comme nous aurons l'occasion de le voir, bien des différences d'un péché à l'autre, mais ils ont tous, petits et grands, connus ou secrets, ceci de commun qu'ils sont autant de transgressions de la Loi divine: "Quiconque pèche transgresse la Loi, et le péché est la transgression de la Loi" (1 Jean 3:4). Pécher, c'est transgresser la Loi ou encore "commettre l'iniquité" (Matthieu 7:23). Cette Loi est révélée dans l'Ecriture Sainte, mais aussi inscrite dans la conscience de chaque homme. C'est pourquoi il n'est pas nécessaire d'avoir lu la Bible pour la transgresser. Aussi tous sont-ils "sous l'empire du péché" (Romains 3:9), juifs et païens, et tout est-il "renfermé sous le péché" (Galates 3:22).
Dieu est saint et pur. Il exige donc de l'homme qu'il soit lui aussi saint et pur, dans ses pensées, ses paroles et ses actes. C'est pourquoi une simple colère condamne (Matthieu 5:22), la convoitise des yeux est assimilée à un adultère (Matthieu 5:28) et la haine à un meurtre (1 Jean 3:15). Il n'est pas nécessaire que le péché soit délibéré, pensé, voulu, prémédité, pour être péché. On peut pécher aussi par faiblesse, par ignorance ou par omission. L'homme est même coupable de la corruption qu'il a héritée en naissant dans ce monde et à laquelle il ne peut pas échapper. David confesse à Dieu qu'il est "né dans l'iniquité" et que sa mère l'a "conçu dans le péché" (Psaume 51:7). Pierre ne voulait pas renier Jésus (Matthieu 26:69-75), et Paul reconnaît qu'en persécutant les chrétiens il avait agi par ignorance (1 Timothée 1:13).
Nous ne saurons jamais pourquoi Dieu, sachant qu'elle aurait lieu, a permis la chute. Mais une chose est certaine, c'est qu'il ne l'a pas voulue. Elle a eu lieu parce que Satan a tenté l'homme et que celui-ci, parfaitement capable de résister à la tentation, mais oubliant ce que le Seigneur lui avait dit, lui a obéi. Aussi en est-il entièrement responsable, comme il est responsable de tous les péchés qu'il commet dans sa vie. Il est donc faux de dire que l'homme est neutre, quand il vient au monde, qu'il n'est ni mauvais ni bon, et qu'il ne devient mauvais qu'en suivant le mauvais exemple que lui donne son entourage. Il est aussi faux de dire que, malgré ses péchés, il est capable de faire quelque chose pour son salut.
La culpabilité:
La Loi divine accuse le pécheur et le déclare coupable: "Ce que dit la Loi, elle le dit à ceux qui sont sous la Loi, afin que toute bouche soit fermée et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu" (Romains 3:19). L'homme est coupable quand le Seigneur tient compte de son péché et le lui impute. Parce qu'il peut faire le contraire, ne pas imputer le péché ou, ce qui revient au même, le pardonner. Dans ce cas, quoique pécheur, l'homme n'est plus coupable à ses yeux. C'est ce que David confesse quand il s'écrie: "Heureux celui à qui la transgression est remise, à qui le péché est pardonné! Heureux l'homme à qui l'Eternel n'impute pas l'iniquité!" (Psaume 32:1.2; Romains 4:7.8).
La culpabilité est une réalité objective, indépendante de ce que l'homme ressent ou pas. Qu'il le reconnaisse ou non, qu'il l'admette ou le nie, il est coupable dès l'instant où il transgresse la Loi divine. Il ne faut donc pas confondre la culpabilité proprement dite avec le sentiment de culpabilité ressenti par l'homme, et ressenti généralement à des degrés divers. Certains hommes ont une conscience très délicate et sont conscients de leurs moindres fautes, tandis que d'autres semblent ne plus avoir de conscience du tout ou agissent contre leur conscience avec arrogance. L'apôtre Paul écrit aux Romains: "Quand les païens, qui n'ont point la Loi, font naturellement ce que prescrit la Loi, ils sont, eux qui n'ont point la Loi, une loi pour eux-mêmes. Ils montrent que l'oeuvre de la Loi est écrite dans leurs coeurs, leur conscience en rendant témoignage et leurs pensées s'accusant et se défendant tour à tour" (Romains 2:14.15). Ce texte affirme trois choses: que la Loi est inscrite dans le coeur de l'homme, que la conscience en rend témoignage, et que tour à tour elle prend sa défense ou l'accuse, selon qu'il agit bien ou mal.
La Bible déclare aussi que l'homme reste sous l'emprise d'une mauvaise conscience aussi longtemps qu'il n'a pas la certitude du pardon, certitude qu'on ne trouve que dans la mort du Christ: "Nous avons, au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire..., et nous avons un souverain sacrificateur établi sur la maison de Dieu. Approchons-nous donc avec un coeur sincère, dans la plénitude de la foi, les coeurs purifiés d'une mauvaise conscience" (Hébreux 10:19-22).
Le châtiment:
Le châtiment est la peine dont Dieu frappe le coupable. La Bible enseigne en effet: "Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la Loi et ne le met pas en pratique" (Galates 3:10). "La mort s'est étendue sur tous les hommes, parce que tous ont péché... Par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes" (Romains 5:12.18). "Le salaire du péché, c'est la mort" (Romains 6:23). Cf. encore Job 34:11.12; Matthieu 5:26; 18:30; Romains 2:9; 3:23.
La mort est fondamentalement la séparation d'avec Dieu, source de toute vie. On distingue entre la mort spirituelle, la mort temporelle et la mort éternelle. La mort spirituelle est l'aliénation spirituelle de l'homme, le fait qu'il est loin de Dieu, qu'il refuse de faire sa volonté, le fuit et le hait. "Vous étiez morts par vos offenses et par vos péchés... Mais Dieu qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous a aimés, nous qui étions morts par nos offenses, nous a rendus vivants avec Christ", écrit Paul aux anciens païens qu'étaient les chrétiens d'Ephèse, comparant la conversion à une résurrection spirituelle (Ephésiens 2:1.4.5). La mort éternelle est le châtiment éternel que Dieu réserve aux pécheurs sans pardon, le fait qu'ils souffriront dans le corps et dans l'âme et qu'ils seront éternellement réprouvés, rejetés loin de sa face. "Ils auront pour châtiment une ruine éternelle, loin de la face du Seigneur et de la gloire de sa force" (2 Thessaloniciens 1:9; Matthieu 25:46). Quant à la mort temporelle, elle est pour l'incroyant le passage dans la mort éternelle, et pour le croyant l'entrée dans la vie éternelle. Elle ne constitue donc plus pour ce dernier un châtiment, mais lui permet d'aller chez le Seigneur, en attendant le jour où son corps ressuscitera en gloire. Elle est pour lui un sommeil beaucoup plus qu'une mort.
Questions de révision et exercices:
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1) Expliquez sur la base du texte de Genèse 3:1-19 en quoi consista la chute.
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2) Comment la Bible utilise-t-elle le mot mort?
4. LE PECHE ORIGINEL
La chute dans le péché:
La Bible affirme que l'origine du péché est la chute telle qu'elle est racontée par la Genèse (Genèse 3:1-19). L'Eglise luthérienne croit en l'historicité fondamentale de ce récit, ce qui signifie que la chute a eu lieu de la façon dont elle est racontée et que le récit qui en est fait échappe par définition à toute analyse critique. Elle fut l'oeuvre d'Adam et d'Eve, le premier couple humain. C'est par ce récit qu'il a plu au Seigneur d'expliquer l'origine du péché et de la mort et leur règne universel. Il ressort de ce texte que Satan est la cause principale de la chute et que le serpent en est la cause instrumentale (Apocalypse 12:9; 20:2). Il sema successivement le doute dans le coeur d'Eve, nia les conséquences du péché et la sainteté de Dieu en l'accusant de vouloir conserver un grand privilège pour lui-même, fit une fausse promesse au premier couple et éveilla de la sorte la concupiscence dans leur coeur, rendant le fruit désirable et suscitant l'envie d'en manger.
La raison humaine soulève à propos de ce récit un tas de questions et d'objections: Pourquoi Dieu a-t-il créé l'homme de façon à ce qu'il puisse succomber à la tentation? Pourquoi n'a-t-il pas empêché la chute, puisqu'il en connaissait à l'avance les conséquences désastreuses? Comment du reste l'homme, s'il était saint, pouvait-il être tenté par le mal? Ces questions restent sans réponses. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il a plu à Dieu de soumettre l'homme à une épreuve, tout en lui donnant les moyens de la surmonter, que la chute est pour l'homme une leçon d'humilité et qu'elle a donné au Seigneur la possibilité de manifester sa grande miséricorde en venant à son secours.
Qu'est-ce que le péché originel?
Nos abordons avec la doctrine du péché originel un point particulièrement important de l'enseignement de la Bible qui est contesté ou présenté de façon erronée par beaucoup d'Eglises. La raison humaine, en effet, ne peut ni accepter l'idée que tous les hommes sont coresponsables du péché d'Adam ni admettre leur totale déchéance et leur incapacité à faire quoi que ce soit pour leur salut. Elle est convaincue que, malgré ses fautes, ses lacunes, ses faiblesses et ses injustices, l'homme peut participer à l'oeuvre de sa réhabilitation et au moins rendre effective l'action qui consiste, de la part de Dieu, à le sauver. Luther, puis l'Eglise qui porte son nom ont dû élever la voix au XVI° siècle pour rejeter toute forme de synergisme et affirmer qu'en ce qui concerne le salut, l'homme ne coopère en aucune façon avec Dieu.
Le péché originel revêt deux aspects.
1) Il est tout d'abord l'imputation aux hommes du monde entier de la désobéissance d'Adam. C'est ce qu'enseigne l'apôtre Paul dans ce texte bien connu: "Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort s'est étendue à tous les hommes parce que tous ont péché... Si par l'offense d'un seul la mort a régné par lui seul, à combien plus forte raison l'abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus-Christ lui seul. Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s'étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l'obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes" (Romains 5:12-19).
On appelle cela la culpabilité héréditaire. Avant de devenir coupable aux yeux de Dieu par les péchés qu'il commet personnellement, l'homme l'est par nature, car il participe à la transgression d'Adam comme s'il l'avait commise lui-même. C'est une doctrine que la raison juge insensée et injuste. Mais qui est l'homme pour contester avec Dieu? Que celui qui se révolte contre une telle affirmation admette qu'il est tout aussi insensé et injuste de la part de Dieu d'imputer à son Fils innocent et pur les péchés du monde entier. On ne peut pas repousser la première affirmation tout en acceptant la seconde. Si la situation de l'humanité est désespérée en raison du péché originel, Dieu y apporte un remède parfait par le sacrifice du Christ. Ainsi l'homme est appelé en même temps à s'humilier devant le Seigneur et à glorifier sa bonté.
2) Mais le péché originel est aussi la transmission à toute l'humanité de la corruption d'Adam et d'Eve. L'homme vient au monde corrompu et incapable de mériter le salut par le bien qu'il fait. Adam engendra un fils non plus à l'image de Dieu, mais à sa propre image (Genèse 5:3). "Les pensées du coeur de l'homme sont mauvaises dès sa jeunesse" (Genèse 8:21). "Voici je suis né dans l'iniquité et ma mère m'a conçu dans le péché" (Psaume 51:7). "Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l'Esprit est esprit" (Jean 3:6), si bien que l'homme est par nature "enfant de colère" (Ephésiens 2:3).
Cela signifie qu'il est "privé de la gloire de Dieu" (Romains 3:23), que le bien n'habite pas en lui (Romains 7:18), qu'il est méchant (Luc 11:13) et impur (Job 14:4). Sa situation est telle qu'il est spirituellement aveugle. Il a "l'intelligence obscurcie" (Ephésiens 4:18), marche dans les ténèbres (Ephésiens 5:8) et "n'accueille pas les choses qui sont de l'Esprit de Dieu, car elles sont pour lui une folie et il ne peut les connaître" (1 Corinthiens 2:14). Il est plein de convoitises mauvaises: "C'est du coeur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les calomnies" (Matthieu 15:18.19). Il est par nature l'ennemi de Dieu et de sa volonté (Romains 3:9-20; 5:10; 8:7; Colossiens 1:21), esclave du mal (Romains 3:9; 6:1.6.20; 7:14.23.24), spirituellement mort, par ses offenses et ses péchés (Ephésiens 2:1.5; Colossiens 2:13).
Voilà un tableau bien sombre de l'humanité, mais c'est ce qu'enseigne la Bible. C'est ce que confesse aussi l'Eglise luthérienne. Deux textes pour le montrer:
"Nous enseignons... qu'après la chute d'Adam, tous les hommes nés de manière naturelle sont conçus et nés dans le péché. C'est-à-dire que tous, dès le sein de leur mère, ils sont remplis de désirs et de penchants mauvais et que, par nature, il ne peut y avoir en eux ni vraie crainte de Dieu, ni vraie foi en Dieu. Nous enseignons aussi que cette corruption innée, ce péché originel est véritablement un péché et qu'il voue à la damnation et à la colère éternelle de Dieu tous ceux qui ne naissent pas de nouveau par le baptême et le Saint-Esprit" (Confession d'Augsbourg, Article II).
"Le péché originel est une corruption si pernicieuse et si profonde de la nature humaine qu'aucune raison ne peut le comprendre. Mais il faut le croire, car cela est révélé dans l'Ecriture" (Articles de Smalcalde, III, Article 1).
Cette doctrine a suscité bien des controverses. Certains, comme le moine Pélage qui vécut au début du V° siècle, la rejetaient entièrement, soutenant que l'homme est neutre, ni bon ni mauvais, et qu'il devient l'un ou l'autre par un choix personnel. Pour lui, le péché n'était péché que s'il y avait consentement personnel. C'est ce qu'on appelle le pélagianisme. Quant au semi-pélagianisme catholique ou protestant, appelé encore synergisme, il enseigne la réalité du péché originel, mais en limite la portée, soutenant que malgré sa corruption et ses fautes, l'homme est capable d'apporter une part à l'oeuvre de son salut. Il est donc invité à collaborer avec Dieu par ses oeuvres, ses bonnes dispositions ou son consentement. Le Seigneur fait appel à ses ressources spirituelles et lui demande de les mobiliser pour devenir participant de la vie éternelle. Dans ce cas, le salut n'est plus un don gratuit du ciel. C'est la raison pour laquelle l'Eglise luthérienne a farouchement rejeté le synergisme sous toutes ses formes. L'enjeu était rien moins que la gratuité totale du salut par la foi en Christ et la certitude de ce salut fondée sur les promesses de l'Evangile.
Questions de révision et exercices:
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1) Quelles sont les deux facettes du péché originel?
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2) Exposez avec vos termes l'enseignement de Romains 5:12-21, en montrant les rôles respectifs d'Adam et de Jésus dans l'histoire de l'humanité.
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3) Qu'évoquent pour vous les expressions "spirituellement aveugle" et "spirituellement mort"?
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4) Pourquoi est-il important que l'Eglise chrétienne professe une doctrine correcte du péché originel?
5. LE PECHE ACTUEL
Définition:
On appelle péché actuel, par opposition à péché originel, un péché qui se commet, une transgression ponctuelle de la Loi divine, que ce soit en pensées, en paroles ou en actes. "Quiconque pratique le péché transgresse la Loi, et le péché est la transgression de la Loi" (1 Jean 3:4). "Retirez-vous de moi, vous qui commettez l'iniquité" (Matthieu 7:23). "Si vous faites acception de personnes, vous commettez un péché" (Jacques 2:9). Ce sont des actes que la Bible appelle les oeuvres de la chair (Galates 5:19), les oeuvres stériles des ténèbres (Ephésiens 5:11), les oeuvres du vieil homme (Colossiens 3:9), des oeuvres mortes (Hébreux 6:1; 9:14) ou criminelles (2 Pierre 2:8). Cela dit, l'adjectif "actuel" est pris en son sens large, car ces péchés se commettent aussi en paroles et en pensées.
D'où vient le péché? Il a un certain nombre de causes dites internes, propres à l'homme. Il vient tout d'abord du coeur qui est mauvais: "C'est du coeur que viennent les mauvaises pensées, les meurtres, les adultères, les impudicités, les vols, les faux témoignages, les calomnies" (Matthieu 15:18.19). Ou, ce qui revient au même, de la chair. Saint Paul dit du mal qu'il commet maintenant qu'il est un chrétien: "Ce n'est plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi, c'est-à-dire dans ma chair" (Romains 7:17.18). L'homme pèche par ignorance. Ce fut le cas de l'apôtre avant sa conversion, quand il persécutait les chrétiens (1 Timothée 1:13). Il pèche aussi parce qu'il n'arrive pas à maîtriser ses émotions. Il a des manifestations passionnelles comme la crainte, la colère, la jalousie, la convoitise. C'est sous l'emprise de la passion que David commit adultère avec Bath-Schéba. C'est dans un mouvement de colère que les fils de Zébédée voulurent faire tomber le feu du ciel sur un village de la Samarie. C'est dans un moment de peur que Pierre renia son Maître. Tout cela parce que le coeur de l'homme est par nature porté vers le mal. Jacques dit avec beaucoup de lucidité: "Chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise. Puis la convoitise, lorsqu'elle a conçu, enfante le péché, et le péché, étant consommé, produit la mort" (Jacques 1:14).
Le péché a aussi des causes externes. Tout d'abord Satan. Jésus dit à Pierre qui allait le renier: "Simon, Simon, Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment" (Luc 22:31), et quand il lui dit un jour: "Arrière de moi, Satan", il flaira que le diable le tentait par son propre disciple (Matthieu 16:23). Paul dit des chrétiens d'Ephèse qu'ils marchaient avant leur conversion "selon le train de ce monde, selon le prince de la puissance de l'air, de l'esprit qui agit maintenant dans les fils de la rébellion" (Ephésiens 2:2). Mais le croyant est aussi tenté par le monde, par le mauvais exemple que lui donnent les hommes, aussi Salomon exhorte-t-il en ces termes: "Mon fils, si des pécheurs veulent te séduire, ne te laisse pas gagner" (Proverbes 1:10), et Jésus nous demande-t-il de nous garder avec soin du levain des pharisiens et des sadducéens" (Matthieu 16:6). Combien de croyants, gagnés par le monde et ses séductions, sont déchus de la foi!
Classification des péchés:
On peut classser les péchés en plusieurs catégories, selon le point de vue auquel on se place. On distingue par exemple entre péchés volontaires ou délibérés et péchés de faiblesse. Cette distinction est extrêmement importante pour la cure d'âme. La volonté peut en effet être engagée à des degrés divers dans le péché. L'homme peut agir de façon délibérée voire préméditée, sachant qu'il fait le mal. C'était le cas d'Absalom (2 Samuel 15) et de Judas (Matthieu 26:14-16). Mais elle peut aussi passer à l'arrière-plan, quand on agit par ignorance, par inadvertance ou précipitation, sous l'effet d'une passion non contrôlée, par crainte ou par esprit de parti. Pierre renia le Christ par crainte (Luc 22:54-62), les disciples agirent sous l'effet de la jalousie (Matthieu 20:24). Les péchés de faiblesse que les chrétiens commettent encore chaque jour sont surtout les mauvaises pensées qui les assaillent et contre lesquelles ils ont du mal à lutter, les paroles non réfléchies et les gestes précipités. Un chrétien par définition ne commet de péché délibéré, en sachant sciemment qu'il fait le mal. En effet, il est gouverné par le Saint-Esprit. Il hait donc l'injustice et veut plaire à Dieu. Il est des péchés qu'on ne peut pas commettre tant qu'on est guidé et régi par l'Esprit de Dieu. Ce sont ceux dont la Bible dit que ceux qui les commettent ne verront pas le Royaume de Dieu (Romains 6:9.10).
On distingue aussi entre péché en connaissance de cause et péché par ignorance. Un péché n'a pas la même gravité selon qu'on le commet en sachant très bien qu'on fait le mal ou selon qu'on agit dans l'ignorance ou encore dans le doute. Jésus dit des Juifs qui veulent sa mort que leur péché est plus grand que celui de Ponce Pilate (Jean 19:11). Le serviteur qui a mal agi, tout en connaissant la volonté de son maître, sera puni plus sévèrement que celui qui ne l'a pas connue (Luc 12:47.48). Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement au jour du jugement que les villes de la Galilée qui ont eu le privilège d'entendre le Christ les appeler à la repentance (Matthieu 11:22).
Il y a péché par ignorance quand on est mal instruit et qu'on agit à cause de cela. C'est le cas par exemple de celui à qui on a appris qu'il fallait invoquer la Vierge et les saints et qui ignore que c'est contraire à l'Ecriture Sainte et, d'une façon générale, de tous les chrétiens victimes de fausses doctrines, dans la mesure où celles-ci ne renversent pas le fondement de la foi. Enfin, comme l'affirme le dicton, "dans le doute, abstiens-toi", ce que l'apôtre Paul formule de la façon suivante: "Tout ce qui n'est pas le produit d'une conviction est péché" (Romains 14:23).
Il y a aussi les péchés contre Dieu, contre le prochain et contre soi-même. Ils diffèrent par leur objet. Il y a péché contre Dieu quand on transgresse la première table de la Loi, et péché contre le prochain quand on viole ceux de la deuxième table. Mais en soi tout péché est péché contre Dieu, au moins indirectement, car il est transgression de sa volonté. Joseph s'abstint de commettre adultère pour ne pas pécher contre Dieu (Genèse 39:9), et le fils prodigue de la parabole confessa qu'il avait péché contre le ciel et contre son père (Luc 15:21). Enfin, on pèche contre soi-même quand on nuit à son corps ou son âme (abus d'alcool ou de tabac, recours aux drogues, entraînement sportif au-delà de ses limites personnelles, etc.).
L'Eglise catholique distingue traditionnellement entre péchés véniels et péchés mortels (cf. les sept péchés capitaux). Elle répertorie donc les péchés selon leur degré de gravité. C'est oublier que tout péché est mortel en ce sens qu'il entraîne la mort. "Le salaire du péché, c'est la mort" (Romains 6:23), et c'est vrai en soi de toute transgression de la Loi. Enfin, un péché n'est jamais véniel (c'est-à-dire pardonnable) en soi en ce qu'il mériterait le pardon, comme inversement tout péché est pardonnable parce que Dieu veut le pardonner. Ce n'est donc pas une question de gravité. Tous les péchés des incroyants sont mortels, et tous les péchés des croyants véniels. Tout dépend du statut de celui qui les commet. Les péchés, quels qu'ils soient, sont pardonnés à celui qui s'en repent sincèrement et qui croit en Christ, comme tous les péchés condamnent ceux qui vivent dans l'impénitence. Cependant, on peut appeler péché mortel chez le croyant tout péché délibéré commis contre les injonctions de la conscience et qui n'est pas suivi de la repentance, ou, ce qui revient au même, tout péché qui montre que celui qui l'a commis n'était plus sous la grâce, mais avait sombré dans l'impénitence (1 Corinthiens 6:9.10).
On distingue encore entre péchés de commission et péchés d'omission. Cette distinction est, elle aussi, très importante dans la prédication et la cure d'âme. Le serviteur qui a connu la volonté de son maître et qui ne l'a pas faite sera battu d'un plus grand nombre de coups que celui qui ne l'a pas connue (Luc 12:47). "Celui qui sait faire le bien et qui ne le fait pas commet un péché" (Jacques 4:17). On pèche en faisant le mal qu'on ne doit pas faire, mais on pèche aussi en ne faisant pas le bien qu'on doit faire. Les péchés d'omission ne sont pas en soi et a priori moins graves que les péchés de commission. Par contre, ils sont sans doute plus nombreux chez les chrétiens que ces derniers.
Enfin, un péché est impardonnable non en raison de sa gravité, mais lorsque celui qui le commet est dans un état tel qu'il ne peut plus se repentir. On appelle cela l'endurcissement, dont pharaon avait été un exemple éloquent (cf. le récit des plaies d'Egypte, Exode 7-11) et dans lequel Israël sombra en refusant d'écouter la voix de ses prophètes, puis celle du Christ. Dieu a fini par frapper son peuple d'aveuglement: "Il a aveuglé leurs yeux et il a endurci leur coeur, de peur qu'ils ne voient de leurs yeux, qu'ils ne comprennent du coeur, qu'ils ne se convertissent et que je ne les guérisse" (Jean 12:40). "Ils sont devenus durs d'entendement" et ont un voile sur les yeux quand ils lisent l'Ancien Testament dans leurs synagogues, dit Paul (2 Corinthiens 3:14-16). Jésus déclare en particulier que le blasphème contre le Saint-Esprit ne peut pas être pardonné (Matthieu 12:31.32) et l'apôtre Jean affirme qu'il existe un péché qui "mène à la mort" pour lequel il est vain de prier (1 Jean 5:16).
6. LE LIBRE-ARBITRE
Le mot "libre-arbitre" soulève le problème de la liberté de l'homme. L'homme est-il libre? Si on songe à une liberté absolue lui permettant de faire tout ce qu'il veut, il est évident qu'il ne l'est pas. Dieu seul est libre en ce sens et "fait tout ce qu'il veut" (Psaume 115:3). Il n'est pas libre non plus en ce qu'il a des obligations physiques et morales. Il est obligé de travailler et de se nourrir pour vivre, et en ce qui concerne la morale, il y a des choses qu'il ne peut pas faire, parce que sa conscience les lui interdit.
Par contre, il jouit d'une certaine liberté extérieure qui lui permet de faire des choix, de disposer de sa vie au moins dans une certaine mesure. Il peut décider de se marier ou de rester célibataire, de choisir son métier, son domicile ou ses amis, etc. Il peut décider également de s'astreindre à une certaine discipline et de vivre selon certains critères, de se vautrer dans le vice ou de mener une vie honorable et juste, d'être voleur ou honnête, menteur ou véridique, méchant et cruel ou bon et généreux. Il peut même décider de commettre ou de ne pas commettre certains péchés. On appelle cela la liberté extérieure qui lui permet de pratiquer une certaine justice appelée justice civile.
Cependant si par libre-arbitre on comprend l'aptitude à accomplir la volonté de Dieu et à acquérir une justice qui serve à l'obtention du salut, il faut affirmer avec clarté que l'homme ne la possède pas. La Bible dit qu'il est "chair" né de la chair (Jean 3:6), que "l'affection de la chair est inimitié contre Dieu" (Romains 8:7), que "les pensées du coeur de l'homme sont mauvaises dès sa jeunesse" (Genèse 8:21), que l'homme est mort par ses offenses et ses péchés (Ephésiens 2:1), ennemi de Dieu (Romains 5:10), que sans le Christ il ne peut rien faire (Jean 15:5.6). Cf. encore Genèse 6:3; Romains 3:10-19; 7:8-10.14; Galates 5:16; Ephésiens 2:3; Colossiens 1:21; 2:13. La situation naturelle de l'homme est telle qu'il est sous la malédiction de la Loi et incapable de s'en libérer: "Tous ceux qui s'attachent aux oeuvres de la loi sont sous la malédiction, car il est écrit: Maudit est quiconque n'observe pas tout ce qui est écrit dans le livre de la loi et ne le met pas en pratique... Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit: Maudit est quiconque est pendu au bois" (Galates 3:10.13).
D'autre part, l'Evangile n'est pas un message qui l'attire. "La prédication de la croix est une folie", le Christ crucifié "scandale pour les juifs, folie pour les païens" (1 Corinthiens 1:18.21.23; 2:8). Enfin, la Bible affirme avec beaucoup d'insistance que le salut est l'oeuvre de Dieu seul, un don gratuit de sa miséricorde, qu'il ne s'obtient pas par les oeuvres, que les croyants sont gratuitement justifiés par sa grâce (Romains 3:23; 9: 16; 11:5.6; Ephésiens 2:8.9).
L'homme naturel ne peut même pas se prédisposer à la grâce ou participer de façon active à sa conversion. Il est converti par la grâce de Dieu qui, par l'Evangile, change son coeur et le régénère. C'est Dieu qui ouvre les coeurs et y fait naître la foi (Actes 16;:14), qui fait briller la lumière dans les ténèbres (2 Corinthiens 4:16), qui attire les pécheurs à Jésus-Christ: "Nul ne peut venir à moi, si le Père qui m'a envoyé ne l'attire" (Jean 6:44). Dieu donne la "grâce de croire" (Philippiens 1:29) et de persévérer dans la foi en rendant "parfaite pour le jour de Jésus-Christ" la "bonne oeuvre" commencée en nous (Philippiens 1:6; 1 Pierre 1:5; 5:10).
Ce sont là autant de façons différentes de dire que l'homme ne peut en rien contribuer à sa réhabilitation et son salut. Il dépend entièrement de la grâce de Dieu et ne peut que tendre la main pour se laisser secourir. En un mot, il n'a pas de libre-arbitre lui permettant de collaborer avec la grâce divine et de participer activement, de quelque façon que ce soit, à son salut.
La Formule de Concorde qui mit fin au XVI° siècle à un certain nombre de controverses dans l'Eglise luthérienne, notamment concernant le libre-arbitre, s'exprime avec beaucoup de clarté quand elle dit:
"Nous croyons que, dans l'ordre des choses spirituelles et divines, la raison, le coeur et la volonté de l'homme non régénéré ne peuvent par leurs propres forces naturelles rien comprendre, rien croire, rien accepter, rien concevoir, rien vouloir, rien commencer, rien accomplir, rien faire, rien opérer, rien coopérer en quoi que ce soit. L'homme est entièrement corrompu et mort au bien, de telle sorte que dans la nature de l'homme après la chute et avant la régénération, il ne subsiste pas même une étincelle de forces spirituelles grâce auxquelles il pourrait se préparer à recevoir la grâce de Dieu ou la saisir quand elle est offerte, ou être de lui-même et par lui-même apte à la recevoir et s'y disposer ou contribuer à sa conversion" (Solida Declaratio, II, 7).
Questions de révision et exercices:
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1) Que penser de la distinction entre péchés mortels et péchés véniels?
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2) Quels sont les textes bibliques qui affirment qu'on pèche aussi par omission?
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3) L'homme possède-t-il ou non le libre-arbitre?
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4) Que répondre à celui qui dit que pour être converti il faut le vouloir, car Dieu ne contraint personne à croire?
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